mardi 16 septembre 2014

La poudrière du Moyen-Orient



Les évènements en Irak et en Syrie s’interpénètrent avec ceux en Ukraine. La situation devenant chaque jour plus complexe, la poudrière du Moyen-Orient finit par mettre la guerre aux portes de l’UE. Comme on pouvait s’y attendre le cessez-le-feu en Ukraine est précaire et l’aéroport de Donetsk, en particulier, est une verrue importante de Kiev dans la zone pro-russe de même que l’accès portuaire à la mer d’Azov. La signature de l’entrée de l’Ukraine dans une zone de libre-échange avec l’UE ne fait que ranimer un conflit avec la Russie qui la voit s’échapper de sa zone d’influence et considère que dans l’état actuel des choses, il s’agit là d’une nouvelle provocation après le renforcement des sanctions. 

Mais la Russie se trouve mêlée aux évènements en Irak pour lesquels les États-Unis et quelques alliés n’excluent pas d’aller porter l’aide militaire et le feu aérien en territoire syrien. Si la Russie ne peut s’opposer à la destruction d’un islamisme radical et terroriste, elle ne peut envisager que, sous ce prétexte, les occidentaux profitent de l’occasion pour bombarder la Syrie et annoncent le renforcement militaire des rebelles. Plusieurs éventualités peuvent se produire. L’EIIL étant désormais en conflit avec les rebelles syriens, la fourniture d’armes supplémentaires à ces derniers risque de passer pour partie dans les combats aux mains de l’EIIL. Le gouvernement syrien et la Russie ne peuvent exclure que les bombardements sur la Syrie ne viennent pas également frapper les troupes de Bachar al Assad dont on a refusé l’aide contre l’EIIL. 

La Syrie a annoncé qu’elle considérerait toute attaque aérienne de la coalition comme une violation de son territoire et un acte de guerre contre lequel elle riposterait. Désormais mieux dotée de moyens anti-aériens, on peut entrevoir le risque de destruction d’un avion de la coalition, acte que les occidentaux s’empresseront de stigmatiser pour justifier une attaque plus directe de l’armée syrienne, voire l’élimination de Bachar al Assad qui n’a pu aboutir jusque-là. François Hollande s’est d’ailleurs dit prêt à une attaque de ce genre comme il avait déjà poussé Obama à le faire sans succès. 

Deux autres partenaires importants dans ce conflit géopolitique viennent troubler le jeu occidental. C’est d’abord la Turquie qui ne peut voir d’un bon œil la fourniture d’armes aux kurdes irakiens qui auront vite fait d’en faire passer aux kurdes turcs. Or ces derniers sont en rébellion avec le gouvernement turc dans une région qui n’est toujours pas pacifiée. C’est ensuite l’Iran qui soutient le gouvernement irakien pro-chiite. Rien n’est décidé par ce dernier sans l’approbation de Téhéran. Sa chaise vide à Paris pour la réunion de coalition en dit long sur son accord sur pour une intervention militaire débordant sur la Syrie alors qu’il soutient le gouvernement syrien comme la Russie. Ce partenaire est incontournable mais peut du jour au lendemain changer de camp au moment où il renforce sa liaison avec Moscou. Enfin cette intervention militaire sur l’EIIL s’insinue dans une rivalité Qatar-Arabie Saoudite où la France qui a noué des liens privilégiés avec le Qatar peut difficilement jouer un rôle de médiateur. 

Trop d’intérêts divergents se font ou se feront jour dans cette nouvelle guerre. Tout est réuni pour un nouvel affrontement des deux camps que les occidentaux ont voulu créer en allant étendre les ailes de l’Europe et les bases de l’OTAN aux frontières russes contrairement aux accords passé lors de la séparation de la Crimée et de l’URSS. De plus l’indépendance de celle-ci est toujours contestée malgré les résultats sans ambigüité du référendum et le déroulement sans heurts ni victimes de ce rattachement à la Russie, rattachement conforme à l’histoire de cette région. Son inclusion dans l’Ukraine s’était faite sans l’accord de cette population, son indépendance, voulue par le peuple, lui est aujourd’hui contestée… Où est le respect des peuples à disposer d’eux-mêmes ? 

De ce rapide survol d’une situation de guerre pouvant aller de l’Europe au Moyen-Orient on peut raisonnablement en déduire que les risques de conflits vont au moins s’étendre sur une longue période avant de se calmer mais qu’il devient tout-à-fait possible que cette poudrière explose en un conflit d’une ampleur beaucoup plus grave. Or ce conflit n’est pas exclu, le terme est faible, par le complexe militaro-industriel et financier des États-Unis. Ils jouent la dernière carte de leur hégémonie avant que l’histoire tourne une nouvelle page où celle-ci lui sera contestée. Le temps presse pour affaiblir la Russie, la repousser hors de l’Europe qui gagnerait en autonomie et pour empêcher la constitution du trio Russie-Iran-Chine dont la force économique et militaire s’appuiera sur les plus grandes richesses pétrolières et gazières du monde. 

Sauf évènement imprévisible, cette bataille sera finalement perdue mais elle fera encore beaucoup de morts et peut même nous amener à une troisième guerre mondiale. La France joue un jeu dangereux en suivant, que le Président Hollande en convienne ou non, les États-Unis. Nous serons du côté des perdants et nous aurons ligué contre nous des forces musulmanes dont notre disparition reste l’objectif malgré leurs rivalités. C’est ainsi qu’un peuple sort de l’histoire par des mauvais choix historiques et l’illusion qu’il peut surfer encore sur son passé pour ne pas préparer l’avenir dans le présent. Nos chefs doivent désormais faire parler les armes pour se donner encore l’illusion de compter dans l’histoire du monde… Triste constat de leur faiblesse. 

Tant que nous n’aurons pas le souci de notre propre destin 

Nous perdrons notre âme dans celui des autres 

Qui ne nous veulent pas que du bien ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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