jeudi 30 avril 2015

Au club des illusionnistes : Croissance et Plein emploi !



Nos politiques sont passés maîtres dans l’art de l’illusion des jours meilleurs pour demain… ou pour après-demain… ou pour après-après-demain. Ils sollicitent notre vote, seul barrage à leurs ambitions, dans un nuage de promesses dont aucune n’est accompagnée d’un discours sur les difficultés de leur mise en œuvre. Le premier principe est de ne pas donner de date précise pour la réalisation de l’objectif. C’est ainsi que François Hollande a oublié celui-ci en promettant l’inversion de la courbe du chômage pour 2013. Erreur fatale, car le peuple a bien retenu ce message simple et clair pour une fois donc imprimable dans les mémoires au contraire de ces vagues promesses du style « La finance est mon ennemie » ou « Ma priorité ce sera les jeunes ». Dans le premier cas on peut continuer à le dire quand on verse quarante milliards au Medef puisque chacun sait que les grandes sociétés ne spéculent jamais, juré enfin… pas sur la Bible. Dans le deuxième cas de la jeunesse, la priorité évoquée, ne définissant ni le but précis du travail pour tous ni sa date de réalisation, reste une priorité qui va se loger dans la liste des nouvelles priorités, la croissance, la sécurité, etc., qui naissent au fil des besoins du discours médiatisé d’enfumage.

Si la sécurité des français permet de surfer sur les attentats du 11 janvier pour remettre une couche sur la nécessité de l’Etat dans cette tâche régalienne, elle permet aussi de restreindre la liberté des citoyens en augmentant le pouvoir de l’Etat. Elle permet également de justifier une augmentation du Budget de la Défense, qui aurait de toute façon dû être faite, tant la France dépense dans des opérations extérieures au nom de l’UE, UE qui ne lui a rien demandé d‘ailleurs. Cet argument va être repris pour justifier une augmentation de notre déficit envers Bruxelles auquel on va demander de nous juger hors dépenses militaires supplémentaires. Enfin c’est ce que l’on raconte aux citoyens, les européens ne pouvant être dupes. 

La sécurité est un thème largement médiatisé et exagérément grossi à des fins politiques. Mais in fine, ce qui va préoccuper le plus les français c’est leur pouvoir d’achat et l’emploi. Les deux sont liés et en particulier pour ceux qui sortent du cadre des aides d’Etat. Le gouvernement a avoué enfin que les aides publiques à l’emploi étaient un cautère sur une jambe de bois et une dépense finalement aussi mal placée que le soutien apporté aux entreprises qui font faillite et non à celles qui réussissent. Dans le premier cas la solidarité nationale doit opérer pour atténuer l’impact des licenciements. L’Etat prône donc la croissance, croissance dans laquelle elle ne peut jouer qu’un rôle de « facilitateur ».  Mais ce gouvernement continue à faire croire que le retour de la croissance au-dessus du 1,5%, que l’on vient d’ailleurs de passer à 2%, va générer un recul du chômage

On est là devant une double imposture. D’une part la croissance, dite « naturelle », ne reviendra pas au-dessus de ce que l’évolution technologique peut engendrer. Or la prochaine évolution technologique qui va avoir un impact sur l’emploi ne va pas dans les sens de l’augmentation de l’emploi, bien au contraire, c’est celle de l’arrivée des robots. Les capacités de ces derniers à remplir des tâches humaines ne cessent de progresser à une grande vitesse. Si la fabrication des nano semi-conducteurs va augmenter, la robotisation de leur fabrication croîtra également et n’entraînera pas d’augmentation de personnel. Seuls ceux de la recherche seront maintenus voire augmentés. On voit bien que dans les tâches de secrétariat, de caissières et de super et hypermarchés, de manutentionnaires voire même dans l’aide aux personnes âgées, l’automatisation poussée jusqu’à la robotisation, s’empareront des tâches humaines donc des emplois. 

L’illusion de la croissance générant de l’emploi est donc illusoire pour ces deux raisons, croissance naturelle faible et aube de la robotisation. La croissance américaine n’a été soutenue que par celle venant de l’afflux de liquidités et de taux d’emprunt bas. Elle s’essouffle d’ailleurs dès cette année après l’arrêt de ces injections d’argent fiduciaire fictif au rythme effréné des dernières années. La récente petite embellie en Europe est due aux mêmes raisons. L’accroissement corrélatif de la dette va signer la fin de cette phase d’euphorie provoquée. Elle va sans doute se terminer dans un nouveau krach de plus grande ampleur vu la dégradation de la situation financière des Etats et de la dette mondiale depuis 2008.

Ce qui serait beaucoup plus important pour notre gouvernement, actuel ou à venir, ce serait d’une part de faire en sorte que nous fassions nettement mieux que la moyenne des pays européens, ce qui n’est pas le cas, et d’autre part d’envisager notre pays dans un contexte de croissance faible et d’augmentation du chômage. Le côté positif de la robotisation est d’une part d’abaisser les coûts de fabrication donc d’augmenter notre pouvoir d’achat et d’autre part de réaliser le rêve du citoyen de plus en plus dispensé de travailler. Cela pause d’énormes problèmes sociologiques et philosophiques. On n’aborde pas cette évolution sans prendre en compte ses effets sur le comportement individuel et grégaire de nos concitoyens. Le pire est de continuer à les maintenir dans une perspective inchangée où l’augmentation du chômage est considérée comme une catastrophe et la croissance comme le dieu tout puissant qu’il faut adorer. 

Il est bon de faire comprendre que la croissance d’un pays se fait aux dépens des autres dès que ce pays dépasse la croissance naturelle générée par l’innovation et la productivité. Pour faire partie des pays prédateurs de la croissance comme l’Allemagne et la Chine, aux balances commerciales très excédentaires, il faut aller plus vite que les autres soit dans la diminution des coûts soit dans l’innovation et la recherche. A terme il ne fait aucun doute que les prédateurs rentreront dans le rang, comme est en train de le faire la Chine. C’est donc bien dans un monde à croissance faible et de plus en plus robotisé que vivra notre pays et dans tous ceux qui sortiront du quart-monde. Ce monde ne créera plus d’emplois au-delà des sorties pour cause de retraite, et cela au mieux. Certains chercheurs parlent d’un taux de chômage à 8%  incompressible au moins. Le Plein Emploi, estimé à moins de 4% de demandeurs d’emploi suite aux délais nécessaires aux changements, est un leurre auquel il faudrait que les dirigeants renoncent même si certains pays peuvent y parvenir provisoirement aux dépens des autres.

C’est un véritable changement de société qui s’annonce et, comme il faut préparer sa retraite, il faudrait réfléchir à adapter notre société aux nombreux problèmes du vivre ensemble qui seront posés. L’abandon du travail devra se faire à un rythme calculé correspondant à sa reprise par la robotisation. Les métiers vont évoluer vers des tâches de plus en plus qualifiées. Se posera donc le problème de la répartition du travail en fonction des capacités de chacun, ainsi qu’en fonction du temps et de l’espace. Il serait temps que l’on ouvre les yeux sur le futur qui peut être meilleur ou pire qu’aujourd’hui selon que la sagesse des hommes saura l’anticiper ou le subir. Ceux qui prêchent encore pour de vieilles lunes sont des irresponsables et ils sont nombreux. C’est du plein emploi d’une sagesse croissante que naîtra un homme plus heureux mais ceci est aussi peut-être une illusion. 

La nature et son environnement, ont façonné l’homme de jadis.

Il a multiplié les efforts pour survivre dans une nature hostile. 

Mais l’homme lui-même interagit sur son existence.

Le progrès ne lui est bénéfique que s’il sait 

S’y adapter sinon il peut en mourir !

 Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

mercredi 29 avril 2015

Incompétence économique cachée dans des réformes sociétales



Les chiffres du chômage de mars 2015 viennent d’être publiés et ne suscitent plus de surprise même si le gouvernement se réjouit qu’ils soient meilleurs que prévu ! Personne ne croit plus à une véritable décroissance du nombre de demandeurs d’emploi dans notre pays. Les conditions économiques et monétaires extérieures amènent un peu d’amélioration dans la trésorerie des entreprises mais le contexte économique mondial ne manifeste pas d’envolée propre à faire progresser la demande. Par ailleurs le gouvernement ne fait aucune réforme permettant de diminuer efficacement la dépense publique qui reste l’une des plus élevées de l’OCDE à hauteur de 56 à 57% du PIB en 2014 et plus de 10% plus élevée que l’Allemagne. Mais 10% du PIB c’est plus de 200 Mds€ !

Il ne faut pas s’étonner que, malgré une fiscalité forte, nous nous traînions depuis 1975 dans un déficit chronique et que, sans avoir eu le handicap d’une réunification, nous soyons encore autour des 4%/PIB de déficit public alors que l’Allemagne a retrouvé en 2014 le chemin de l’excédent budgétaire. Le Royaume-Uni, qui a fait pire que nous en 2014, a par contre retrouvé le chemin de la croissance et ses prévisions pour 2015 sont meilleures que les nôtres. Il ne faut pas toujours chercher la cause dans notre manque de compétitivité d’ailleurs très entachée d’une part par la lourdeur du code du travail et d’autre part par la pression fiscale sur les particuliers, qui joue sur la demande, et celle sur les entreprises, qui joue sur les coûts. Cette pression est près de 8% globalement plus élevée en France qu’en Allemagne selon l’OCDE. 

Mais il faut aussi repenser le coût de notre Sécurité Sociale qui est de loin le plus élevé en pourcentage de PIB parmi tous les pays de l’OCDE. Pouvons-nous maintenir ce niveau de services à moindre coût ? Sinon pouvons-nous continuer à caracoler en tête des dépenses sociales et creuser chaque année un peu plus notre déficit public ? Peut-on continuer des soins gratuits pour les sans-papiers, sachant que la gratuité incite à en profiter au maximum. N’y-a-il pas des économies à faire dans la gestion des hôpitaux alors que l’on focalise sur le remboursement des consultations ?

Malheureusement pour nous, le résultat de notre incompétence saute aux yeux en 2014 et rien ne permet de prévoir que nous saurons mieux faire en 2015. Le décalage par rapport à nos voisins va s’accentuer même si l’Italie apparaît encore plus mal partie que nous. En 2014 nous sommes en queue de peloton en ce qui concerne la croissance, et notre chômage continue à croître. Les réformes du Royaume-Uni, de l’Irlande et de l’Espagne commencent à produire leur effet et il devient évident que nous ne soutenons plus la comparaison. Le gouvernement nous cache donc la dure vérité. Avec 0,4% de croissance, nous faisons moins bien que le zone euro à 0,9% et encore moins bien que l’UE à 1,2% ! Remarquons au passage que les pays hors zone euro se portent mieux que les autres comme le Danemark, l’Islande, la Suède, la Norvège et le Royaume-Uni. Par ailleurs l’UE des 28 pays avec son 1,2% de croissance est loin des 2,4% des Etats-Unis. Ces derniers constats devraient faire taire ceux qui prônent le catastrophisme d’une sortie de l’Europe ou la réussite d’une Union Européenne que l’on veut encore plus fédéraliste. 

Nos gouvernements ont étouffé notre France industrieuse et novatrice sous une législation du travail, une charge administrative et fiscale paralysantes. Les études de l’IRDEME (Institut de Recherche sur la DEMographie des Entreprises) montrent en effet que nous possédons deux fois moins de jeunes entreprises à forte croissance que le Royaume-Uni (1.500 contre 3.000) et qu’elles créent quatre fois moins d’emplois (50.000 contre 200.000). Par-dessus le marché nous soutenons l’endettement continu d’une Sécurité Sociale largement ouverte aux déshérités du monde et d’un Etat mauvais gestionnaire de nos hôpitaux. Nous continuons à avoir une dépense publique largement au-dessus de la moyenne européenne et une fiscalité forte.

Pour corser le tout, alors que notre pays se désindustrialisait, nous avons adopté une monnaie unique avec une entrée de parité franc/euro désadaptée par rapport à notre force économique. Depuis notre handicap de compétitivité relative par rapport aux pays de la zone euro nous fait passer lentement mais sûrement d’une position moyenne à une position en recul par rapport à celle-ci. Le tout se fait dans une Europe qui prend elle-même du retard par rapport au reste du monde, et qui inquiète le Fonds Monétaire International. Après ça, tout va bien Madame la Marquise ! La Grèce c’est pire… encore que nous aimerions avoir eu 0,8% de croissance en 2014. La zone euro s’en occupe… pour la faire plonger de nouveau et affamer son peuple. 

Il n’est pas de plus fat que celui qui montre son ventre

Pour en vanter l’excellent embonpoint 

En cachant celui des autres

Dans la ploutocratie… 

Des cupides ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

mardi 28 avril 2015

La croissance repart et le chômage va baisser ! Vous y croyez ?



C’est reparti avec l’aide des médias pour redonner le moral aux français. Les chiffres des demandeurs d’emploi de mars 2015 sont mauvais mais c’est normal. On nous explique pourquoi et on ajoute que la fin du tunnel c’est pour fin 2015 ou 2016 au plus tard. Les frémissements de la croissance sont là. La consommation repart et l’optimisme des français s’améliore. On ne peut mieux entonner les trompettes annonçant une fin radieuse de quinquennat… pour préparer la suite ! Alors pourquoi le chômage ne repart pas quand la croissance repart soi-disant. C’est très simple. Les entreprises étaient en surproduction et ont stocké. Maintenant elles déstockent. Puis elles vont investir et après elles embaucheront. C’est une affaire de six à neuf mois et la vie sera belle. J’avais promis cela pour 2013 mais je vous le servirai pour ma réélection en 2017 vient de nous dire François Hollande. Fermez le ban… sauf si vous êtes demandeur d’emploi.

La microéconomie nationale se perd malheureusement dans la macroéconomie mondiale. Elle est sensible aux paramètres exogènes, aux taux de change, aux prix des matières premières et énergétiques et aux taux d’emprunt. Sa croissance ne joue que sur la consommation intérieure et sur le bilan de notre commerce extérieur. Ce dernier reste largement déficitaire à hauteur de plus de 50 milliards alors que celui de l’Allemagne ne cesse de progresser au-delà des 200 milliards. Notre déficit ne s’améliore d’ailleurs un peu que par une diminution des importations (effet du change euro/dollar) plus importantes que celle des exportations. Ceci matérialise que notre avancée possible est dans une monnaie qui remet en adéquation les économies de la France et de l’Allemagne avec leurs potentialités. Nous ne jouons donc pas pour l‘instant à jeu égal. Le prix du pétrole amène une économie sur le transport pour un nombre important de ménages et permet de donner un petit plus sur la croissance, un plus que va rogner la croissance des impôts locaux. La baisse de l’euro par rapport au dollar va permettre aux entreprises d’augmenter leurs marges qui étaient au plus bas et bloquaient tout investissement par autofinancement. Voilà deux points positifs que créent les facteurs exogènes, baisse de l’euro et du prix du baril de pétrole. Les taux d’emprunt au plus bas ont un impact positif sur le déficit public mais n’ont d’intérêt pour les entreprises que si elles voient des marchés s’ouvrir les incitant à investir. 

C’est là que le bât blesse. Pour que les entreprises investissent, il faut que la demande soit là. Le fait que les marges s’améliorent ne pousse pas à l’investissement, c’est la demande qui le fait. Or le contexte mondial est engagé dans une faible croissance et dans un ralentissement de celle-ci. C’est le cas de la Chine, du Japon, des pays émergents, et les Etats-Unis marquent le pas avec d’ailleurs un affaissement des investissements. Le déversement de liquidités, cet argent fiduciaire communément nommé monnaie de singe, ne fait que soutenir une faible croissance mais maintient les marchés boursiers en état d’ébriété par la spéculation. La véritable croissance économique, celle liée à la demande, n’est pas pour demain. On voit d’ailleurs que l’Europe, qui représente la moitié de nos exportations, n’échappe pas à ce déficit de croissance et est même en retard par rapport au reste du monde.

Nous ne sortons donc pas du miroir aux alouettes avec un risque élevé d’un nouveau krach boursier et financier où le château de cartes des banques risque de d’effondrer par effet systémique. Des experts, des financiers, des économistes et des banquiers se font de plus en plus nombreux pour parler d’une catastrophe en gestation inéluctable. La déconnexion entre l’économie mondiale et les marchés devient de plus en plus marquée et ne peut se faire indéfiniment en creusant la dette. Au lieu d’accepter de purger le système de toutes les obligations pourries entre autres à l’occasion de la crise de 2008, les banques centrales ont décidé de déverser les liquidités nécessaires au maintien des banques privées et aux marchés boursiers. L’effet sur l’économie n’a été qu’un effet collatéral arrivant tout juste à maintenir une faible activité économique que ce soit aux Etats-Unis, au Japon ou récemment en Europe. Les banques centrales persistent et signent aggravant l’endettement des Etats en particulier celui des Etats-Unis et du Japon. 

On ne joue pas avec le feu impunément et il arrive un moment où l’on se brûle. L'activité économique mondiale ralentit et n’est pas prête à repartir car il n’y a pas de révolution technologique capable de la soutenir. Elle ne peut globalement qu'être stagante et pour longtemps. La petite embellie de l’économie française, si tant est qu’elle soit réelle, n’est due qu’à des paramètres exogènes temporaires donc aléatoires et non maîtrisables par le gouvernement. Elle est d'ailleurs en retard par rapport à ses voisins. Que sera demain leur évolution ? Nul ne le sait. Le prix du pétrole est très lié à la guerre économique et aux zones de conflit au Moyen-Orient. Les taux d’emprunt français sont liés à la confiance dans le tandem franco-allemand mais aussi à la force de l’euro, or ceci peut brusquement changer avec des évènements économico-politiques comme ceux de la Grèce. La baisse de l’euro n’affecte que les marchés en zone dollar, or de plus en plus de pays essaient de sortir de l’emprise du dollar derrière la Chine et la Russie. Les zones de commerce où le taux de change est favorable ne peuvent que se rétrécir et ses marchés extérieurs sont surtout le champ d’action des très grosses entreprises dont le siège n’est souvent pas en France. Mais demain, on rase gratis. 

Une hirondelle ne fait malheureusement pas le printemps 

Surtout quand la saison s’avère fraîche et orageuse

Et que notre avion entre dans les turbulences ! 

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon