mardi 14 avril 2015

Réforme structurelle ou batailles de territoires, gabegie et perte d’efficacité ?


Avec la nomination des nouvelles capitales de région on entre dans le dur de la réforme territoriale, réforme bricolée au sommet de l’Etat un soir à la bougie avec carte, gomme et crayon, puis raturée 4 fois avant son adoption définitive le 17 décembre 2014. Au 1er janvier 2016, la France comptera 13 régions contre 22 actuellement. Il n'y aura donc plus que 13 capitales dont les noms, encore provisoires, ont déjà filtré. L’opportunité de ce nouveau découpage ne saute pas aux yeux. La raison de copie des Lander allemands ne tient pas car ce découpage est issu de leur histoire et n’a respecté ni le poids économique, ni humanitaire pas plus que l’égalité des superficies dans ce pays qui n’a rien à nous apprendre sur ce sujet. Si c’est pour faire plaisir à l’Allemagne en montrant une preuve visible de notre volonté de réforme, c’est un mauvais choix. L’allemand est efficace et la réforme doit au moins générer des économies. Celles annoncées par le gouvernement n’ont aucune chance d’être réalisées si ce n’est par un tripatouillage des comptes de la nation. 

Le regroupement des régions sur une carte ne désigne pas la nouvelle capitale de région. Là on touche à l’humain et à la guerre économique que se livrent les grandes agglomérations. Lyon s’oppose à Grenoble, Caen à Rouen, Montpellier à Toulouse, Lille à Amiens. Ceci est vieux comme la France. Lyon s’oppose aussi toujours à Saint-Etienne et Metz à Nancy. Mais il faut surtout tenir compte du poids politique des grands leaders de région, Aubry pour Lille, Jupé pour Bordeaux, Estrosi pour Nice, Fabius pour Rouen, etc., donc en fait les maires de grandes métropoles. D’ailleurs la France connaît peu ses Présidents de Conseils Régionaux s’ils ne sont pas des leaders politiques nationaux connus. La bataille de désignation des capitales risque d’être rude jusqu’en juillet, date de la décision. Peu importe la superficie, la taille humaine ou économique de rassemblement en fait de communes, ce qui compte c’est l’attractivité des grandes métropoles. Ceci est valable en Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni. 

Il n’est pas de région qui puisse avoir un poids sans qu’il ait une capitale rayonnante et son poids est incarné par le maire de celle-ci. Ce n’est pas la gomme, le crayon et les coups de téléphone aux uns et aux autres qui font un bon découpage d’une carte de France, c’est la prise en compte pragmatique des grandes métropoles comme les représentantes naturelles de communes réparties sur des superficies plus ou moins grandes, plus ou moins économiquement fortes ou plus ou moins peuplées. C’est ce manque de prise en compte de la réalité qui compromet gravement l’intérêt d’une telle réforme, coûteuse et dérangeante dans sa mise en place, dont on ne peut rien attendre sur le plan de l’efficacité, efficacité rapidement endommagée par des antagonismes de métropoles comme en Normandie ou en Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon. 

Le cas de Montpellier et de Toulouse est particulièrement significatif car il s’agit de deux grandes villes universitaires où l’université est très liée à sa région d’origine. Les querelles sur les aides, les investissements dans chacune d’elles sont à prévoir. Les énergies vont se dépenser dans des querelles de clocher toutes nuisibles à la rapidité et à l’efficacité des décisions prises qui seront des compromis politiques et bâtards n’ayant rien à voir avec une saine gestion. Si l’on prend l'exemple de Châlons-en-Champagne, Metz et Strasbourg, on risque d'avoir la préfecture de région et le conseil régional à Strasbourg, le conseil économique, social et environnemental régional à Metz. Et puis on peut prendre l'engagement de dire qu'on réunit plusieurs fois par an la commission permanente à Châlons-en-Champagne. On ne ferait que reconduire le fonctionnement « trilocalisé » de l’UE entre Bruxelles, Luxembourg et Strasbourg. 

Réformer est nécessaire pour s’adapter aux évolutions économiques, humaines voire technologiques mais réformer dans une idéologie réformatrice peut avoir un sens politique mais n’améliore en rien le fonctionnement d’une nation et peut créer des problèmes nouveaux. Le regroupement des régions va peut-être repousser dans le temps l’idée de supprimer les conseils départementaux, c’est sans doute le premier bénéfice que cette réforme peut apporter au citoyen. Par contre le gain économique réel et exhaustif est un pur mensonge de communication. Le personnel ne sera pas réduit, les locaux actuels continueront à exister à charge des régions ou des communes, leur entretien sera toujours à payer. Il est même probable que les nouvelles régions demanderont des moyens supplémentaires en locaux, en réseaux informatiques, etc. Les anciennes avaient déjà fait beaucoup de dépenses somptuaires de « standing » et de communication, cela ne peut que croître et embellir. Le contribuable sera toujours sollicité pour accompagner une nouvelle gabegie comme il l’est pour compenser les subventions d’Etat en diminution pour les communes. On n’a pas fini de voir grimper les impôts locaux. 

Cette réforme territoriale s’avère comme un dispendieux moyen de communication, 

Celui qui permet de faire croire que l’on fait des réformes indispensables 

Sur l’efficacité et la diminution du coût de l’administration publique, 

Pour faire oublier toutes les réformes que l’on n’ose pas faire. 

Le véritable coût se traduira dans les taxes locales 

Mais ça l’Etat n’en est pas comptable ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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