jeudi 8 février 2018

Repenser la production d’énergie électrique (Suite et fin)



L’article précédent nous a apporté plusieurs constats auxquels nous ne pouvons échapper dans la recherche d’une vision d’avenir pour la production d’énergie électrique

  1. La nécessité de disposer d’énergie pilotables pour pouvoir exploiter des énergies intermittentes, les EnRia.
  2.  Le constat expérimental que la production d’1kWh d’EnRia exige en moyenne sur l’année 1kWh d’énergie pilotable, thermique ou nucléaire
  3. La moindre adaptabilité du nucléaire à des variations rapides de son niveau de production et sa grande difficulté et le coût d’arrêt total inopiné, valable seulement en cas d’accident.
  4. La bonne adaptabilité de l’énergie thermique à des variations rapides de production, y compris des arrêts et redémarrages
  5. Le constat que sur les années précédentes, compte-tenu des productions de type hydraulique, biomasse et déchets, il restait 81% de la production à couvrir par les EnRia, l’énergie thermique et l’énergie nucléaire. Plus exactement on dispose par ces énergies de 63,6 TWh.
  6. On peut ajouter une information supplémentaire : la croissance moyenne de la consommation électrique est de 0,6%/an de 2014 à 2017 et a atteint 484,2 TWH en 2017
  7. On doit signaler que la production des EnRia a progressé de 24%/an de 2014 à 2017 et a atteint 39,4 TWh en 2017.
  8. On note de plus que la production nucléaire de 2016 et 2017 est respectivement de 384,0 TWh et 383,9 TWh avec un passage à 416,8 en 2015. La baisse est due aux opérations de carénage en cours.

Muni de ces informations on peut essayer de prévoir les scénarios possibles de 2018 à 2021 compris. On va d’abord postuler que la production des énergies renouvelables continue à se développer au même rythme de 24%/an pendant 5 ans pour atteindre 115,5 TWh en 2021. On va également postuler que, malgré les économies d’énergie mais grâce à la croissance retrouvée (?), la consommation continue à croître de 0,6%/an pendant 5 ans pour atteindre 498,9 TWh en 2021. On va faire l’hypothèse que l’on garde le même pourcentage de croissance de la production que celle de la consommation pour garder la même marge afin de faire face aux variations entre production et consommation. Ceci porte la production de 535,7 TWh en 2017 à 552 TWh en 2021. Compte-tenu des productions hydraulique et biomasse, il reste 488,4 TWh à couvrir avec les autres énergies. La production de 115,5 TWh d’EnRia demande une production thermique équivalente. Ceci nous fait une production de 231 TWh laissant à l’énergie nucléaire une production de 257,4 TWh. Le nucléaire est réduit à 61,8% de sa production de 2015 et 67% de sa production de 2017. Cette nouvelle répartition est représentée sur le graphique ci-contre. 

A-t-on réellement atteint nos objectifs ? La réponse est NON. On a atteint l’objectif de réduction du nucléaire à 47% de la production totale soit en-deçà de l’objectif des 50%. Les écologistes s’en réjouiront. Mais on a complètement raté l’objectif fixé par Hulot d’arrêt des centrales à charbon ou plus exactement de toutes les centrales produisant du carbone. La production thermique est passée de 48,6 TWh en 2017 à 115,5 TWh soit une augmentation de 238%. Même si l’on arrête les centrales au charbon, la production de carbone sera en gros doublée ! Mais l’impact sera grand sur le coût du kWh qui doit augmenter d’une vingtaine de % auquel s’ajoute 1,5 Milliards/an pendant 5 ans pour l’extension du réseau électrique demandé pour acheminer l’électricité des EnRia. Cette stratégie ne satisfait personne ni l’abonné qui voit augmenter le coût de son électricité, ni l’Etat qui va devoir mettre en service probablement de nouvelles centrales thermiques au gaz ou au fioul, ni évidemment la doxa écologique de la réduction des émissions de CO2. 

De toute évidence il faut geler l’évolution des énergies renouvelables dès 2019. Elles seraient bloquées à une production annuelle de 39,4 TWh * 1,24 soit 48,9 TWh. La production thermique de 48,6 TWh de 2017 peut facilement passer à 48,9 TWh pour assurer l’intermittence aléatoire des EnRia. Avec cet apport de 97,8 TWh (2*48,9), et les 63,6 TWh de l’hydraulique et de la biomasse, la part du nucléaire serait de 390,6 TWh (552 - 63,6 - 97,8). Cette production nucléaire est légèrement supérieure à celle de 2017 avec 383,7 TWh mais très inférieure à la production maximale de 2015 à 416,8 TWh. Ce plan énergétique pour 2021 est parfaitement réalisable avec une augmentation de seulement 24% des rejets de carbone à condition de maintenir le parc de centrales à charbon et nucléaire. Evidemment aucun des objectifs n’est atteint, ni l’augmentation prévue des EnRia, ni l’arrêt des centrales à charbon (sauf remplacement par des centrales à gaz (1,7 fois moins polluantes que le charbon et 2 fois moins que le lignite utilisé en Allemagne). Mais le replacement des centrales à charbon par des centrales à gaz permettrait de diminuer non seulement l’impact des rejets de CO2 mais aussi de tous les autres polluants qui sont eux néfastes à la santé. 

Il faut bien comprendre que l’énergie thermique reste aussi indispensable que les EnRia. Du coup l’énergie nucléaire le devient aussi. On peut donc parier que, comme Hulot commence à le découvrir, on ne pourra plus aller très loin dans la mise en œuvre des EnRia sauf d’accepter l’augmentation de l’énergie thermique et ses polluants. Tous les efforts doivent donc se concentrer sur l’investissement pour assurer la prolongation de la vie des centrales nucléaires existantes et la décarbonisation des centrales thermiques. Sur ce point la technique de décarbonisation avant combustion dans les centrales à charbon existe et a l’avantage de produire de l’hydrogène. On fait donc d’une pierre deux coups. Ce qui peut être très intéressant pour les batteries à hydrogène qui équipent déjà certains véhicules électriques. Son intérêt est de ne pas demander un couplage au réseau électrique national qui exige une infrastructure de raccordement sur tout le réseau routier.

Car je n’ai pas parlé de l’arrivée des véhicules électriques mais on sait que l’électrification totale du parc français de véhicules demandera la production de 20 réacteurs nucléaires de 1000 MW. Vouloir générer cette énergie avec de grosses éoliennes de 3 MW en demande 29 000 (20*1000/3/0,23) de plus. Lorsque l’on voit ce que représente une ferme de centaines d’éoliennes en Allemagne de l’Est on prend peur. Ceci d’autant plus qu’on ne couperait pas à développer l’énergie thermique polluante pour elles avec 130 TWh de plus soit 2,7 fois plus de pollution qu’aujourd’hui sans parler des surcoûts énormes par rapport à l’énergie nucléaire. Il faut crier haut et fort à la gabegie qui se profile dans un domaine où les coûts se chiffrent par dizaines de milliards. En matière de coût électrique la France a pris un net avantage sur l’Allemagne, qui compense un peu le décalage du handicap de la monnaie. Elle commence à le perdre par idéologie et écoute des puissances de l’argent qui tiennent le marché du climat et des EnRia à implanter dans toute l’Afrique entre autres. 

Si l’on veut faire face à l’avenir de l’augmentation de la production électrique due à la voiture électrique, non seulement il ne faut pas arrêter les centrales thermiques, mais il faut développer le parc nucléaire, stopper l’évolution des EnRia dans les éoliennes, et limiter la production des panneaux solaires à l’autoconsommation !
 
Sur le problème de l’énergie électrique 

L’enfumage est tel que les politiques

Ne savent plus quoi en penser 

Et répètent la doxa apprise

Par ceux qui manipulent 

Le monde de l’argent !
 
Claude Trouvé
08/02/18

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