jeudi 12 octobre 2017

Voiture électrique : le bon choix d’avenir ? (2ème partie)



Le choix de la voiture électrique comme solution de remplacement des véhicules propulsés par des moteurs utilisant du pétrole est donc actée dans le plan gouvernemental jusqu’en 2040, date de remplacement total du parc automobile. Avant de se demander si une autre solution est possible, il convient de prendre en compte les effets de ce choix sur notre pays, son économie, sa production d’énergie et son environnement. Cet article se place du point de vue de l’intérêt général de notre pays et non dans celui de l’acquéreur d’un véhicule électrique qui peut trouver son bonheur dans un bonus écologique de 6000 €, plus une prime de conversion de 4 000 € si l’achat est associé à la mise au rebut d’un véhicule diesel immatriculé avant le 1er janvier 2006. Qui finalement paie ces bonus ? La vache à lait des contribuables. Le prix d’une voiture électrique coûtant néanmoins plus cher qu’une voiture à moteur thermique, « nos aides » iront préférentiellement vers les revenus confortables pour de pas dire aisés qui trouveront rentable, innovateur et agréable de se défaire de la vieille voiture de madame.

Ceci étant dit, nous devons d’ici 2040 faire disparaître 38 millions de véhicules actuels en supposant que dès 2018 on n’aura plus de fabrication de véhicules à moteur thermique, ce qui n’est pas encore le cas pendant quelques années. Il s’agit donc d’un minorant qui peut facilement atteindre le chiffre de 50 millions de véhicules à faire disparaître d’ici 2040. Pour simplifier les choses partons sur une disparition de 2 millions de véhicules thermiques par an. C’est la production prévue par les chinois en 2018. On est évidemment loin de ce chiffre en France puisque les immatriculations de véhicules électriques ont été de 16.000 sur les 9 premiers mois de l’année 2017. Mais pour réaliser l’objectif gouvernemental il va falloir mettre les bouchées doubles et continuer à inciter la population à s’équiper. Au passage notons que, pour 2 millions de véhicules/an, la simple prime s’élève à un total de 12 milliards auquel il faut ajouter la prime de conversion de 1 million de voitures diesel en gros, soit 4 milliards. Cela représente un total de 16 milliards à comparer à notre déficit de 83 milliards prévu en 2018. Le passage à la voiture électrique sera donc un passage coûteux pour le contribuable sans compter les frais de distribution de l’électricité pour des bornes de recharge rapide sur tout le territoire. 

Le coût des batteries est en diminution, l’offre pousse vers des modèles plus puissants. La dernière voiture Renault ZOE 40 est dotée d’une batterie de 40kWh, la Chevrolet Bolt en est à 60 kWh et la Tesla va jusqu’à 100 kWh. L’évolution normale des batteries poussera vers plus d’autonomie et des performances de vitesse accrue, ce qui signifie toujours plus de kWh nécessaires par kilomètre parcouru. Mais restons sur le cas de la ZOE 40. Sa recharge totale sur un boîtier domestique de 3,7 kW (adéquat pour une installation traditionnelle monophasée de 16 ampères), dure environ 15 heures. Elle assure une autonomie de 300 km en été et de 200 km en hiver. On a donc en moyenne 250 km d’autonomie pour 40kWh d’énergie électrique et 15 heures de recharge à domicile. Les statistiques routières nous disent que le conducteur principalement urbain parcourt 60km par jour en moyenne sur l’année, le conducteur parcourant les routes de France pour son travail va jusqu’à 100km/jour.

Prenons le cas du conducteur qui ne parcourt que 50km/jour bien que, dans un avenir proche, l’autonomie va croître et l’installation des bornes de recharge rapide sur le territoire feront sortir la voiture électrique d’un usage spécifiquement urbain. Ce conducteur est supposé être très conscient que les heures creuses de nuit sont les meilleures à utiliser pour recharger sa batterie. Il utilise donc (15*50/250) 3 heures chaque jour après 22 heures pour cette opération et consomme (41*50/250) 8 kWh. Retirer de la circulation au moins 40 millions de véhicules d’ici 2040 suppose qu’on doit atteindre le remplacement de 2 millions/an. Si l’on atteint donc en 2022, le seuil de 10 millions de véhicules électriques, la demande totale d’énergie sur les 3 heures de recharge sera de 80 GWh soit 23,3 GWh par heure. Il faut donc une puissance disponible utile de 23,3 GW pendant 3 heures pour alimenter ce parc automobile. 

Pour la production nucléaire cela demande une puissance installée de ¼ supérieure compte-tenu des arrêts de tranche pour maintenance. Il faut donc disposer d’une puissance installée de 31 GW pour satisfaire la demande de recharge. La puissance nucléaire installée est actuellement de 63,13 GW. En 2022 si le plan Hulot est mis en œuvre, les 10 réacteurs de Fessenheim, Bugey et Tricastin seront à l’arrêt soustrayant une puissance installée de 9 GW compensée en partie par la mise en service de l’EPR de Flamanville, soit une perte totale de 7,4 GW. La France disposera donc de 55,7 GW installés mais seulement de 41,8 GW de puissance nucléaire utile. On pouvait compter sur 21,8 GW immédiatement disponibles en énergie thermique (charbon-fuel-gaz), mais Nicolas Hulot veut éliminer le charbon. On dispose en plus au mieux d’environ 25,5 GW de puissance installée d’énergie hydraulique donnant 7,7 de puissance utile mais la disponibilité de cette énergie au moment de la surconsommation des heures de recharge des batteries n’est pas assurée. L’énergie solaire est nulle la nuit et celle du vent est parfaitement aléatoire. C’’est donc seulement sur l’énergie nucléaire qu’il faut pouvoir toujours compter d’une façon sûre pour prendre en compte la consommation électrique du parc automobile.

La consommation française en 2016 était de 483 TWh correspondant à une puissance utile moyenne de 55,1 GW. De 22h à 1 heure du matin, la consommation baisse d’environ 10% donc on prendra le chiffre de 50 GW comme représentant la puissance utile nécessaire pour couvrir la consommation hors recharge des batteries durant les 3 heures nécessaires. On note déjà que la puissance nucléaire utile en 2022 ne couvre pas la consommation normale durant ces heures si le vent et les centrales thermiques sont à l’arrêt, 50 GW demandés et 41,8 GW disponibles. Supposons que les centrales au fuel et au gaz en service couvrent la demande et poussons même jusqu’à admettre que leurs 21,8 GW seront encore disponibles. On dispose alors de 63,6 GW disponibles. Mais la demande totale, y compris la recharge des batteries, est alors de 73,3 GW (50+23,3). Il manque 9,7 GW qui doivent être compensés obligatoirement par du nucléaire. La puissance installée d’un réacteur type EPR est de 1,6 GW pour une puissance utile de 1,2 GW. C’est donc 4,5 réacteurs EPR, disons 5 réacteurs pour les variations de consommation saisonnières qu’il faut ajouter au parc nucléaire actuel d’ici 2022 pour un parc automobile de 10 millions de véhicules électriques. 

Autrement dit c’est mission impossible parce que ces 5 réacteurs devraient déjà être en chantier compte-tenu des délais de construction et de mise en œuvre. Dire que l’on peut aussi recharger tout au long de la période de jour pour bénéficier de la lumière solaire est tout aussi utopique. En 2016, l’énergie solaire a mis en œuvre 1 GW de puissance utile. On ne peut pas non plus compter sur un parfait lissage car on va utiliser les recharges rapides qui donneront des pointes importantes au moment de la pause de midi par exemple. Il faut compter sur le fait que la consommation est justement maximale de 8h à 14h et de 19h à 20h, périodes favorables à la pratique de la recharge des batteries. La consommation alors ne demande plus 50 GW mais 55 GW. Cette petite étude sur la période après 22h a donc pris un cas favorable à l’utilisateur et à la production d’électricité.

Le moins que l’on puisse dire dès à présent c’est que l’arrêt des centrales nucléaires et le remplacement du parc automobile sont deux objectifs incompatibles. Reprenons le problème en supposant qu’en 2022 les réacteurs ne soient pas arrêtés, que l’EPR de Flamanville soit en service, et que les centrales thermiques tournent à plein régime. On disposerait d’une puissance installée de 64,7 GW (63,1+1,6) soit 48,5 GW de puissance utile, à laquelle on ajouterait 21,8 GW d’énergie thermique pour un total de 70,3 GW pour une demande de 73,3 GW. L’apport énergétique serait encore insuffisant. On peut néanmoins en déduire que, la consommation hors recharge enlevée, il resterait 20,3 GW (70,3-50) disponibles pour la recharge des batteries au lieu des 23,3 GW nécessaires pour un parc de 10 millions de véhicules. Le chiffre de 8,7 millions serait théoriquement possible mais sans aucune marge entre production et consommation, exportations d’électricité exclues, et importations nécessaires en période hivernale, car cette étude a été basée sur une consommation moyenne ne tenant pas compte de la saisonnalité qui introduit des variations mensuelles de 80% entre minimum et maximum soit de l’ordre de 25 GWh. 

La production actuelle, qui nous fait néanmoins importer près de 2% de la consommation, a une marge de l’ordre de 10% de production en plus de la consommation. Il faut donc rajouter de l’ordre de 5 GW en moyenne à produire par rapport à la consommation dans cette étude. La disponibilité de 18,3 GW (23,3-5) ramène le parc possible à 7,9 millions véhicules électriques avec 5 réacteurs supplémentaires, sans arrêt des autres et des centrales thermiques. Il faut se rendre à l’évidence, la propulsion électrique de la totalité du parc automobile nécessitera de l’ordre de 20 réacteurs de type EPR d’ici 2040 et que la politique énergétique en cours est fondamentalement irréalisable. Elle constitue donc en soi une arnaque et une désinformation coupable. L’arrivée de l’EPR de Flamanville sans arrêt des autres réacteurs et des centrales thermiques avec 1,2GW utiles permet seulement d’envisager d’alimenter en électricité un parc de 515.000 véhicules soit 1,4% du parc automobile ou 470.000 véhicules supplémentaires par rapport à septembre 2017.  Ceci correspond à 94.000 immatriculations par an d’ici 2022 pour des voitures de type ZOE 40, ce qui paraît jouable sous ces conditions.

L’introduction des véhicules électriques pose aussi le problème de la fabrication et de la destruction des batteries. Ce sera l’objet du prochain article où la réponse possible par une solution alternative, toujours dans le but de la disparition des véhicules actuels, sera envisagée.

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Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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