mardi 21 novembre 2017

Quel avenir pour l’Europe ?



Les évènements concernant l’Union européenne ne cessent de surgir dans l’actualité. Le Brexit, la Catalogne, les élections en Europe de l’Est, et l’incertitude sur le nouveau gouvernement allemand, viennent meubler l’actualité. L’accroissement des dettes des États et les faillites des banques italiennes et espagnoles, sauvées pour un temps par des rachats de banques elles-mêmes en difficulté ne fait que retarder un évènement systémique qui peut créer une catastrophe financière pire que celle de 2008 et un appauvrissement des peuples. La réticence de l’Allemagne, toujours traumatisée par la banqueroute de 1923, à prendre en compte une partie de la dette des pays en difficulté montre que le principe de solidarité n’est qu’une chimère qui s’évapore et se transforme en accusation de mauvaise gestion pour les perdants. La démocratie est un leurre autant que la solidarité. Il suffit de constater la manière dont les programmes de renflouement de la Grèce, de l'Irlande, du Portugal, de l'Espagne et de Chypre ont été traités pendant la crise de l'euro pour comprendre que l’utilisation de tactiques anti-démocratiques lourdes est un modèle destiné à se généraliser.

L’Allemagne ne connaît que la « Realpolitik » qui se diffuse sur les autorités et institutions européennes. Le but recherché est l’enrichissement des puissances financières omniprésentes à Bruxelles, et la géopolitique est à l’œuvre pour y parvenir. Le pangermanisme permet de rassembler un maximum de pays autour de l’Allemagne laissant à la France son influence géopolitique, principalement sur la Méditerranée et l’Afrique. La France est la béquille de l’Allemagne qui lui permet de faire passer son message sur toute l’Europe, message d’austérité, d’immigration, de salaires maintenus bas et même de mode de structures administratives. C’est ce qui a amené la France à créer des super régions qui n’ont pas plus de valeur que le découpage de l’Afrique francophone à coups de crayon et de gomme. Les départements du Haut et du Bas-Rhin ne voulaient pas fusionner, ils sont désormais inclus dans un ensemble beaucoup plus grand à leur insu. Au sud on voit mal Montpellier s’effacer devant Toulouse, etc. Au passage cela devait générer 10 milliards d’économies… c’est l’effort que Macron demande aux collectivités territoriales, donc elles l’ont déjà fait. Je me trompe ? 

L’Europe est le jeu de plusieurs courants de pensée et d’actions allant du fédéralisme à la dislocation pure et simple de l’UE. Le fédéralisme est la voie finale de la gouvernance de l’UE par une technocratie aux ordres de l’oligarchie financière qui a réussi la première phase de l’intégration économique. L’intégration politique, pas forcément souhaitée par les États-Unis sous Donald Trump, est la création des Etats-Unis d’Europe. Cette option a peu de chances de se réaliser car l’histoire est très différente des deux côtés de l’Atlantique. La création des Etats-Unis est récente et née d’une véritable invasion de ce continent qui a enlevé tout droit d’exister réellement aux populations autochtones. Elle a créé une unité nationale par la Guerre de Sécession et la langue officielle anglaise s’est imposée sur tout le territoire. Sa grande superficie et l’histoire récente de ce nouvel Etat ont conduit à une forme de confédération d’entités plus petites ayant une large autonomie économique, juridique et législative. Ayant réglé les conflits intérieurs, les Etats-Unis sont en guerre à l’extérieur depuis deux cents ans.

L’Europe a une longue histoire peuplée d’incessantes luttes internes entre des ethnies, des langues, des cultures et des croyances différentes. La lutte pour la possession de territoires, les guerres de religion, la possession des mers, etc. ont sans cesse bouleversé la carte des entités territoriales constituées. Certains pays comme la Pologne n’ont résisté à des bouleversements constants de ses frontières que par une unicité de langue et de religion. La France s’est constituée laborieusement. Celle de Clovis, puis de Philippe Auguste, n’était qu’un embryon de la France actuelle. Elle a eu pour elle la volonté d’atteindre ses frontières naturelles, ce qui est le meilleur garant de la solidité d’une nation. On retrouve cette unité en Islande, au Royaume-Uni grâce à leur isolation maritime, en Suisse grâce aux fleuves et aux Alpes, et plus récemment en Italie entre autres. 

Il est très intéressant de noter que l’identité nationale forte tient soit aux frontières naturelles comme la France soit à contrario à une lutte historique pour faire perdurer une identité autour d’une langue et souvent d’une religion, comme en Pologne et en Hongrie. Ces constats montrent que le fédéralisme à la mode américaine ne pourrait s’imposer que par la force militaire. Ce risque n’est pas à exclure quand on voit l’arrivée de plus en plus importante des troupes américaines et des bases de l’OTAN sur l’Espace Économique Européen sous le fallacieux prétexte du danger russe. La Russie, pour mettre la main sur l’Europe, devrait d’abord anesthésier les Etats-Unis sur leur propre territoire. Ce n’est pour l’instant ni l’intérêt de la Russie, ni de la Chine. Le risque d'un super-État néolibéral européen dirigé par deux entités déjà en place aujourd’hui : la bureaucratie administrative (le mot « politique » aura disparu du lexique officiel) basée à Bruxelles et l'hégémonie économique (non élue, évidemment), Berlin-Paris est une hypothèse peu probable et peu souhaitable par les citoyens mais dans le tuyau des volontés et actions de Bruxelles.

Elle signerait la mort à terme des États-nations qui se voient progressivement dépossédés de leurs pouvoirs régaliens. Mais c’est justement la mise en marche de ce processus tentant de déborder hors des directives économiques qui soulève désormais des renâclements d’un certain nombre d’Etats. Il est à l’origine de la sortie de l’UE votée par le peuple britannique. Depuis longtemps l’UE entretient des relations directes avec les régions en préparation de la disparition des États-nations et elle joue un double jeu en connivence avec un certain nombre de chefs d’Etat dont les leaders français et allemands. La sécession de la Catalogne est très significative à cet égard et le refus de reconnaissance de l’UE est contradictoire avec l’acceptation précédente du Kosovo. Une partie du gouvernement Catalan a trouvé refuge à Bruxelles et on voit le peu de précipitation que la Belgique met à renvoyer ces insoumis vers l’Espagne. Celle-ci trop contente d’avoir sauvé sa peau, avec l’assentiment de l’UE, ne met pas beaucoup d’ardeur à réclamer les rebelles. Les Catalans sont allés trop vite, leur heure n’est pas encore venue mais on va les tenir au chaud pour la dernière phase de disparition des États avec leur propre consentement. Bien évidemment cette étape sera franchie avec un minimum de démocratie après un battage politique et médiatique de la même ampleur au moins que celle pour le traité de Maastricht, mais cette fois sans référendum. 

La deuxième possibilité d’évolution est la constitution d’un noyau central regroupant les principaux pays autour de l’axe franco-allemand, sous domination allemande. Le but serait de tuer définitivement le vote à la majorité absolue pour les grandes décisions dont la modification des traités. Juncker ne cesse de demander cette évolution, évolution que de nombreux pays de l’Est et probablement les pays Baltes, ne veulent pas en entendre parler. Elle donnerait un pouvoir trop accru au couple franco-allemand. Ce nouveau noyau central ne pourra que se constituer à l’intérieur de la zone euro, et créera un nouveau clivage avec des états-nations résiduels tampons situés à la périphérie de l'union transformés en « satellites », une zone de sécurité inconfortable protégeant le territoire sanctuarisé des raids barbares. Force est de constater que le citoyen européen n’existe toujours pas dans ce concept et l’idée d’une démocratie cosmopolite, démocratie qui n’en aurait que le nom, est loin d’être intégrée dans l’esprit des peuples. C’est sans doute cela qui condamne l’Europe à chercher vainement une unité-nation, dans un puzzle historique et linguistique qui en tue l’idée même. Rester ou sortir ? Posez-vous alors la question : « Pourquoi rester désormais ? »
 
L’erreur est humaine et donc pardonnable. 

Sa répétition pose la question suivante :

Est-ce volontaire ou involontaire ? 

C’est la question à se poser

Quand l’UE se délite.

Claude Trouvé 
21/11/17

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