lundi 2 décembre 2013

Liberté d’entreprendre, liberté de travailler en question



La législation sur le travail du dimanche est une merveille de bricolage digne des entreprises du même nom auxquelles elle s’applique. Lorsqu’une difficulté sociétale se présente, la France a le génie des actions législatives compliquées, ménageant la chèvre et le choux, mécontentant un maximum de gens et laissant celle-ci à résoudre par l’équipe dirigeante suivante. Le problème de la patate chaude c’est de s’en débarrasser au plus vite et non pas de chercher le moyen de la refroidir suffisamment pour la consommer.

C’est ainsi que l’État avait déjà légiféré de telle sorte que les conflits d’intérêt ne pouvaient que resurgir… et l’on va donc de nouveau légiférer pour amender la législation précédente. On y ajoute dans le discours deux compléments d’action, l’un commun à la droite et à la gauche c’est « simplification », et l’autre cher à la gauche « justice ». Les plats gouvernementaux ne se servent plus sans le sel de « plus de simplification » et le poivre de « plus de justice »… pour aiguiser l’appétit de citoyens gavés de lois insipides. 

Il ne vient évidemment à l’idée de personne soit d’interdire le travail du dimanche soit de ne rien interdire du tout, ce serait beaucoup trop simple. J’ai pourtant le souvenir d’une Angleterre avec le « Sunday it’s closed », où la famille anglaise, déjà peu encline au travail à cette époque du grand Commonwealth, savourait des dimanches paisibles sans cinéma, sans match, et pratiquement sans télé mais fort heureusement autour d’une tasse de thé et des petits gâteaux achetés la veille. Je m’y suis fort ennuyé mais la règle était simple et donc… respectée. 

Évidemment la société de consommation a donné un appétit inextinguible d’achat qui n’existait pas alors où l’on ne jetait pas une paire de chaussures avant même qu’elle soit usée mais où on la faisait réparer. Désormais on consomme de l’électronique à tout va, on fait la queue des heures pour avoir le dernier modèle que l’on jette dans les mois suivants et qui, pour 80% de ces objets, finissent dans les déchets d’une société qui dépense des fortunes pour l’écologie ! Donc aujourd’hui le besoin d’achat ne cesse pas le dimanche comme par enchantement et internet ne s’arrête pas d’engranger des commandes. 

Certains, catholiques pour la plupart d’entre eux, osent parler du jour consacré au Seigneur. Mal leur en prend car ils sont vilipendés comme de dangereux survivants d’une époque moyenâgeuse qu’il faut faire taire et s’agenouiller devant la morale laïque novatrice, source des nouveaux progrès de la société. Même si l’on est bien en peine de trouver quelque nouveauté dans les préceptes de celle-ci, pâle copie édulcorée de la morale chrétienne. On y trouve par contre la confusion des lois de la nature réinventées pour plaire à des minorités et détruire le fondement de base de notre société, la famille. Ce ciment détruit, l’aliénation de ses membres, leur dispersion, laisse le champ libre aux nouveaux manipulateurs qui n’ont rien à envier aux déviances des religions et à leurs exactions sur les esprits et les corps de nos ancêtres. 

Exit donc le problème de notre patrimoine culturel et religieux pour se recentrer sur des aspects sociaux-économiques. Les difficultés viennent des intérêts contradictoires des individus et des corporations. L’individu aisé qui sort d’une semaine harassante sera souvent dans le camp des « contre », le salarié au SMIC ou l’étudiant aux parents sans ressources sera lui souvent dans le camp des « pour ». Globalement on a 2/3 « Contre » et 1/3 « Pour ». La logique voudrait que le gouvernement suive la majorité et légifère « Contre » mais sa majorité électorale est si faible qu’il ne doit mécontenter personne, dilemme qu’il résout traditionnellement par le bricolage législatif. Il ne résoudra rien, pas plus aujourd’hui qu’hier, mais gagnera du temps, c’est tout. 

Il en est pourtant du travail du dimanche, comme de la retraite, l’État s’octroie le droit de restreindre la liberté du citoyen. Il légifère ainsi pour décider du moment de la retraite, des jours d’ouverture des commerces et entreprises, des jours de travail. En Australie on prend sa retraite quand on veut, nous non au pays de la soi-disant liberté. Pourquoi faut-il restreindre la liberté de travailler et d’entreprendre ? Pour justifier de son pouvoir. Pourtant l’État est là pour donner le cadre de la liberté de travailler en imposant justement la liberté garantie de le faire ou non. Nul ne peut imposer le travail sauf la justice aux condamnés (autrefois !). 

C’est cette tâche difficile de respect de la liberté des individus qui est la difficulté d’une législation « juste ». Le reste n’est qu’une négociation pécuniaire et de temps de repos qui ne présente aucune difficulté à trouver un terrain d’entente sur la base du volontariat. Il n’y a plus alors de bricolage, la loi s’impose à tous sans exception. Trop simple pour les élèves de l’ENA, et à éviter, il se pourrait qu’un français moyen comme moi arrive à comprendre ! Et puis si l’on résout tous ces petits problèmes de société que nous restera-t-il pour cacher les vrais problèmes qui touchent gravement notre pays et qu’on ne peut ou qu’on ne veut pas résoudre ? 

La France, qui ne sait plus décider hors la privation de liberté, 

La France, qui est nourrie des bouillies législatives, 

La France, poule mouillée, sera plumée et rôtie 

Par le Soleil Levant ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon