jeudi 24 mai 2012

Journée bruxelloise riche en utopies et clivages révélés

Cette journée bruxelloise du jeudi 24 mai 2012, journée dont les participants avaient pris la précaution de dire qu’il n’en sortirait aucune décision, a tout de même eu des résultats concrets. La première c’est la réaffirmation de la volonté de l’Europe de garder la Grèce… à condition qu’elle respecte les critères d’austérité qui lui ont été imposés.

Comme l’a affirmé le parti de gauche grec, qui a de fortes chances de gagner les élections prochaines et qui a été à l’origine de la chute du précédent gouvernement, la Grèce ne peut plus supporter ce plan d’austérité. Il affirme néanmoins vouloir rester dans l’euro. C’est un véritable dialogue de sourds… apparemment. En fait la Grèce va jouer sur la peur de l’effet domino sur l’UE et en tirer le maximum d’avantages… financiers, l’UE de son côté veut pouvoir sortir la Grèce avec le bon motif… d’indiscipline !

Le résultat ne fait plus aucun doute, la sortie de l’euro pour la Grèce est dans les têtes et tout le monde s’y prépare. La Grèce dans l’euro avec acceptation de l’austérité de l’UE est bien une utopie savamment entretenue. Une autre utopie est la taxe sur les transactions financières. L’Allemagne y souscrit avec nous. Le Royaume-Uni s’y oppose à cause de la City qui est le carrefour de la plupart de celles-ci en Europe. Dominique Strauss-Khan s’y est opposé en son temps car lourde à mettre en œuvre pour un résultat faible. Si elle porte sur les transactions quasi instantanées par les ordinateurs, transactions qui sont en nombre considérables, elle devient beaucoup trop pénalisante pour le bon fonctionnement des échanges.

Si le Royaume-Uni ne lâche pas le morceau, l’os à ronger donnera l’illusion d’un grand pas franchi et permettra au politique de crier victoire… pour un miroir aux alouettes. C’est encore une illusion de plus.

On rentre ensuite dans les clivages à géométrie variable. En effet, alors qu'ils partagent une certaine volonté de croissance, les chefs d'Etat et de gouvernement sont divisés, dès qu'il faut envisager les moyens pour y parvenir. Comme pour la taxe sur les opérations financières (TTF), les avis divergent sur les eurobonds.

 Selon le Figaro, "les Allemands sont exaspérés par l'intransigeance d'Hollande", notamment au sujet des obligations européennes. Ces titres, garantis par l'Union européenne permettraient, selon ses partisans, de mutualiser la dette et de rééquilibrer les taux d'emprunt entre les Etats membres. Pour Angela Merkel, par contre, les eurobonds ne favorisent pas la croissance.

François Hollande cherche des appuis pour affronter l’Allemagne et espère en trouver un en la personne de l’italien Mario Monti. Ceci montre la puissance allemande dans ce débat, débat dans lequel on ne perçoit aucune solution viable pour l’Europe du sud. La croissance européenne est vue comme devant être générée par un apport massif d’argent mais le principal contributeur restera l’Allemagne. C’est donc lui demander un nouvel effort… pour les autres. Notre seul argument est de faire remarquer que l’Allemagne s’enrichit principalement sur le dos des autres européens. Ceux-ci, subissant plus ou moins une baisse de leur croissance allant jusqu’à la récession comme l’Espagne, le Royaume-Uni et bientôt la France, la décroissance l’atteindra aussi.

L’idée d’une Europe coupée en deux va resurgir. L’Europe du sud se meurt avec un euro trop fort pour son économie. Si la France et l’Italie en sont convaincues, elles peuvent jouer cette carte en face de l’Allemagne qui peut y trouver un intérêt. L’Europe du Sud pourrait soit garder ses monnaies nationales ou mieux se doter d’une monnaie commune pouvant fluctuer par rapport à l’euro du nord.

En tout état de cause de grands évènements se préparent au gré ou non des états européens car la situation devient intenable. Les plans d’austérité à l’allemande sont un remède de cheval qui détruit l’organisme fragile de l’Europe du sud. La potion trop forte est indigeste. Un euro dévalué qui rejoindrait le dollar soulagerait les pays en difficulté mais il n’y a pas de volonté politique et il faut se plier à son évolution dans le degré de confiance qu’il suscite. Il n’est pas une variable de pilotage de l’économie européenne.

L’Europe des marchés, l’UE fédération,

Nie la disparité de toutes ses nations,

Tente de recoller des morceaux incollables

Et par obstination nous rend tous misérables.

Claude Trouvé