mercredi 9 mai 2012

Grèce en feu, Espagne en surchauffe, France fébrile… l’Europe cherche des sous !

Le 16 mai aura lieu la première confrontation entre François Hollande et Angela Merkel. De celle-ci dépendra la direction que prendra la zone euro face aux aides à accorder aux pays en difficulté beaucoup plus que les propositions de relance de la croissance. Il y a le feu à la zone euro et par contagion à l’UE. On ne peut valablement envisager la croissance quand les PIIGS, les Etats en difficulté, se débattent dans l’austérité pour qu’on leur laisse la tête hors de l’eau.

Pourtant Hollande a rallumé la tentation de création de la monnaie et de l’impôt pour alimenter la croissance. Il propose des eurobunds (mise en commun des dettes), la création de monnaie par la BCE et la taxe sur les opérations financières dite taxe Tobin bien que ce dernier ait demandé de retirer son nom. Tout ceci pour trouver de l’argent et faire espérer qu’ainsi on va pouvoir sauver les PIIGS et en même temps alimenter la croissance en faisant oublier qu’il faut diminuer les dépenses inutiles ou non indispensables de l’Etat. En effet on ne sait ou on ne veut pas faire ces dernières mais on craint l’austérité demandée en majeure partie au peuple qui peut déclencher à tout moment une crise de rejet comme en Grèce.

C’est pourquoi, après la taxe sur les billets d’avion de Jacques Chirac, on a ressorti l’idée d’alimenter la croissance par des investissements payés par la Taxe Tobin, taxe dont se sont emparés les altermondialistes en la dénaturant. Le but en serait de disposer de fonds dans la Banque Européenne d’Investissement pour des projets structurels européens. Quand on a besoin d’argent, on crée un impôt nouveau ou on crée de la monnaie, recettes faciles qui reviennent à pousser le problème devant soi.

Étonnante histoire que celle de cette taxe. Elle a été imaginée au début des années 1970 par le professeur James Tobin à un moment où le monde qui venait d’abandonner les changes fixes découvrait l’instabilité des taux de change et les risques de déstabilisation des pays émergents. D’où l’idée d’atténuer les mouvements de capitaux trop brutaux au travers d’une taxation visant à «jeter quelques grains de sable dans les rouages bien huilés de la finance internationale». Il est intéressant de noter que cette idée est revenue en urgence en février de cette année.

Dans un communiqué, François Baroin se félicite que huit autres pays (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, Grèce, Italie et Portugal) et la France aient adressé une lettre commune à la présidence de l'UE pour l'inviter à "accélérer les travaux du Conseil, de manière à achever une première lecture du projet de directive dès le premier semestre 2012".

Il est encore plus intéressant  de voir qu’elle continue avec Hollande alors qu’elle avait été torpillée sous le gouvernement socialiste précédent de Lionel Jospin (qui en avait imprudemment fait la promesse) avec les déclarations de Dominique Strauss-Kahn, Laurent Fabius et le rapport alors commandé par le Premier ministre au Conseil d’analyse économique. Il est intéressant de rappeler leurs principaux arguments.

- Il est d’abord impensable de prétendre contrôler le mouvement sur les devises au moyen d’une taxe. La situation du marché des changes n’est plus celle de l’époque où a été imaginée la taxe Tobin, tant par la sophistication des produits financiers que par le volume considérable des échanges.

- Une taxe Tobin à taux faible ne dissuaderait personne et serait inutile, disait Dominique Strauss-Kahn. Avec un taux vraiment dissuasif, le mouvement des capitaux serait réellement entravé et dès lors, la taxe ne rapporterait rien.

- En revanche, en voulant frapper les transactions censées déstabiliser les marchés des changes, on affecterait dangereusement les transactions positives qui accroissent l’efficacité des marchés, celles qui permettent à des exportateurs ou à des importateurs de se protéger contre les risques de change. De plus, une taxe même minime deviendrait prohibitive pour des activités utiles comme celles des « day traders » qui effectuent des milliers d’opérations d’aller-retour dans des temps très courts sur des écarts très faibles.

- Enfin, une telle taxation serait facilement détournable, soit en transférant les activités de change dans des pays hors taxe Tobin, soit en répliquant les transactions primaires par des produits dérivés.

Conclusion : comme il est impossible de contrôler l’ensemble de la finance dans le monde entier, la taxe Tobin est, selon les mots de Laurent Fabius, une idée irréaliste. Etonnant non ?

A croire qu’en politique

Qui ne se dédie point

Passe pour un imbécile !

Bon vent au couple Merkhollande !

Claude Trouvé