samedi 22 février 2014

Angela Merkel, reine de l’Europe

Que l’on soit d’accord ou pas avec la politique allemande qui appauvrit les pays du sud, il faut reconnaître à Angela Merkel un sens politique qui la propulse à la tête de l’Europe au-delà de la réussite économique de son pays. Sa réélection sans problème est amplement méritée et son sens du compromis lui permet de gérer un gouvernement de coalition, non sans difficulté, mais c’est un exercice que l’on ne sait pas faire en France en dehors de la cohabitation, ce qui n’est pas la même chose.

La prédominance de l’Allemagne sur le plan économique, sur les directives de l’UE et particulièrement sur la zone euro est incontestable. Dans le secteur bancaire la Bundesbank, à ses ordres, pèse lourdement sur la BCE et ce n’est que sur l’UE bancaire que le Royaume-Uni fait entendre une voix divergente et forte. Angela Merkel gère avec diplomatie les relations avec la France sachant jusqu’où ses exigences peuvent être acceptées. Elle lâche sur des détails mais ne cède rien sur l’essentiel. Hollande repart heureux avec des miettes qu’il se presse de médiatiser. 

L’euro est entre ses mains et n’existe encore que par sa volonté. Elle fait savoir que l’euro n’est pas intouchable et que l’Allemagne ne peut contribuer plus envers les pays en difficulté sans que celle-ci se retire de l’euro. Elle fait comprendre à la France que sa politique n’est pas bonne en déléguant un conseiller technique allemand à notre Président. C’est une façon, dite amicale et habile, de nous faire comprendre ce que nous devons faire. La distance qui s’élargit entre l’Allemagne et les pays du sud lui permet d’imposer à tous la rigueur de gestion allemande. Qui tient la bourse de l’Europe, tient le pouvoir. 

Mais c’est désormais sur le plan extérieur que l’Allemagne d’Angela Merkel vient d’être sacrée ces jours-ci reine de l’Europe. Les tragiques évènements d’Ukraine en sont le révélateur. Le Président Hollande est allé prendre les ordres d’Obama avec une réception digne d’un vassal dévoué. Il est rentré avec un coup de pouce d’aide pour la Centrafrique, la promesse d’inciter l’Allemagne à faire un geste dans ce sens, la mission d’accompagner Angela pour influer sur le cours des évènements en Ukraine et de continuer d’être le chien aboyeur en Iran. Tout cela est en cours et les États-Unis sont les instigateurs ou tout au moins les complices de cette guerre civile où l’adhésion à l’UE a servi de déclencheur. 

Tout a en effet commencé par l’éventualité de l’adhésion à l’UE qui s’est traduite par une guerre de montant d’aide entre ses propositions d’attirance et celles de maintien dans l’Union Douanière Eurasiatique (avec la Russie, le Belarus et le Kazakhstan). De toute évidence l’intérêt économique de l’Ukraine est plus dans le maintien dans une union douanière avec des flux commerciaux en pleine expansion (+40% depuis 2004) qu’une adhésion contraignante à l’UE et bouleversant son économie. Devant l’échec de cette alternative européenne, la Russie ayant fait monter les enchères, le combat réel USA-Russie s’est déplacé sur les revendications démocratiques d’un peuple encadré par l’extrême droite que les émissaires américains sont venus encourager avec l’Europe faisant chorus, France en tête… pour la démocratie ! 

C’était le deuxième acte. Nous en sommes désormais au troisième car la rue ne se faisait pas entendre. Il faut dire que depuis les élections de 2010 l’Ukraine est divisée entre trois parties. L’ouest pro-européen, le centre plutôt nationaliste, l’est pro-soviétique. Les évènements de Kiev ne sont pas le reflet d’une levée de l’ensemble du pays même si à l’ouest on se manifeste aussi et d’autant plus que l’Occident claironne son soutien. La situation insurrectionnelle avec occupation de bâtiments publics a abouti à un durcissement du pouvoir et à une répression sanglante que nous ne pouvons que regretter. Mais tout a été fait pour qu’on en arrive au troisième acte. 

C’est celui de l’arrivée de la troïka (Allemagne-France-Pologne). La France est un vassal dûment caressé pour son comportement exemplaire, la Pologne est une pièce maîtresse de la politique américaine face à la Russie. Mais c’est Angela Merkel l’envoyée d’Obama parce que l’Allemagne a des relations étroites avec la Russie et qu’elle peut discuter avec Obama avec le poids nécessaire. Si l’Allemagne faillit, le traité transatlantique et le poids des USA sur l’Europe est en danger. La situation à Kiev est entre les mains d’un autre trio, Obama - Angela – Poutine. Rien ne sera décidé à Kiev qui n’ait l’assentiment de ses trois-là. La France y est présente en service commandé… Non, pour la démocratie dont l’Union Européenne se fout royalement... chez elle ! 

Angela vient d’être intronisée officieusement reine de l’Europe. L’Allemagne met désormais son poids dans la politique étrangère. Chapeau bas madame la Chancelière… Il est temps que la France comprenne qu’elle va devoir se faire respecter et qu’il ne suffit plus d’avoir un droit de véto au Conseil de Sécurité de l’ONU. La vassalisation aux États-Unis ne doit pas devenir aussi un partenariat avec l’Allemagne qui soit celui d’une province à son État ! Il suffit de se reporter à la définition du mot vassal : 

Personne qui relève d‘une suzeraine dont il tient un fief 

Et à qui il doit hommage et services. 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon   

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