lundi 2 janvier 2012

Un discours présidentiel de fin de règne

L’heure est grave, mais pas désespérée, nous assène un président qui assure de rester aux commandes jusqu’au bout, comme le capitaine prêt à couler avec son bateau. La tempête fait rage, l’horizon est bouché, le bateau gîte de plus en plus mais le capitaine ne lance pas les barques de sauvetage à la mer. Que les passagers se rassurent, il sera toujours là avec eux au moment du naufrage… à moins qu'avant, de leur propre chef, ceux-ci l’abandonnent à son entêtement.

Le front n’était plus serein et le discours était vide et éculé. Exit l’effort sur le budget de l’Etat, car tout a été fait. Vive la TVA sociale qui va renforcer l’esprit de solidarité des français ! Enfin voilà une idée qui soulage le gouvernement, remplit les caisses de l’état pour éponger le déficit social et rend le peuple plus déplumé mais responsable. Pour les chômeurs on va les maintenir en survie par des piqûres de formation pour des métiers d’avenir… lointain. L’Etat va continuer à dégraisser ses fonctionnaires mais les sociétés privées sont adjurées de maintenir l’emploi… y’a qu’à, c’est tout simple, d’autant plus que ces dernières n’ont que ce seul objectif en tête. Pour ce qui est de la croissance, elle est officiellement décrétée donc en bonne voie, puisque par ailleurs l’emploi dans le privé sera garanti et que les chômeurs seront formés… sauf que l’on prend les français pour des imbéciles !

Mais il reste un grand espoir, c’est l’Europe et cette solidarité révélée dans la crise où tout un chacun a bien compris que nous étions tous accrochés sur la même corde qui pend dans le vide et que maintient en survie le piolet d’une Allemagne, chef de cordée. C’est, dit-il, grâce à la communauté de vues de cette dernière avec nous que sortira une Europe vainqueur de la crise.

Serions-nous subitement tous d’accord sur le rôle de la BCE comme fournisseuse des emprunts d’état, sur le renflouement sans limite des pays en difficulté, sur les taxes sur les opérations financières, etc. ? Oui tout roule sauf que le Royaume-Uni roule pour lui, comme l’Allemagne, sauf que l’Irlande a son propre taux d’impôt sur les sociétés, sauf que la Hongrie redéfinit le rôle de sa propre banque centrale, sauf que l’on n’arrête pas de se réunir en urgence pour accorder nos violons.

Mais voyez-vous notre président a bien travaillé, car la France s’en sort bien mieux que l’Espagne et que l’Italie. Baroin a même dit qu’il plaignait le Royaume-Uni de ne pas être en aussi bonne posture que la France, sauf que celui-ci emprunte à près de 1% en dessous de nous. Ne parlons pas de l’Allemagne qui crée une différence de 200Mds€ avec nous sur le commerce extérieur, ils exploitent leurs ouvriers. Ne parlons pas non plus de la Suède qui a gardé la couronne suédoise et a même réussi à la réévaluer par rapport à l’euro depuis sa création, avec le plus haut taux de dépenses publiques et un taux de chômage de 7,4%. Ils sont fous ces Suédois de maintenir un système social qui coûte si cher !

Non croyez en notre président et en son savoir-faire. Il a montré que le choix de l’euro nous a fait sortir de la crise en maintenant un taux de chômage tout-à-fait raisonnable à près de 10%, tout juste supérieur à la moyenne des pays de la zone euro. En effet nous pouvons même nous permettre de faire rentrer cette année plus de 200.000 immigrés dans les ghettos de nos cités.

Le 18 janvier le président va consulter les représentants de toutes les forces actives de notre pays, il les écoutera, ce qui est déjà une marque de politesse, puis il décidera… dans une ambiance de confrontation d’idées et de négociation… qui n’a plus lieu d’être dès que chacun se sera exprimé. D’ailleurs le président a toujours écouté et décidé en chef de pays démocratique sur tout ce qui concerne l’Europe en particulier. Ce n’est pas de petites décisions de politique intérieure qui doivent faire changer ce mode de gouvernance qui a montré son efficacité 

Enfin ce n’est pas les agences de notation qui vont impressionner un président tel que lui et lui faire changer d’un iota sa politique. N’est-ce pas le général De Gaulle qui disait que « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille » et la taille d‘un président n’a rien à voir avec la grandeur de ses idées ! Ce qui ne l’impressionne plus désormais c’est le protectionnisme, c’est encore là une de ses grandes qualités, savoir tenir compte de la réalité, la fameuse « real-politik », les imbéciles eux avaient eu raison beaucoup trop tôt.

Quand le dogmatisme et le totalitarisme atteignent un tel niveau, le pays est en danger et quand son représentant fait son propre éloge, la fin de règne perce dans le discours. Hélas, pour l’instant, parmi ceux qui attendent la mort du roi pour crier « le roi est mort, vive le roi », le dauphin apparaît bien frêle et incapable d’insuffler un souffle nouveau. Il ressemble comme deux gouttes d’eau à son géniteur, l’autorité en moins

Le temps est sans doute venu de reléguer le clivage droite-gauche aux oubliettes et de le remplacer par un clivage Europe fédérale ou Europe des peuples, comme l’avait souhaité le général De Gaulle. Ce débat serait riche, si les adversaires veulent bien parler le langage de la vérité, et serait à la hauteur de l’enjeu de notre pays. Entre François Bayrou, qui fut le chantre de l’Europe et semble l’avoir oublié, et Marine Le Pen, qui s’approprie les idées des souverainistes, il y a là un espace pour une grande richesse de débats dans lesquels le MPF a toute sa place. Le peuple français pourrait bien finir par le comprendre, après trente ans de déception des deux grands partis, sous la pression des grands évènements internationaux qui vont se produire dans les mois qui viennent.

 Les principaux écueils de la volonté politique de sortie de la monnaie unique

 Ne sont pas des raisons économiques mais essentiellement politiques

 Car elles impliquent le courage de l’aveu des erreurs passées.
 
Le courage croît en osant et la peur en hésitant. (Proverbe romain)


 

Claude Trouvé