vendredi 10 février 2012

Et si on changeait de pays de référence ?

Le président de la République vante à tous propos les vertus de la politique économique de l’Allemagne. La réussite de celle-ci est évidente mais la structure de ses agents économiques est très différente et rien ne permet de dire que la recette de l’un convient à l’autre. Mme Merkel mise sur la rigueur budgétaire stricte, sa réussite dans le commerce extérieur l’y autorise. Elle n’a aucune raison de relancer son économie mais en ayant remplacé le « made in Germany » par le « made by Germany », elle commence à désindustrialiser ce pays. La production industrielle est en baisse mais l’activité financière des banques est en hausse. Ce pays se transforme et se prépare au vieillissement de sa population.

Je vous propose de regarder du côté de la Suède. Ce pays est intéressant à double titre, premièrement parce qu’il réussit mieux que les autres économiquement et deuxièmement parce qu’il n’a pas adopté l’euro. En 2004, malgré une campagne en faveur de l’euro, la plus active sans doute des pays de l’UE, les suédois ont refusé par référendum à une large majorité.

Alors que l’ensemble des pays de la zone euro voyait chuter sa production industrielle y compris l’Allemagne, la Suède affichait en 2011 une hausse de 0,2%. Ce pays n’avait en 2010 qu’une dette de 39,7%/PIB alors que la nôtre était de 85,3%. Alors que nous affichons un besoin de financement, donc de trésorerie, de 7,7%/PIB, la zone euro d’une moyenne de 6,2%, la Suède n’a besoin de rien !

Ses prestations sociales ont depuis longtemps été considérées comme un modèle. Nous nous gaussons du nôtre mais à quel prix ? La sécurité sociale nous coûte 15,4% de notre PIB, la moyenne en zone euro est de13,8%, l’UE 11,2%, la Suède 6,7% ! Notre dette sur ce chapitre était de 175,601Mds€ et de 7,5 pour la Suède ! Mais nous ne sommes pas les plus dépensiers, la Grèce investit 17,8%, l’Italie 18,7%... N’y aurait-il pas un problème de gestion ? En quatre ans la part de notre dette de la sécurité sociale s’est augmentée de 44,5% ! Et si on allait voir comment font les suédois pour avoir ce rapport de qualité/prix ?

Notre croissance est, selon certains, freinée parce que le français est accablé d’impôts. La consommation du particulier est freinée par l’impôt, il ne faut pas toucher à la TVA. L’entreprise est trop imposée et ne peut plus soutenir la concurrence. La France a dans ces recettes 10,8%/PIB provenant des impôts sur les revenus et le patrimoine, 14,9% provenant des impôts sur la production, soit un total de 25,7%/PIB. Ce prélèvement est à comparer au 24,2% moyen de la zone euro. Nous sommes donc assez bien placés dans celle-ci.

La Suède prélève respectivement 19,3% et 18,0%/PIB, soit 37,3%. On voit que cela n’est pas un handicap pour eux. Notons que pour l’UE, ce prélèvement est de 25,4%/PIB. Les pays hors euro ont donc un taux moyen plus élevé. Il s affichent pourtant globalement une meilleure santé économique. La corrélation entre les faibles taux d’impôts et la réussite économique est donc loin d’être évidente et un certain nombre de nos politiques devraient revoir leur copie. 

La réussite de la Suède se matérialise par son taux de croissance supérieur à celui de l’Allemagne qui est seulement dans la moyenne des pays de l’UE, mais très supérieur à celui de la France qui est en dessous de la moyenne de l’UE. Mais un autre critère significatif de la réussite suédoise est le taux de chômage avec 7,5% au lieu de 9,9% chez nous, 8,5% dans l’UE.

Ces chiffres amènent la réflexion suivante : qu’est-ce qui différencie la France de la Suède pour que les résultats diffèrent à ce point ? L’euro et la couronne suédoise ! Dans la mesure où le taux de prélèvement des impôts n’est pas prouvé comme étant la cause principale de l’activité économique, il faut chercher ailleurs. On va le trouver dans l’histoire récente de ce pays qui a dévalué sa monnaie de 34%, par rapport à l’euro, pour faire face à la crise en 2008 et 2009. La couronne est redevenue à une parité légèrement supérieure à l’euro aujourd’hui. C’est donc la manipulation monétaire qui a permis à ce pays de ne pas perdre ses industries et de ne pas délocaliser.

La Suède n’a pas payé le dogme de l’euro fort et monnaie unique ! A bon entendeur salut !

Il ne suffit pas de se cacher derrière en ami pour réussir,

Encore faut-il qu’il soit le bon !
Claude Trouvé