vendredi 14 octobre 2011

La France, es(t-ce)poir(e) pour la Libye démocratique ?

Depuis le 19 mars 2011 nos forces militaires sont engagées en Libye et nous allons fêter le 19 octobre le septième mois d’un engagement qui ne devait durer que trois jours !  Depuis cette date nous sommes le bras armé des Etats-Unis, qui ne peuvent plus être sur tous les fronts. Fourni en munitions par eux, en finances par le Qatar nous devions fêter la chute de Kadhafi pour la fête nationale du 14 juillet. Depuis notre porte-avions a dû quitter le théâtre d’opérations. Plusieurs bastions résistent et Syrte n’est non seulement pas tombée mais les troupes loyalistes contre-attaquent.

La guerre civile, dans laquelle nous nous somme immiscés parés de la « feuille de vigne » de l’ONU, feuille élargie de notre propre chef, continue ! Par contre le pétrole recommence à couler à flots, ce qui est une victoire à la Pyrrhus puisque c’est notre intervention qui en a stoppé l’extraction. On voulait faire baisser les taxes, soi-disant exorbitantes, prélevées par Kadhafi. Le CNT ne mettra pas longtemps à rétablir les mêmes taxes au nom de la libre-concurrence dès que nos forces seront parties. La France pensait augmenter ses parts de marché, ce n’est pas gagné non plus.

Pour l’établissement d’une démocratie le ratage se prépare. Le risque du passage d’une dictature laïque à une dictature islamique se précise. Ce qui se passe en Egypte y ressemble également. De l’avis d’un ancien ambassadeur qui connaît l’arabe et ce pays, nous avons mis le pied sur une mine qui va nous exploser à la figure. Le profit personnel de Sarkozy paradant à Tripoli est plutôt celui d’un coq déplumé qui veut encore exister même en pantin des Etats-Unis.

Car l’enjeu géostratégique de la plus grande puissance du monde, enjeu affirmé depuis vingt ans, c’est le contrôle des ressources énergétiques et minières de la planète. Son grand adversaire est devenu la Chine qui s’implante sur tous les continents et captent ces ressources grâce à sa nouvelle puissance financière. Son but est d’empêcher cette dernière de devenir le plus grand détenteur des ressources et particulièrement en Afrique où ceci est en cours.

Ceci justifie pour eux d’agir sous le couvert de l’ONU et de la liberté des peuples. Peu importe les 20.000 morts de la population libyenne estimés aujourd’hui, peu importe que l’un des pays les plus riches d’Afrique soit à reconstruire, les chinois n’ont pas eu le temps d’acheter le pétrole libyen. Il est sous contrôle américain… pour l’instant.

Mais les grands gagnants, d’une façon certaine cette fois, ce sont les islamistes et tous ces mouvements intégristes. Les arsenaux ont été largement pillés. Des milliers d’armes de toutes natures ont disparu ainsi que du gaz moutarde et de l’oxyde d’uranium, elles n’ont pas été perdues pour tout le monde. Les voies par lesquelles elles ont quitté la Libye sont connues. L’une via le sud algérien, le Niger, le Mali et le Tchad alimente l’AQMI qui mène des opérations de déstabilisation sur ces pays. Une autre par le Soudan, la Somalie mène au Yémen, base d’Al Qaïda. Une troisième par l’Egypte, rejoint Gaza. Une dernière va par voie aérienne jusqu’en Iran.

« L’opération « impeccable », parce qu’elle a été menée sans troupes au sol, débouche sur le chaos et sur la prééminence de forces islamistes. Tous les dirigeants de milices en Libye sont des gens qui ont un passé chez les talibans en Afghanistan, ou dans des groupes liés à Al Qaïda. Le gouvernement provisoire est composé d’« islamistes modérés », dont le modèle est Recep Tayyip Erdogan, et d’islamistes plus radicaux. » (Milliere Guy)

Nous avons alimenté une guerre civile qui continue, perdu un dictateur qui collaborait avec les services de renseignements occidentaux pour lutter contre l’islamisme, rendu peu sûr l’espace aérien survolant l’Afrique du Nord et le Proche-Orient selon les services de renseignements britanniques. Les conséquences sont incalculables pour l’avenir mais la mouvance islamiste intégriste vient de trouver des armes nouvelles et des pays à conquérir.

Il était trop tard pour reculer lorsqu’il a fallu voter la poursuite de cette guerre mais on va longtemps regretter de l’avoir engagée hypocritement au nom de la liberté des peuples à l’heure où l’on massacre les Coptes en Egypte et où les Frères musulmans sont de plus en plus présents.

Le droit d’ingérence est celui des régimes impérialistes

Il a satisfait leur besoin de puissance

Il n’a jamais créé la liberté des peuples.
Claude Trouvé