jeudi 18 août 2011

Le trio incontournable : emploi, rigueur, intégration (5)

La rigueur est à nos portes après quatre ans de dépenses folles pour soutenir l’activité économique. On redécouvre « le fil à couper le beurre » après avoir pris en charge un état dont le premier ministre avait dit qu’il était « en faillite ». La dépense publique a crû d’une façon incontrôlée et la dette s’est aggravée. Nous voyons, contrairement à ce qui nous avait été proclamé, que notre pays n’est pas celui qui s’en est sorti mieux que les autres dans la crise qui a bon dos pour tout excuser. L’Allemagne mais aussi d’autres pays comme les Pays-Bas l’ont mieux gérée que nous.

La France s’est plus endettée que l’Autriche, l’Allemagne et l’Italie depuis 2006. Contrairement à l’Allemagne, la France ne s’est pas préoccupée de son déficit commercial croissant et a continué à mener une politique d’augmentation des salaires pour soutenir la croissance. La crise n’a été qu’un facteur aggravant.

La rigueur peut faire très mauvais ménage avec l’emploi et le pouvoir d’achat, donc avec la croissance qui est déjà en berne. Il s’agit donc de la penser non pas en ponctions tous azimuts sur les niches fiscales, les impôts et taxes mais de la regarder d’abord sur les dépenses de fonctionnement de l’état. Il est donc important de regarder comment évolue celle-ci depuis 2006 et comment ces dépenses sont réparties.

De 64,1 Mds€, la dette publique annuelle a atteint 82,3 Mds€ en 2010 soit 28% d’augmentation en quatre ans… du jamais vu. Dans le même temps le PIB s’est accru de 7,5% avec une inflation de 6,1%. C’est dire que la croissance a été molle malgré une politique très dépensière. Sur le graphique ci-contre on mesure la part des dépenses de l’état qui représente la majeure partie de la dette publique, soit 78,2% en 2010.

C’est donc avant tout dans le budget de l’état que les plus grandes possibilités de gain sont ouvertes. Les dépenses autres se répartissent pour 10.8% pour la sécurité sociale et 10,1% sur les administrations locales sur la dette 2010.

A la question de la dérive des dépenses par rubrique, le graphique ci-joint apporte une réponse sans appel. La dérive la plus importante est celle des administrations de la sécurité sociale (37,5%) suivie de celles de l’état (29,3%). Il est évident que nous ne pouvons pas continuer sur ce rythme de dépenses si les ressources stagnent. Il faut aussi tordre le cou à l’affirmation que les administrations locales sont plus dépensières que l’Etat, elles n’ont augmenté que de 18,6%.

Par ailleurs le poids de ces administrations locales est beaucoup moins important et l’augmentation de la dette n’est que de 1,3 milliards pour 14,6 pour l’Etat soit plus de dix fois plus. L’Etat est donc le premier qui peut, par ses économies, juguler l’évolution de la dette publique. Une diminution de 1% du budget de l’Etat se traduit par un gain de 9 milliards soit plus que la part de la dette des administrations de la sécurité sociale en 2010.

Sur le budget de 2010, sans augmentation des ressources, c’est 9,4% de réduction des dépenses qu’il aurait fallu faire pour respecter la « règle d’or » ! On peut comprendre que l’Etat cherche de nouvelles ressources.

Cependant les dépenses de la France sont-elles au même niveau que celles des pays limitrophes ? Le graphique joint apporte une réponse claire : la France dépense trop. Elle dépasse nettement la moyenne des pays de la zone euro et de l’UE. Il va falloir approfondir ce point et évoquer le poids des dépenses sociales, ce que nous ferons dans le prochain article. Néanmoins il est clair que la politique de la France en matière budgétaire ne peut s’éloigner autant de ses partenaires européens.

On constate que la différence de pourcentage entre la France et l’Allemagne est justement de 9,6% ! C’est très exactement la différence qui permettrait à la France d’équilibrer ses comptes ! On comprend que l’Allemagne tienne à ce que la France réduise sa dette en agissant sur ses dépenses.

La traduction française, telle que nous l’entendons actuellement, est axée principalement sur la recherche de nouvelles ressources. Il s’agit là de l’option la plus risquée car elle intervient sur la masse monétaire disponible pour la consommation ou l’épargne. Dans un climat de récession, la réussite de cette option est encore moins garantie.

Par ailleurs la communication entre un Etat et les citoyens passent mal quand l’Etat lui-même ne se serre pas la ceinture. Des questions sont désormais posées. Des économies sont-elles possibles ? Peut-on juguler les dépenses de la sécurité sociale sans nuire à la santé ou au porte-monnaie des citoyens. Peut-on raisonnablement faire croire aux français que c’est impossible !

Le budget 2011 n’a pas envisagé de réduire la dette alors que l’on nous annonçait une sortie de crise avec un prévisionnel de 2% de croissance. Sur ce dernier point seul François Baroin fait semblant d’y croire ! Il est probable que la dette va s’aggraver plus que prévu. Pour le budget 2012, des recettes de 10 milliards d’euros à trouver, comme annoncé, ne feront que de réduire la dette de 11%, soit à 4,7% du PIB si les prévisions de 2011 sont tenues. On est encore bien loin des prescriptions de la dette à 3% du PIB dictées par Bruxelles car il manquera 27 milliards supplémentaires.

On voit qu’inscrire la « règle d’or » dans la constitution est une opération politique car le but à atteindre n’est pas atteignable avant longtemps sans une véritable révolution de gestion budgétaire qui peut déclencher un autre type de révolution !

Lors de la réunion entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, l’ombre de La Fontaine s’était invitée…
                                                       Nicolas : La cigale ayant chanté tout l’été
                                                                         Se trouva fort dépourvue
                                                                         Quand l’hiver fut venu…
                                                       Angela :  Eh bien dansez maintenant !

Claude Trouvé