lundi 21 novembre 2011

Le nucléaire, pour ou contre une dangerosité maîtrisée et acceptable ?

Le débat sur le nucléaire s’est invité dans le débat politique sous la pression des Verts après la catastrophe de Fukushima. Au-delà des positions de principe, qui sont soit celles de personnes faisant ou non confiance à priori soit celles de personnes habitées par une peur entretenue et profondément viscérale, il y a celle de la majorité de nos concitoyens pour qui il faut raison garder.

Je voudrais exprimer une opinion personnelle sur un sujet que je connais bien, opinion conforme ou non à celle du MPF donc qui ne l’engage nullement. Refuser de dire que l’industrie nucléaire peut être dangereuse est aussi irréaliste qu’affirmer le contraire. Il l’est comme les industries chimiques et minières, qui ont fait dans le monde beaucoup plus de victimes que lui.

Citons Bhopal, au centre de l’Inde en décembre 1984, où des fuites de pesticides ont fait immédiatement 3800 victimes et des dizaines de milliers d’autres par la suite. Les nappes phréatiques sont toujours contaminées aujourd’hui. Citons Minamata, où le déversement de mercure dans les eaux de la baie, a intoxiqué les poissons. Plusieurs milliers de personnes ont contracté la maladie de Minamata caractérisée  par des troubles nerveux et des malformations chez les nouveau-nés. Les exemples abondent avec l’industrie pétrolière, charbonnière et chimique comme Seveso en 1976 et chez nous avec l’explosion dans l'usine AZF à Toulouse.

Ne souhaitons pas que l’industrie nucléaire tue autant que l’ont fait et le font encore les mines de charbon. Remarquons enfin que le tsunami, lors de Fukushima, a fait une trentaine de milliers de morts. Aucun chiffre équivalent n’a sérieusement été avancé pour la catastrophe nucléaire. Tchernobyl est le fait d’erreurs humaines. Fukushima est la résultante d’une catastrophe naturelle mais l’est aussi par manque de prise en compte d’un fait connu, la hauteur des vagues d’un tsunami dans cette partie du monde. La hauteur de la vague avait précédemment atteint 28m de haut en Indonésie, la digue de Fukushima était à une hauteur de 5m. Ceci amène à développer en France et dans le monde le principe de prévention.

L’industrie nucléaire est soumise à un niveau élevé de normes de sécurité et de contrôles comme aucune autre industrie. Elle n’est pas à l’abri d’erreurs humaines. L’Autorité de Sûreté Nucléaire en France tient compte des accidents pour réévaluer en permanence les paroxysmes de la nature et vérifier que les dispositions sont prises pour en minimiser les effets.

C’était le cas pour les séismes qui existent en France mais pas pour les tsunamis qui y sont inconnus. Les inondations naturelles ou accidentelles sont déjà prises en compte. Par exemple la rupture du barrage de Génissiat, entraînant une vague d’eau sur l’ensemble du cours du Rhône, a été prise en compte pour les centrales de Cruas et du Tricastin. Cette vague serait par contre dévastatrice pour la ville de Lyon. Un risque considérable a été pris pour cette ville. Faut-il détruire ce barrage ?

Il importe dans une industrie, potentiellement dangereuse, de développer le principe de prévention qui fait un ajustement permanent des dispositions de sûreté à partir des faits connus. Au-delà existe le principe de précaution qui demande soit de surévaluer la gravité des faits connus, au cas où, soit d’imaginer et se prémunir de faits inconnus mais possibles. Le degré sur l’échelle de Richter des séismes en France est surévalué par rapport à l’histoire connue de ces séismes. Il est surévalué de 1 mais on peut aller à 2 ou à 3. On va vite tuer tout projet industriel potentiellement dangereux.

L’industrie nucléaire existe depuis plus d’un demi-siècle en France. Nous sommes le pays le plus nucléarisé du monde en pourcentage de la production électrique mais nous avons deux fois moins de réacteurs qu’aux Etats-Unis. La maîtrise de cette industrie dans les pays occidentaux est très grande. L’accident de Three Mile Island aux USA n’a pas fait de victimes bien que similaire à Tchernobyl. On peut donc dire que le risque en France est réel mais que l’histoire de cette industrie est le meilleur garant de sa maîtrise.

De plus elle fait progresser en permanence sa sûreté par la conception des nouvelles générations de réacteurs. Une génération IV se prépare dans le monde de la recherche pour les années 2020-2030 qui gagnera encore sur le plan économique et sur la sûreté.

La France n’a aucune raison de quitter sa position dominante dans ce domaine pour en revenir au gaz et à la lignite comme en Allemagne. Tant que les énergies renouvelables ne prouveront pas leur avantage économique, tant que leur énergie ne sera pas stockable, il n’y a aucune raison valable d’arrêter les réacteurs. Elles doivent perdurer tant que l’Autorité de Sûreté Nucléaire, organisme indépendant, n’aura pas jugé que leur danger n’est plus acceptable ou qu’elles ne deviendront plus rentables… à moins que la peur manipulée par les Verts fasse basculer l’opinion publique.

« La découverte des réactions atomiques en chaîne ne constitue pas pour l'humanité un danger plus grand que l'invention des allumettes. Mais nous devons tout entreprendre pour supprimer le mauvais usage du moyen. » (Albert Einstein)

Claude Trouvé