Gouverner c’est prévoir. Force
est de constater que la prise en main de notre pays par une institution supranationale
n’est pas le fruit du hasard mais d’une volonté militaro-financière à vocation
planétaire. C’est l’aveuglement auquel nous sommes soumis par une élite formée au
dogme de la nécessité de réunir des pays jusqu’à leur faire perdre leur
identité dans un magma multi-civilisationnel. On voit encore de nombreux
politiques se référer à De Gaulle et en trahir sans vergogne sa vision planétaire
où la France tendait la main à la Chine avant tout autre pays du camp
occidental. C’est le même qui estimait que la Russie fait partie de l’Europe
par sa position géographique, son histoire, sa civilisation et un pays vers
lequel la France devait rétablir des liens historiques. Les Français en ont
décidé autrement, rejetant la vision gaullienne dans le passé en pensant créer
un monde moins conflictuel avec l’Europe. Qu’on le veuille ou non nous sommes
toujours dans l’ère de la puissance hégémonique américaine, celle de l’ancien monde
et l’UE n’y a rien changé en dehors de nous y enfoncer de plus en plus. Alors
il serait temps d’ouvrir les yeux et de repenser au monde d’une France sûre d’elle-même
et prenant ses distances avec tous les donneurs de leçons et prédateurs de tout
bord. Ne serait-pas De Gaulle et non Macron le prophète du Nouveau Monde ?
J’ai parlé de De Gaulle mais je termine cette partie d’article en citant
Mitterrand quelques semaines avant sa mort : « La France ne le sait pas mais nous sommes en guerre avec l’Amérique.
Oui une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique sans mort…
apparemment, oui ils sont très durs les américains, ils sont voraces, ils
veulent un pouvoir sans partage sur le monde, c’est une guerre inconnue, une
guerre permanente sans mort apparemment, et pourtant une guerre à mort ! ».
Ceci a été publié par le Nouvel Obs en 1997.
Pour cela il faut nous tourner
hors de l’emprise américaine et occidentale et de son matraquage médiatique et
politique pour regarder l’évolution du monde non occidental, ou encore rebelle
à son emprise. Le premier regard doit se tourner vers une autre association de
pays, les BRICS, Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. Ces derniers sont
l’illustration de la vision gaullienne de l’Europe des Nations mais étendue sur
le monde entier, Asie, Europe, Afrique, Amérique du Sud. Cette vision
gaullienne est d’ailleurs dénaturée par certains partis français, car il ne s’agit
nullement d’une nouvelle UE réduite à 6 avec une vocation fédéraliste, mais d’un
espace de recherche de buts communs dans des domaines librement consentis. C’est
ce qui caractérise les BRICS, l’adhésion aux actions communes se fait sans idée
de supranationalité mais dans la décision libre de chacun des participants.
Ceci n’exclut pas des accords bi ou multilatéraux particuliers comme les liens spéciaux
entre la Russie et la Chine. Cette formule exclut d’office toute hégémonie dans
ses fondements, américaine ou interne. On peut douter du maintien strict de ses
principes sur l’avenir mais leur affirmation pèsera toujours comme celle de l’option
fédérale et américaine de l’UE. Si le moteur de ces « alliances » est
le duo Chine-Russie, la présence de plus en plus forte de l’Inde, l’attraction
de pays observateurs comme l’Iran montre que nous avons affaire à des pays
représentant une force considérable en nombre d’habitants, en puissance
militaire et en force économique où la Chine détient la première place mais où
l’Inde est la puissance montante.
Sur les bases de ce principe d’alliance
des accords débordent sur des ententes monétaires, lien de parité entre le
rouble et le yuan par exemple, sur des dispositions stratégiques, sur la
création de moyens bancaires indépendants du FMI, et de la Banque Mondiale.
Même la Japon, fortement lié aux Etats-Unis, sent qu’il ne peut s’opposer
frontalement à cette puissance montante et des liens encore plus diplomatiques
que réels se tissent. La Chine drive le grand projet des routes de la soie
terrestres et maritimes. Il va créer des ouvrages colossaux qui voient déjà le
jour comme le pont de 54 km reliant Hong-Kong et Macao à la partie continentale
de la Chine ouvert ce 24 octobre à la circulation. C’est bien la création d’un nouveau
monde qui est en marche et en train de défier l’Ancien Monde américanisé dont
nous faisons partie. Ce projet va non seulement relier les pays d’Asie du Nord au
Sud, mais aller d’Est en Ouest jusque vers l’Europe. Il va tracer des routes
maritimes nouvelles vers l’Afrique avec les nouvelles installations portuaires.
La Russie, la Chine, et l’Inde
remplissent d’or leurs banques centrales et se débarrassent de leurs dollars.
Un panier de monnaie se prépare pour prendre une place destinée à supplanter le
dollar à terme dans les échanges mondiaux où le Yuan aura une place
prépondérante. De plus en plus de pays s’intéressent à cette nouvelle
conception des relations internationales, mais il faut bien reconnaître qu’il s’agit
pour beaucoup d’entre eux du refus de l’hégémonie mondiale américaine. De nouveau
deux blocs se font donc face. Les Etats-Unis et leurs vassaux occidentaux, le Royaume-Uni,
l’Allemagne et la France, sont sollicités pour soutenir l’expansion du bloc
occidental, principalement en Europe. La Macédoine, la Moldavie, l’Ukraine sont
dans la ligne de mire. On voit aussi les navires occidentaux, mais aussi russes
et chinois se concentrer dans l’Est de la Méditerranée face à la Syrie et au
Liban. On nous fait croire que c’est un affrontement pour ou contre la Syrie. En
fait il s’agit surtout des immenses découvertes pétrolières faites dans les eaux
territoriales de tous les pays sur le pourtour allant d’Israël à la Grèce. Les
grandes compagnies pétrolières sont derrière.
Nous vivons une période d’affrontement
voulu par les Etats-Unis de la finance qui poussent à jouer la carte militaire
pour faire gagner leur économie, politique à laquelle Trump ne peut totalement
échapper. Le retrait du traité FNI est une concession de sa part au complexe
militaro-industriel. Il engendre une inquiétude de l’Allemagne mais un accord
plus étroit de Défense avec l’OTAN qui vient d’être consenti par Macron. L’accord
de notre pays n’est plus demandé par l’OTAN mais devient automatique. De son
côté la Russie s’insurge et Poutine déclare ne pas avoir l’intention d’attaquer
le premier. C’est un mensonge car il avait déclaré auparavant que pour gagner
il fallait attaquer le premier en cas de menace grave sur son pays. Par ailleurs
il avertit qu’une attaque ou une tentative d’annexion de la Biélorussie sera
considérée comme une attaque sur la Russie. Il tient à défendre ce qui reste de
l’ancien glacis russe. Il sait que la Géorgie est aussi visée par l’extension
de l’UE. Autant dire que l’Europe est le continent le plus au centre du conflit
et que nous sommes poings et mains liés avec l’OTAN donc la France avec sa
force nucléaire est la première à être visée en cas de conflit.
La France engluée dans l’Ancien Monde risque de disparaître
Soit en perdant son identité dans une Europe américanisée
Soit entraînée dans un conflit mondial pour les Etats-Unis
Mais cela avec l’accord tacite de notre peuple aveuglé.
Alors n’est-il pas temps de regarder les européennes
Comme une ultime chance de retrouver
La voix d’une France indépendante !
Claude Trouvé
22/10/18