Moody’s
vient de donner sa notation sur la France. Le gouvernement est satisfait… la
note n’a pas baissé, AA1 toujours. Il ne manque pas d’air comme toujours, car
non seulement la perspective est négative mais l’agence est plus que sceptique
sur la réussite du Pacte de Responsabilité du Président. Pourtant on peut s’étonner
que des journalistes français aient pu applaudir au tournant libéral de ce
nouveau cap. Il n’a rien de libéral, c’est un cadeau aux entreprises dont l’impact
se traduira principalement par une ponction supplémentaire sur les classes
moyennes.
On
nous parle de théorie de l’offre comme si le fait de donner plus de produits à
consommer générait automatiquement de la consommation. Il eut fallu pour cela
que les impôts sur les particuliers baissent ou que le prix des produits
diminue. Or, avec l’augmentation des impôts, on va acheter de plus en plus de
produits importés, d’Extrême-Orient en particulier. La marge de manœuvre de l’État
avant des restructurations profondes, dont l’effet ne peut se faire sentir que
dans quelques années, est faible et faire un cadeau aux entreprises signifie, pour
l’essentiel, la baisse du coût des prestations sociales, impôts et taxes.
Le Président
a accouché d’un mouton à cinq pattes, une de ces tartufferies sortie du même
chapeau. Après avoir tondu les français pour renflouer l’État, on leur fait
croire que l’on va trouver les sous pour les entreprises dans une autre caisse
et même que l’on va prendre dans celle-ci pour renflouer la leur en 2015 ou en
2016, enfin en 2017 sûrement. Tout cela pourquoi ? Pour faire le cadeau
aux entreprises, grandes surtout, alors qu’elles continueront à délocaliser
pour raison de compétitivité, et augmenteront leurs marges qui ne sont plus à la
hauteur de celles des allemands.
Parlons
d’abord de la compétitivité. Dans la mesure où l’État ne peut jouer sur la
monnaie, la compétitivité ne se joue pas que sur le coût du travail, lequel ne
contient pas que les salaires. Il y a aussi les frais généraux dont les loyers,
l’électricité, les fluides, la formation interne, les loyers, le gardiennage, l’aménagement des locaux, sans compter les remboursements d'emprunts, etc. La compétitivité tient
compte de la qualité propre de l’entreprise à faire face à ou à créer une
demande des consommateurs par l’innovation, à diminuer les gaspillages. Elle
peut être aussi plombée par un fonctionnement en sous-capacité de ses
installations.
Alors
la suppression des cotisations familiales ne représentent que 5% du salaire
brut. Or les charges patronales sont de l’ordre de 54,8% de ce salaire. Ceci
se réduit donc en gros à passer à 50% de charges patronales. Sur un salaire brut
mensuel de 3.000 euros, c’est une réduction de 150 euros. Toutefois le coût
total salarial pour l’entreprise, toutes charges comprises est de 4.646
euros, le pourcentage de gain pour l’entreprise est de 3,2%. Dans les entreprises
à forte participation de la main-d’œuvre, disons pour une part salariale de 70%
sur le coût total, le gain transmissible à la compétitivité est de 2% !
Rien de tangible pour acquérir de nouveaux marchés.
Mais la comparaison avec une entreprise
allemande du même secteur productif est intéressante. Ce salaire brut mensuel
de 3.000 euros donne un salaire net de 2.176 euros et un salaire net après impôt de 1.890 euros pour
le salarié, ce qui représente le pouvoir d’achat de celui-ci. L’entreprise
française va débourser pour ce salarié environ deux fois et demie le salaire
net d’impôts ! Si l’on inflige le handicap de 2% au coût total du salaire
allemand, bonus que l’on veut donner à cette entreprise française, l’entreprise
allemande aura un coût total de 4.750€. Le salaire brut mensuel sera de 3.986€
(3.000 en France) car les charges patronales ne sont que d’environ 16%. Le
salaire net, la paye du salarié sera de 3.176€ après retrait des charges
salariales, légèrement inférieures en pourcentage aux charges françaises (au
lieu de 2.176€). Par contre l’impôt sur le revenu est plus important en Allemagne
et le salaire net après impôt sera de 2.383€ (au lieu de 1.890€).
Le
handicap de 2% effacé pour l’entreprise française ou ajouté pour l’entreprise
allemande, ce qui revient au même en matière de compétitivité, amène à la
conclusion suivante : le salarié allemand dispose d’un pouvoir d’achat de
26% supérieur et l’employeur peut proposer un salaire net supérieur donc
attirer une qualification supérieure ou à l’inverse embaucher plus de monde
pour le même coût salarial total soit de 46% en plus. A titre d’illustration on
peut appliquer cela au taux de chômage de 11% en France, cela le ramènerait à 7,5%... Tiens !
Tiens !
Le
Medef n’a pas tort en disant que ce plus est insuffisant mais il représente
néanmoins 15 milliards de plus et 50 milliards à trouver en 2015. On voit mal
comment on pourrait en même temps faire miroiter une baisse d’impôt. C’est de
la pure flagornerie de l’État sur les entreprises avec une sorte de subvention
déguisée et un miroir aux alouettes supplémentaire pour pouvoir continuer à
tondre le citoyen, moyen de préférence. Quant aux économies, cela relève de la
méthode Coué pour y croire au-delà de l’argent de poche. Si déjà l’État se
mettait au régime sec sur le nombre de responsables au sommet de l’État, il
donnerait un signal mais hélas ! Nous avons 38 ministres pour 16 et 3
secrétaires d’État en Allemagne, ce qui produit 0% de déficit en Allemagne et
75 Mds€ en France, 2,8 millions de chômeurs chez nos voisins et 5 millions en France…
Le redressement improductif a commencé par un rôle social déployé non seulement
sur les entreprises mais d’abord sur l’aide publique répandue au plus haut
niveau de l’État.
Cet État omniscient, omniprésent, qui donne à droite et à gauche des carottes et
des bâtons, pour épuiser le baudet qui supporte l’équipage, me fait penser à la
mouche du coche de Jean de La Fontaine :
Ainsi certaines gens, faisant les
empressés,
S'introduisent dans les affaires.
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être
chassés.
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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