La liberté reste le plus
beau fleuron de notre République laïque, républicaine et démocratique. Elle est
pourtant toujours menacée par le pouvoir et nous venons d’en vivre un épisode
avec l’affaire Dieudonné. Elle fait suite à l’accusation de blasphème de la
part de Charlie Hebdo, et aux propos jugés racistes d’un journaliste sur l’origine
des détenus en prison, propos d’ailleurs condamnés même s’ils n’étaient que la
traduction d’une réalité mesurable.
J’ai dit que dans l’affaire Dieudonné, l’important n’est
pas qu’un homme s’exprime en public avec des propos qui sont considérés comme
ignobles par une grande partie de l’opinion, mais que des dizaines de milliers
de personnes les écoutent et les applaudissent. S’ils sont diffamatoires et
incitateurs à la haine, ils sont punissables par la justice en référence à la
loi Gayssot. L’incitation à la haine n’étant pas explicite dans ce spectacle,
puisqu’il n’y a pas de demande d’exaction contre les juifs, il faut se
retourner sur la diffamation et l’injure : comme étant « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à
l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est
imputé » et l’injure comme étant « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne
renferme l’imputation d’aucun fait ».
Dans ce dernier cas néanmoins, ceci
étant prononcé dans un spectacle dit comique, faisant d’ailleurs rire des
salles entières, on ne peut lui accorder d’être autre chose qu’un pied de nez
clownesque, ignoble si l’on veut, même si on peut supposer que cela allait plus
loin dans l’esprit de l’artiste. Certains veulent considérer que cet artiste n’est
qu’un politicard de bas étage. On change alors de registre d’attaque de ces réunions
publiques mais l’homme se défend d’être le représentant d’un quelconque
mouvement politique.
C’est pourtant sur ce point que cet
individu avance masqué. Ses textes sont inspirés par Tariq Ramadan et c’est
donc un mouvement politique musulman car l’Islam se considère de droit dans le
temporel. C’est l’Islam que certains appellent « modéré » qui mène
son combat contre les autres religions du Livre par la stigmatisation, le
ridicule aux yeux de musulmans et de « souchiens » benêts, incapables
de discerner qu’ils en seront à terme les victimes.
Si ces propos sont ignobles, ce n’est
pas leur auteur qu’il faut condamner mais ceux qui les écoutent et en rient. On
condamne bien les clients des prostituées qui pourtant ne font qu’un métier
reconnu et fiscalement imposé. Le Tribunal administratif de Nantes vient d’autoriser
le spectacle de Dieudonné et il ne pouvait en être autrement si la justice
française se veut encore indépendante de l’exécutif. En pratiquant la censure, Vals
a commis une faute en attaquant la liberté d’expression et en faisant une
publicité inutile à un tel spectacle qui malheureusement traduit l’évolution de
notre civilisation. En effet cette civilisation
occidentale perd ses repères et en digèrent d’autres revenus d’ailleurs après
bien des combats meurtriers.
Vals a fait
fi de l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948
(résolution sans valeur contraignante) comme suit :
« Tout individu a droit à la liberté d'opinion
et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses
opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations
de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que
ce soit. »
Il a aussi
fait fi de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme de
1950 (qui s'adresse à tous les États membres du Conseil de l'Europe, beaucoup
plus large que l'Union européenne) :
« Toute personne a droit à la liberté
d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir
ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir
ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent
article n'empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion,
de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations. »
Il me faut
finir cet article par une pensée de Kant qui nous amène à réfléchir sur la
nécessité de la liberté d’expression pour garantir la liberté de penser :
« Certes, on dit : la liberté de parler,
ou d'écrire peut nous être retirée par un pouvoir supérieur mais absolument pas
celle de penser. Toutefois, quelles seraient l'ampleur et la justesse de
notre pensée, si nous ne pensions pas en quelque sorte en communauté
avec d'autres à qui nous communiquerions nos pensées et qui nous
communiqueraient les leurs ! On peut donc dire que ce pouvoir extérieur
qui dérobe aux hommes la liberté de communiquer en public leurs pensées,
leur retire aussi la liberté de penser »
Claude Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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