L’éclosion du souverainisme coïncide
avec la construction de l’Europe, la CEE
et puis l’UE. Il s’est cristallisé autour de De Gaulle, la main tendue vers l’Allemagne
en 1963, mais sourcilleux sur l’indépendance française. Sa pensée s’est illustrée
durant sa visite au Canada avec le fameux « Vive le Québec libre ! ». Ce dernier
maintient d’ailleurs une distance avec le gouvernement canadien et tend à être
une province confédérale. C’est bien de cela que De Gaulle voulait, une Europe
confédérale où l’indépendance des nations était statutairement garantie. Cette idée
de l’Europe est en conflit avec celle de Jean Monnet, suppôt des USA, l’Europe
fédérale qui est en marche mais qui rencontre désormais un mouvement égocentrique
nationaliste.
Le souverainisme a plié l’échine
devant le bulldozer de la pensée unificatrice de l’UE basée sur le principe
simple et simpliste « l’Union fait la Force ». L’Europe fédérale a
été vendue comme l’objectif ultime où les nations ne seraient plus seulement sœurs
mais siamoises, où le peuple se sentirait européen avant d’être nationaliste.
Il devait s’en suivre une hausse générale du pouvoir d’achat, des prestations
sociales plus élevées, soutenues par une croissance inégalée dans une équipartition
des richesses. Comment ne pas y faire souscrire une jeunesse pleine de rêves ?
Comment ne pas rêver de traverser les frontières sans barrière douanière, d’utiliser
la même monnaie, de chanter sous le même drapeau ? Le souverainisme était
le briseur de rêves, celui qui ne croit plus à la fraternité européenne, à son
pouvoir, de créer la paix, d’aplanir les disparités entre nations, d’augmenter
le bonheur de vivre de ses citoyens dans une ouverture au libéralisme mondialisé.
Il n’en fallait pas plus pour le mettre en sourdine, vilipendé par les
politiques européistes à la solde des trusts, des lobbies, des banquiers, des
financiers, assommé par une meute de journalistes aux ordres encline à servir
le pouvoir.
Le miracle du bon sens français a réussi
à parler une fois, la seule où on lui a donné la parole après la courte
victoire du fédéralisme de Maastricht, lors du référendum sur la Constitution
européenne. Sarkozy a eu tôt fait de trouver la parade. Depuis le souverainisme
français se dilue et se dénature entre grands et petits partis des Républicains au FN mais n’a pas de réalité
politique suffisante pour agir. Des voix éparses s’élèvent mais les grands
partis récupèrent ses idées et les petits partis campent sur leurs égos. C’est
parce que le programme commun des souverainistes n’existe pas que le
souverainisme se voit coincé entre les grands partis et survit par la ponction
que l’on fait de ses idées au gré des besoins électoraux.
Le souverainisme doit s’exprimer
d’une même voix et repartir de ses fondamentaux liés à l’affirmation, de l’indépendance
du peuple français, de son identité laquelle est attachée à une civilisation
qui ne renie pas plus ses origines et son passé royaliste et chrétien que sa démocratie républicaine
et laïque. C’est de ce constat que découlent les actions que veut promouvoir le
souverainisme et il ne peut donner lieu à aucun schisme sous peine de perdre de
sa vitalité et de sa clarté. Ceci veut dire en clair qu’il faut sortir de l’UE
et de l’OTAN, deux organisations sous l’influence et le contrôle des Etats-Unis.
Ceci veut dire qu’il faut reconstruire une autre Europe, une Europe où tous les
pays européens peuvent entrer, une Europe confédérale qui ne laisse de côté ni
la Norvège, ni l’Islande, ni la Suisse, ni même la Russie. Cette Europe, basée
sur le plus petit dénominateur commun, permet de statuer sans toutes les
exceptions qui fleurissent dans le traité de Lisbonne. Il se limite à définir
les domaines où justement l’union fait la force et ou on est dans le
gagnant-gagnant. Ceci peut permettre d’envisager tous les domaines, économique,
social, juridique, réglementaire, militaire, politique internationale, etc.
Mais ceci exclut toute
autorité supranationale, toute voix supplémentaire donnée aux pays les plus
puissants. Les accords multilatéraux peuvent exister sous condition de ne pas
nuire au pot commun européen statutaire. C’est une nouvelle Europe souple et
adaptative qui peut repartir sur des bases saines que doit proposer le
souverainisme. Mais c’est aussi l’affirmation que l’Europe a une identité et
une histoire qu’elle entend préserver. L’Europe n’est pas une passoire qui
recueille la misère du monde, ni une civilisation qui entend disparaître au
profit d’une autre. Elle se doit de filtrer l’immigration et d’aider les pays d’émigration
à en stopper l’augmentation. Elle ne doit rien céder dans ses lois aux poussées
d’une nouvelle religion. Il n’y a pas de nation sans frontière, comme il n’y a
pas d’être sans corps. C’est la frontière nationale qui est le point
fondamental d’une nouvelle Europe et qui définit avec la monnaie la puissance d’une
nation à exister.
Il y a un souverainisme de gauche et de
droite, car la notion de refus de la supranationalité est une idée qui traverse
les clivages politiques mais c’est le seul point commun qui les relie.
Jean-Pierre Chevènement, pour lequel j’ai la plus grande admiration pour son
analyse du fonctionnement de l’UE actuel et dont la connaissance historique
éclaire nos relations avec l’Allemagne, ne reniera jamais son appartenance au
socialisme. Mélenchon tient encore à l’euro mais il y a des communistes qui
veulent sortir de l’UE. Des accords ponctuels électoraux sont possibles comme
ce fut le cas pour Maastricht mais l’idée d’une coalition aboutissant à une
politique commune est un leurre à moins de catastrophe économique s’abattant
sur la France et l’UE. Le souverainisme a un bel avenir pour ses idées car le
présent ne cesse de lui donner raison et cela ne fera que croître mais il est encalminé
dans une écluse dont les Républicains et le FN tiennent les portes, écluse dans
laquelle ces derniers en profitent pour faire le plein des idées qui peuvent
leur servir.
Dès qu’un souverainiste se démarque
au-dessus du lot, il en est toujours un autre pour lui contester la vedette. La
volonté commune de se rallier à un programme clair sur les fondamentaux du
souverainisme n’existe pas encore. L’avenir, riche des opportunités pour faire
valoir ses idées, est plus tourné vers la captation par les grands partis que
vers une percée derrière un programme d’abord et un leader ensuite. Seul le
rassemblement du souverainisme de droite peut espérer une alliance solide avec
le souverainisme de gauche… mais l’avenir est tout prêt à lui donner un coup de
pouce.
Seul le chef reconnu d’une famille
Peut ensuite tendre la main
A un autre chef de famille
Et espérer n’en faire qu’une !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire