Un malheur n’arrivant
jamais seul, deux bulles viennent d’exploser en Chine. Dans une gigantesque
explosion la première a fait immédiatement des morts (17 ?) et des
centaines de blessés dans la zone portuaire de Tianjin. On en connaîtra bientôt
le nombre exact mais le Guardian signale des informations du Beijing News,
selon lesquelles au moins 700 tonnes de cyanure de sodium étaient entreposées
sur le site de l'explosion. L'Institut national de recherche et de sécurité
(INRS) classe ce produit comme une substance "très toxique" et
"dangereuse pour l'environnement". La qualité de l'air s'est dégradée
dans la foulée des explosions à Tianjin (Chine), rapporte le China Daily, cité
par le Guardian (en anglais), jeudi 13 août.
Un dizaine de morts suite à l’explosion
vont allonger la longue liste des catastrophes chimiques sans compter une
pollution dangereuse qui rappelle les tristement célèbres catastrophes de Bhopal
en Inde et de Seveso en Italie. Combien de personnes seront intoxiquées dans cette zone de forte
densité de population ? On le saura plus difficilement mais le produit est
très dangereux. Ayant travaillé toute ma carrière dans une industrie nucléaire,
j’avais classé les risques de mon industrie pour l’homme dans l’ordre
décroissant suivant : chimique, électrique, nucléaire. Quel impact
médiatique aurait une catastrophe dans une industrie du cycle du combustible nucléaire,
même limitée aux travailleurs de celle-ci, d’effet sur l’homme comparable à
celle de Tianjin ? Il serait énorme, en particulier en France, et
sonnerait vraisemblablement la fin rapide de l’électricité nucléaire devant un
déchaînement de protestations et de manifestations de tout genre. Mais parmi les écologistes,
qui demande l’arrêt de l’industrie chimique comme l’arrêt du nucléaire ?
Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage et tout raisonnement
logique est écarté d’emblée surtout lorsque la politique et l'idéologie s’en mêlent.
Mais la Chine est secouée
par l’explosion d’une deuxième bulle et vient de pratiquer une chirurgie monétaire
par la dévaluation du yuan sur trois jours consécutifs de presque 2 % mardi matin, puis d’environ 1,6 %
mercredi. Elle accentue sa baisse en ce jeudi 13 août avec une nouvelle chute
de plus de 1% face au dollar. Depuis le début de la semaine, la monnaie
chinoise a désormais perdu environ 4,5% de sa valeur par rapport au dollar. C’est
une rupture par rapport à la politique monétaire précédente qui voulait que la
Banque de Chine fixe chaque jour le taux de change et laisse fluctuer ensuite
le yuan au gré du marché mais dans une fourchette imposée de + ou – 2%. En fait
les fluctuations se sont toujours limitées à quelques dixièmes de la marge
autorisée. Cela rappelle d’ailleurs le serpent monétaire d’avant l’euro dans
lequel nous aurions bien fait de rester. Devant la baisse significative de 8,3%
de son commerce extérieur en un an, le dos au mur avec l’éclatement de la bulle
des actifs financiers (-60 milliards en juin 2015) et de l’endettement, une
mesure d’urgence s’imposait. La Chine a choisi la dévaluation sans prendre
celle de la rigueur.
C’est
sans doute la meilleure solution à court terme mais la plus mauvaise à long
terme car elle signifie que la politique chinoise suit celle de la Fed et
désormais celle de la BCE qui consiste à ouvrir la création illimitée de
liquidités qui soutient plus les marchés que l’économie du pays. C’est la leçon
que nous devons retenir si nous tentions une sortie de l’euro. Une dévaluation,
même sans doute légère par rapport au dollar, ne suffirait pas sans une
politique de rigueur. La question qui restait en suspens était celle des
possibilités pour la Chine de jouer un rôle accru au sein du FMI et son
intégration dans le panier de monnaies. On pensait que la Chine hésiterait à
favoriser la baisse du Yuan en raison de cette question en suspens. La situation est suffisamment grave pour que ces
prétentions à l’intégration internationales soient reléguées au second plan.
La coïncidence des politiques menées aux USA, dans l’UE,
au Japon et en Chine laisse prévoir une recrudescence de la guerre des
monnaies. Par ailleurs le moteur de l’économie chinoise était celui de l’économie
mondiale. Son ralentissement va avoir un impact négatif sur la croissance
mondiale, donc en Europe et en France. Les matières premières dont le pétrole
sont les premières affectées. La baisse vers les 40$ le baril va impacter
durement les compagnies pétrolières sur le gaz de schiste aux USA. Nos
exportations vers la Chine dans l’automobile et les produits de luxe entre
autres vont être affectés. Étant donné la place actuelle de la Chine dans l’économie
mondiale, les conséquences de cette bulle chinoise peuvent être plus
importantes que celles de la crise de 2008. Etant entendu que nous sommes sur
des bulles américaines et européennes, l’éclatement de la bulle chinoise peut
précipiter l’éclatement des autres. En fait personne ne peut savoir ce qui va
se passer parce que nous sommes dans une situation inédite. Les marchés sont
inquiets et chutent car le pire est l’incertitude. Ils traduisent la peur d’un
raz de marée.
Après
avoir boosté son économie avec une politique de l’immobilier qui a amené une
surproduction et des villes entières de logements vides, puis s’être tourné
vers le commerce extérieur en maintenant un cours du yuan très compétitif, la
Chine a épongé l’économie mondiale, comme le fait l’Allemagne sur la zone euro.
Elle pense désormais maintenir une politique de déversements de liquidités tout
en dévaluant le Yuan pour redynamiser ses exportations. Les conséquences de
cette politique risquent de détourner d’elles les capitaux, de relancer la
guerre des monnaies et de plonger le reste du monde dans la déflation. Par contre
en se dirigeant vers un système de change plus flexible, la devise chinoise
pourrait bientôt remplir tous les critères pour devenir une grande monnaie de
référence comme le souhaitent les autorités chinoises.
Que
l’on parle d’énergie électrique, ou d’économie mondiale,
Les
mauvaises orientations se payent toujours un jour !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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