De qui s’agit-il ? Du pays France ?
Sans doute mais sa carie ne fait pas encore assez mal et le malade refuse le
dentiste. Non il s’agit de l’euro qui indirectement tue la France. Michel Sapin
rejette, sur le malaise de la zone euro, les difficultés françaises. Même s’il tente
de se dédouaner de ses faiblesses, il n’a pas tout-à-fait tort mais il oublie
de dire que si cette zone se nomme ainsi c’est pour son choix de la monnaie
unique ! Le dogme de l’euro persiste dans la vision politique française
mais elle s’effrite de plus en plus ailleurs. On entend même le gouvernement avouer
que certaines mesures d’austérité ne doivent pas être prises car elles donneraient
du grain à moudre aux anti-européistes… pour ne pas avouer la peur du FN, l’épouvantail
agité en permanence. Cela prouve tout simplement que le danger sur l’euro se
précise.
La
nouvelle Premier Ministre polonaise vient de retarder le passage du zloty à l’euro…
en attendant que la zone euro se porte mieux ! C’est tout dire. Par
ailleurs il devient de plus en plus évident que la croissance, la dette et le
chômage sont globalement meilleurs dans les pays de l’UE hors euro que dans la
zone euro, ce qu’on se garde bien de mettre en lumière en publiant les
résultats de la zone euro et de l’UE mais pas de la zone hors euro seule.
Il faut aller rechercher les résultats pays par pays sur Eurostat. Mais il y a
beaucoup d’autres signes qui sont annonciateurs de catastrophe ou de changement
profond. Ils ne viennent pas tous des pays en difficulté de la zone euro, c’est
en Allemagne que la situation évolue. D’abord parce que la croissance allemande
(sans doute moins que les prévisions à 1,8% en 2014) ralentit du fait des
difficultés des pays du sud qui importent moins et de l’Ukraine. Elle doit
compenser par une extension de ses exportations hors de la zone euro et même de
l’UE, ce qui génère néanmoins un excédent budgétaire de 16,1Mds€ !
Ceci
se traduit désormais dans les urnes. Aux dernières élections, le parti
« Alternative fur Deutschland » ou AfD, qui existe depuis peu,
a recueilli 12,6 % des voix en Brandebourg et un peu plus de 10 % en
Thuringe. En quoi cette percée remarquable change-t-elle la donne en Allemagne ?
C’est que ce parti a été créé par Bernd Lucke, professeur d’économie à l’Université
de Hambourg et que le bras droit de ce professeur est Olaf Henkel, ancien
patron de la confédération des industriels allemands. Ces deux personnages
disent que l’Euro a
échoué et qu’il faut entériner cet échec en retournant aux monnaies nationales,
et donc au DM pour l’Allemagne.
Pour l’AfD, l’euro ne gêne pas l’Allemagne mais empêche toute croissance en
particulier dans les pays du Sud et donc pourrait nuire à l’économie
locale puisque ses principaux clients sont en récession /dépression, ce
qui risque, à terme, de plomber
l’économie allemande.
Bigre ! Voilà qui colle avec les
propos de Michel Sapin à un détail près, l’euro ! Pour être plus clair l’AfD
ajoute que l’Euro fonctionnerait à condition que nous ayons des transferts
sociaux massifs de l’Allemagne vers les autres Etats Européens, ce qui est
interdit par les traités et violemment refusé par la population ou que
nous ayons une « mutualisation » de la dette, autre façon d’arriver
au même résultat, tout aussi interdit par les mêmes traités, mais que monsieur
Draghi pratique avec beaucoup d’abandon en s’appuyant sur la majorité qu’il
détient au conseil d’administration de la BCE.
La propagande de l’AfD s’appuie sur
le refus du contribuable allemand à payer pour des gens qui ne se réforment pas.
A l’évidence ce parti est de plus en plus entendu. Devant le manque de courage
des gouvernements des pays du sud de l’UE, j’avais évoqué le fait que ce serait
sans doute les allemands qui sortiraient les premiers de l’euro… ce pourrait
bien être le cas mais l’acharnement actuel, à colmater les brèches ouvertes sur
le dogme, est encore trop fort pour ne pas traiter l’agonisant au lieu de le
tuer. Pourtant la situation actuelle comporte d’autres raisons d’y penser. Le
fringant Premier Ministre italien ne réussit pas à faire passer son programme
de réforme et est sur le « reculoir » pendant que l’Italie s’enfonce.
En Espagne, les tendances séparatistes, particulièrement en Catalogne, sont
attisées par la crise économique créée de toutes pièces par l’euro.
Par ailleurs les taux sur les
obligations allemandes sont NEGATIFS jusqu’à quatre ans, ce qui prouve que
certains semblent s’attendre à la réapparition du DM et à sa réévaluation. Les
marchés financiers de la zone Euro sous-performent par rapport aux autres marchés
mondiaux, ce qui n’est jamais un bon signe. L’Europe semble en fait devenir un
endroit que les financiers vendent, plutôt qu’un endroit où ils achètent. Enfin
si Michel Sapin se réjouit de la baisse de l’euro par rapport au dollar pour
nos exportations, cela renchérit nos importations mais surtout cela dénote une
faiblesse de la monnaie et n’arrange en rien nos échanges commerciaux avec les
pays de la zone euro qui sont nos principaux débouchés.
Il y a bien des signes précurseurs d’une
évolution notable des réflexions des peuples, d’économistes et de responsables
de l’industrie, particulièrement dans une Allemagne où le pragmatisme enterre
vite les idéologies contrairement à la France. Quand Alain Jupé estime que la
sortie de l’euro serait catastrophique sans argumenter au-delà, cela sonne comme
le non-recevoir de toute discussion sur le sujet… C’est aussi de cela que la France
se meurt. Pour ma part je pense comme les allemands que, prévenir c’est
guérir, et que :
Il vaut mieux la fin des horreurs
Que l’horreur de la fin !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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