Le Président a choisi Dakar pour son premier voyage en
Afrique. Il a eu l’impudence de dire qu’il ne venait pas désavouer les paroles
prononcées par son prédécesseur tout en y faisant clairement allusion pour la
contredire. Cette manière de procéder ne relève pas d’un grand courage. Le
Sénégal qui a acquis son indépendance en 1960 reste pour nous l’image de son
premier président, Léopold Sedar
Senghor, poète et ami de la France. Ce pays est encore loin de la pratique
d’une démocratie apaisée puisque sur les 100 membres du Sénat, 65 sont désignés
par le Chef de l’Etat.
Toutefois le président et les 150
députés de l’Assemblée nationale sont élus au suffrage universel. Le pays est
encore l’objet de guerres intestines avec des affrontements intermittents
contre le Mouvement des
forces démocratiques de Casamance (MFDC). Un autre foyer de conflit entre des
Casamançais et la Guinée-Bissau s'est développé en avril 2007. Le Sénégal a
rejeté violemment les communautés mauritaniennes alors que la plupart de leurs
représentants étaient nés depuis longtemps dans leur nouveau pays d'adoption et
s'étaient bien implantés dans le tissu social et économique. Des réfugiés
seraient toujours établis le long du fleuve Sénégal.
On y observe une grande diversité ethnique : Wolofs
(43,3 %), Peuls (23,8 %), Sérères (14,7 %), Diolas (3,7 %),
Malinkés (3,0 %), Soninkés (2,1 %), Manjaques (2%). La fécondité est de 4 enfants
par femme. Cette diversité ethnique et cet accroissement rapide de population,
passant de 2,8 millions en 1960 à 11,3 millions en 2007, laisse présager de
nouveaux soubresauts dans ce pays dans les années à venir. Les Libanais, les
Européens et les chinois y sont présents.
Ce pays, ouvert au tourisme, accueille aussi de nombreuses
multinationales, la plupart françaises ; c’est l’un des pays africains les
plus industrialisés. Ses principaux clients sont la France, l’Italie, l’Inde et
la Chine plus récemment. Pourtant le chômage est 54% en 2008 et ce pays a
surtout à vendre de l’immigration d’une population jeune. Si les
multinationales s’y implantent c’est que le coût de la main d’œuvre est faible.
C’est autant de chômeurs en plus pour la France.
La France n’a-t-elle donc que la démocratie à vendre au
Sénégal en échange d’un bon accueil à ses multinationales ? L’intérêt des
deux pays est dans la présence de la base militaire de Dakar qui conforte la
légitimité du Président de ce pays. Alors les leçons de démocratie ne sont que
des effets de manche envers le peuple français. Le chemin de la démocratie sera
encore long pour ce jeune pays qui n’a de leçon à recevoir de personne, surtout
pas d’un pays qui ne consulte le peuple que pour élire le président et les
représentants du peuple. Après ceux-ci font ce qu’ils veulent dans des
orientations pour lesquelles ils n’ont pas forcément été élus.
On ne se targue pas d’être un modèle de démocratie quand on
refuse l’emploi du référendum dès que l’on craint un désaveu du peuple comme
pour le traité de Lisbonne. On ne se targue pas de modèle de démocratie quand,
en tant que président, on fait voter en octobre un traité multinational que
l’on a vilipendé en mars 2012 comme candidat à la présidence. L’ajout d’une
ligne de croissance, vœu pieux sans contrainte, ne suffit pas à justifier de ne
pas demander alors le choix du peuple pour un abandon partiel de souveraineté.
Mme Angela Merkel se déplace en Chine pour vendre des Airbus.
Le Président français se déplace pour vendre du vent, des paroles, une
idéologie. Pour avoir du poids, il faut avoir une puissance économique et
militaire. Notre puissance économique se meurt et notre armée aussi. Nous ne
sommes plus capables de porter la guerre au Mali sans l’appui américain comme
en Libye. Arrêtons de nous perdre dans l’idéologie et les Droits de l’Homme,
regardons le monde avec pragmatisme comme le font les Chinois, les américains,
les anglais, les allemands…
Avons-nous vraiment respecté les Droits de l’Homme en
assassinant Kadhafi ou en soutenant un clan rebelle syrien, ce qui perpétue une
guerre civile et des milliers de morts ? Avons-nous œuvré pour le bien des
peuples quand les chrétiens sont massacrés en Syrie alors qu’ils vivaient en
paix sous le régime légal ? Que vaut au fait notre démocratie ?
Sommes-nous sûrs qu’elle soit adaptée en tous temps et en tous lieux ?
N’oublions pas que la Révolution Française a fait un
véritable génocide sous la Terreur. La démocratie est bafouée par les nations
occidentales, en particulier atlantiques. Elle sert de paravent à des buts
stratégiques inavoués. Alors soyons humbles et œuvrons pour elle… dans notre
pays, il y a beaucoup à faire !
« Avant
de regarder la paille dans l'œil de ton voisin, regarde la poutre dans le
tien »
Extrait de L'Evangile par Saint
Matthieu
Claude Trouvé
Coordonnateur du MPF Languedoc-Roussillon