Siemens tourne la page du
solaire, un secteur en crise. Un grand nom de l'industrie allemande, Siemens, a décidé
de tourner la page du solaire en annonçant lundi la mise en vente de ses
activités dans ce secteur en crise, soumis à une concurrence asiatique féroce.
J’ai eu l’occasion précédemment de mettre en
garde contre le développement de l’énergie solaire pour deux raisons
principales. La première est que l’énergie solaire n’est pas encore rentable,
c’est-à-dire qu’elle ne trouve pas d’acquéreur sans les subventions sur la mise
en œuvre et sur le kwattheure produit. C’est une énergie d’avenir sans doute
mais la subventionner n’a d’intérêt que si l’on peut créer une industrie
française rentable. Hors ce ne peut être le cas, car sur ce marché on retrouve
les chinois et les pays à bas coût. Au deuxième trimestre 2012, Siemens avait annoncé que ses
entrées de commandes dans ses activités liées aux énergies renouvelables
avaient fondu de 66% sur un an.
Ce type de fabrication ne présente pas de difficultés
particulières pour des pays industrialisés même s’il s’agit de haute
technologie, il est donc livré à une concurrence sans pitié. Il est pourtant
intéressant de continuer la recherche, les subventions sont alors utiles, en
attendant des percées technologiques assurant une rentabilité par rapport au
nucléaire. En effet, en dehors de la production hydraulique d’électricité mais
de croissance désormais limitée, le nucléaire reste l’énergie la moins chère.
La France est en pointe dans la recherche, sait fabriquer les composants
spécifiques, maîtrise l’ensemble du cycle du combustible de la mine au recyclage
dans les réacteurs et a diversifié ses approvisionnements sur tous les
continents.
C’est
justement la deuxième raison de la non-opportunité du développement du solaire
photovoltaïque pour l’instant. La non-dépendance énergétique est une précaution
essentielle en matière de géopolitique. Or la fabrication des panneaux solaires
demande l’utilisation de terres rares. Les terres
rares sont un ensemble de 17 métaux aux propriétés particulières et utilisées
de plus en plus ces dernières années dans l’industrie de pointe. Des
téléphones portables aux écrans tactiles, des disques durs aux GPS, ils sont
présents dans la plupart des nouvelles technologies.
Puisque,
comme d’habitude, l’industrie civile et militaire avancent main dans la main,
ces matériaux sont présents en masse dans les armes et munitions perfectionnées
(missiles de croisière, munitions guidées, blindages réactifs, lasers,…) ”Rare earth materials in the
defense supply chain » (PDF), gao.gov, 14 avril 2010”. On en déduit
l’importance stratégique d’une telle ressource. Or les nouvelles industries
« vertes » sont, elles aussi, particulièrement gourmandes en terres
rares : panneaux solaires, ampoules basse consommation, batteries de
véhicules hybrides, turbines d’éoliennes industrielles,… La demande en
terres rares augmente de plus de 10% par an. Elle est passée, en une décennie,
de 40 000 à 120 000 tonnes annuelles. Et la montée en puissance de l’industrie
« verte » pourrait faire grimper la demande annuelle à 200 000 tonnes
selon des estimations. ) « Comment
la Chine a gagné la bataille des métaux stratégiques » Le Monde
Diplomatique
A titre
d’exemple, chaque turbine d’éolienne industrielle nécessite en effet plusieurs
centaines de kilos de terres rares (600kg pour une éolienne de 3mégawatts). Or
la quasi totalité des mines se situent aujourd’hui en Chine qui produit 95% de
la demande mondiale. On comprend mieux pourquoi la Chine est le leader
mondial dans la fabrication des panneaux solaires et dans la fabrication des
éoliennes. En monopolisant la consommation de terres rares pour ses propres
fabrications, la Chine se trouverait en position de mettre en dépendance la
plupart des pays du monde ! Les énergies vertes présentent donc un énorme
problème géostratégique qui est volontairement passé sous silence… A tel point
que certains États souhaitent la réouverture de leurs anciennes mines (fermées
pour cause de trop forte pollution malgré des seuils d’acceptation élevés…)
étant donné l’enjeu stratégique et économique d’une telle ressource.
Mais ce n’est pas tout. L’écologie se veut être la
protection de l’homme et de son environnement non ?
L’obtention du produit fini utilisable pour des applications industrielles nécessite un niveau de pureté extrêmement élevé (jusqu’à 99,9999% pour certaines technologies « vertes »). Pour y parvenir, cela passe par 3 étapes (le traitement du minerai, l’isolement du groupe, la séparation des éléments). Christian Hocquard (économiste des matières premières au BRGM)
L’obtention du produit fini utilisable pour des applications industrielles nécessite un niveau de pureté extrêmement élevé (jusqu’à 99,9999% pour certaines technologies « vertes »). Pour y parvenir, cela passe par 3 étapes (le traitement du minerai, l’isolement du groupe, la séparation des éléments). Christian Hocquard (économiste des matières premières au BRGM)
Chacune des
opérations de ce processus nécessitent, non seulement une très forte consommation énergétique mais également l’utilisation
de substances chimiques extrêmement polluantes (acide chlorhydrique, sulfurique
et nitrique notamment). Enfin, la purification rejette des métaux lourds ainsi
que des déchets radioactifs (plomb, mercure, cadmium…). Les
conséquences d’une telle industrie sont très importantes sur les ouvriers
exploités à la mine (explosion du nombre de cancers) ainsi que sur
l’environnement. En Chine, les rejets des mines de Baotou Steel dans le fleuve
jaune constituent désormais un problème énorme. Les acides s’infiltrent dans le
sol, les ruisseaux et les rivières, détruisant les rizières et les réserves
d’eau potable.
On touche là
en plus à un problème non seulement de bilan énergétique mais de pollution
chimique sur l’environnement et de santé publique. On ne saurait passer sous
silence ces aspects lorsque l’on prône le développement des énergies vertes. La
Chine va devenir le pays le plus puissant du monde, il est suicidaire de
rajouter de la dépendance alors que l’on dispose de moyens de produire à
moindre coût de l’électricité. Il est aussi irresponsable de prétendre que les
énergies vertes vont procurer beaucoup de travail pour remplacer le nucléaire. Les
problèmes de sûreté qu’engendrent le nucléaire ne doivent pas faire prendre des
décisions qui hypothèquent l’avenir énergétique de notre pays.
En toutes choses il faut
raison garder
Et les solutions les
meilleures peuvent parfois s’avérer les pires.
Claude Trouvé
Coordonnateur du MPF du
Languedoc-Roussillon