A l’heure où ces lignes sont écrites, le
suspens concernant la Grèce est à son comble et le viol de la déesse Europe est
en cours. Le peuple français commence à réaliser qu’il se passe quelque chose
qui renvoie nos évènements internes à ce qu’ils sont, de peu d’importance par
rapport à ce qui se joue pour l’avenir de l’Union Européenne. Les principaux
tenants de la pensée unique, bien relayés par les médias qui œuvrent auprès du
pouvoir, traînent dans la boue les représentants de la Grèce avec un message
fort d’irresponsabilité. La Grèce est déclarée au bord de la faillite et
personne ne voit comment, même si un accord est trouvé, elle pourra payer son
échéance du 30 juin, toujours due, et la prochaine du 20 juillet. Les 7,2 milliards,
promis par la troïka, n’y suffiront pas et ce sera encore pire pour les
échéances d’août. Si un accord de dernière minute est trouvé, il comportera des
mesures d’austérité amputant gravement le pouvoir d’achat des grecs sans donner
un coup de pouce à son économie. Les dettes seront toujours à rembourser par de
nouveaux prêts qui augmenteront le fardeau des échéances à venir. Il faut
comprendre que les prêts des créanciers sont destinés à 90% à permettre à la Grèce
de rembourser ses dettes.
La
difficulté majeure de Tsipras est qu’il s’est engagé dans ses promesses
électorales à ne pas quitter la zone euro. Pour être en conformité avec ses
promesses, il doit le marteler en permanence. Ceci lui enlève un argument de
poids dans les négociations. Ceci étant il sait que la sortie de la zone euro n’est
pas prévue dans les statuts, et que forcer la Grèce à en sortir mettrait les
pays de la zone euro devant une difficulté juridique telle que ses fondements
en seraient affectés. S’il est envisageable qu’un pays sorte seul de la zone
euro au risque d’une sortie de l’UE, elle est prévue dans les statuts, il ne
peut en être ainsi de l’ensemble des autres pays poussant un autre dehors sans
la faire disparaître juridiquement. Si le référendum a finalement lieu dimanche,
la question posée ne sera pas, Grexit ou non, mais OUI ou NON aux propositions
des créanciers.
Une
nouvelle proposition de la Grèce est discutée entre les ministres des finances
ce soir 1er juillet à 17h30. Elle se résume en fait à un accord sur
les propositions des créanciers assortis d’une promesse écrite de « restructurer »
la dette. On en revient au point de départ, car c’est le point défendu par
Tsipras depuis le début des négociations. La restructuration de la dette a systématiquement
été refusée, par l’Allemagne en particulier. Il faut dire que Tsipras a demandé
que la dette grecque soit amendée comme le fut la dette allemande en 1953. Il n’en
fallait pas plus pour irriter l’Allemagne. Tsipras avait été clair en demandant
que la dette soit réexaminée, repoussée dans le temps ou annulée partiellement.
Si des conditions suffisamment favorables étaient conclues, il ne demandait
plus aucune aide de la part de la troïka en dehors de celles consenties à tous
les membres de la zone euro.
Afin
de montrer toute l’ampleur de la pression imposée à la Grèce, il faut savoir
que l’excédent budgétaire primaire (hors remboursement des intérêts de
la dette) prévu était de 1% et la Grèce avait accepté de rogner encore sur les
dépenses pour le porter à 1,2%. En d’autres termes la Grèce est un des rares
pays européens à avoir un excédent budgétaire. N’oublions pas que la France se
bat autour d’un déficit chronique. Par ailleurs la balance commerciale grecque
est positive. Si sa dette est allégée pendant un temps suffisant, la Grèce peut
être en mesure, non seulement de ne pas l’aggraver mais de la réduire. C’est
donc une tyrannie, principalement allemande, qui est exercée sur ce pays afin d’en
prendre finalement le contrôle, ce que Tsipras a dénoncé.
Les discussions de ce
soir ne peuvent aboutir sans que la dette soit au centre des discussions et qu’un
pas significatif soit fait pour en alléger immédiatement le fardeau. Sinon il
semble peu probable qu’une issue favorable soit trouvée car alors Tsipras
rentrerait la corde au cou et n’aurait plus aucune crédibilité auprès de son
peuple ni même auprès de ses partenaires européens. On ne respecte pas un
vaincu. Si un accord sur la dette est trouvé, alors c’est la position allemande
qui est enfoncée. Or c’est Berlin qui a pris le pas sur Bruxelles depuis le
début. Les conséquences ne tarderont pas à se faire sentir dans les pays en
difficulté par une dette excessive comme l’Italie. Si la discussion échoue, le
référendum aura lieu mais son verdict est incertain tant les partis tenants de
l’appartenance à l’euro vont essayer de faire croire que c’est le véritable
enjeu du vote et vont jouer sur la peur de la catastrophe dans un pays qui
croit encore que l’euro est sa planche de salut. Elle le fut et une abondance brutale,
non gagnée par l’économie, a incité à une non maîtrise des dépenses, tant il
est électoralement favorable de distribuer l’argent à tout va. Désormais l’euro
est la certitude de l’austérité imposée pour faire payer au peuple les
créanciers sans que l’économie puisse se doter du rebond nécessaire.
Au-delà du référendum ou d’un accord de
dernière minute, la Grèce est devant un tiercé d’alternatives, le Grexit et l’abandon
de l’euro, la faillite dans l’euro engendrant une mise sous tutelle, le
sauvetage permanent qui ne fait que repousser le problème en alourdissant la
dette. Mais désormais la faillite de la Grèce fera s’effondrer ce château de
cartes idéologique. L’UE apparaîtra alors comme faillible, la zone euro comme
friable et le projet européen comme chimérique. C’est à un avenir on ne peut
plus incertain pour l’UE qui se profile dans les prochains mois. Les
divergences nord-sud ne feront que s’accentuer et les pays limitrophes de la
Russie sont poussés vers des préoccupations militaires qui sont celles des
Etats-Unis. Nous entrons dans une zone de grande turbulence.
La Grèce est un révélateur de la
fragilité de l’édifice européen.
Le fédéralisme qui en aurait fait un
ensemble cohérent
S’applique de moins en moins à un
ensemble
Toujours plus disparate où le
nationalisme
Se fait d’année en année plus visible.
L’Europe est à repenser avant…
Qu’elle ne meurt !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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