Le parlement grec examine les dernières propositions
de son gouvernement. La partie est jouable pour Alexis Tsipras s’il réussit à
rassembler son propre camp. Ces mesures étant proches de celles qu’était prêt à
accepter le précédent gouvernement de Samaras, il sera difficile au Pasok de ne
pas finalement les voter. Rien ne sera gagné pour autant. Il n’y a aucune
certitude que dans l’autre plateau de la balance, celui des créanciers, qui
contient les aides demandées, les institutions européennes acceptent des aides
à la hauteur demandée par Tsipras. Il leur est facile d’accepter un plan d’austérité
grecque, proche de leur demande. Il leur est beaucoup plus difficile de se
mettre d’accord sur les sommes à déverser sur la Grèce. De nombreux pays sont
hostiles à toute nouvelle aide à la Grèce, considérant que le nouveau plan est
à valoir sur les aides déjà versées ou prévues.
Le couple franco-allemand
voudrait éviter la réunion des 28 pays de l’UE dimanche et s’en tenir à un
accord des ministres des finances de l’eurogroupe, accord plus facile à obtenir
que celui des pays de l’UE. En effet une dizaine de pays sont en dehors de la
zone euro et restent
très hostiles à ce que la zone euro soit privilégiée. La partie n’est pas jouée
surtout si Tsipras n’obtient pas une aide suffisante pour pouvoir être vendue à
un peuple désormais très remonté contre la zone euro. Il a le sentiment d’être
méprisé, essoré de plus en plus et mis à genoux. L’accord du Parlement grec ne
suffira pas à Tsipras pour éviter des désordres sociaux graves. Il doit montrer
qu’il a les moyens de sortir rapidement de l’impasse budgétaire et économique
où il se trouve. Le discours, cher aux politiques, « aujourd’hui ce sera
dur, mais demain sera radieux », risque fort d’être compris comme «
demain on rase gratis » par un peuple en souffrance.
Tsipras sait que les sommes qu’il
peut avoir, permettront de payer les fonctionnaires et les retraites ainsi que
les échéances des créanciers, mais les réformes structurelles de fond ne se
feront que très lentement si elles se font. La mise en place d’une véritable
administration fiscale sera aussi difficile dans un pays où il s’agit d’un
important bouleversement culturel. Pendant ce temps les impôts ne rentreront
pas comme prévu dans les ressources présentées à l’eurogroupe dans un pays qui
retourne en récession avec une consommation intérieure qui va subir un pouvoir
d’achat un peu plus écorné. Les armateurs ont déjà mis leur argent ailleurs et
il sera pratiquement impossible de le faire rentrer tant le poids de cette
corporation est important. Par ailleurs le cadastre devra repartir de celui de
l’église orthodoxe, qui traînera les pieds sachant qu’il s’agit de l’imposer à
terme.
En cas d’accord la partie économique à jour sera très
tributaire de la partie politique sur laquelle l’opinion publique grecque peut
réagir d’autant plus violemment qu’elle va avoir l’impression d’être flouée
après avoir voté massivement un desserrement de l’austérité qui finit par un
resserrement. L’idée de sortie de l’euro peut rapidement s’imposer sous le
prétexte du « tant qu’à souffrir, souffrons librement et dignement ».
Les partis extrêmes peuvent récolter le mécontentement populaire comme Aube
dorée, l’occasion sera belle. Le temps joue contre Tsipras, c’est pourquoi il
va essayer d’en gagner en demandant un « aménagement de la dette »,
donc de la repousser aux « calendes grecques ». La nouvelle position
du FMI, sur l’assouplissement de la dette, ajoute un élément de poids en sa
faveur.
Rien n’est joué, accord ou non, la perspective de sortie de
la Grèce reste une issue ayant une forte probabilité demain ou dans quelques
mois. L’austérité accentuée sur la classe moyenne et les retraités, le frein mis
sur le tourisme par l’augmentation de 10% de la TVA, les difficultés à obtenir
des résultats rapides sur les réformes structurelles, le temps nécessaire pour
que les investissements puissent redresser l’économie, sont autant de facteurs
qui vont miner rapidement la confiance d’un peuple où 33% des habitants sont
sous le seuil de pauvreté. La jeunesse au chômage à 50%, qui a voté massivement
NON au référendum, ne restera pas silencieuse.
Le problème de fond d’une économie, incapable d’entrer dans
la compétition mondiale avec une monnaie trop forte, reste bien présent. La
politique de Hollande qui veut un accord est une posture dont il espère un gain
personnel pour 2017, mais elle empêche d’aller jusqu’au fond du problème qui
demande un Grexit provisoire et une aide de démarrage fournie par l’UE. Si
accord il y a, ce ne sera pas l’attitude française qui aura été déterminante mais
celle de l’Allemagne ou Angela porte la culotte du couple franco-allemand. Ce
sera la victoire d’Obama qui aura fait une pression forte sur l’Allemagne, car
la sortie de la Grèce est géopolitiquement très dangereuse pour lui, vu l’intérêt
que porte Poutine à ce pays.
Tsipras a vraiment ébranlé
les fondements de l’UE,
Mis au grand jour les
limites de sa solidarité,
L’aspect mortifère des
aides des créanciers,
Et fait réfléchir les
peuples européens
Sur le choix de la
monnaie unique !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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