C'est bien une tragédie grecque que
nous fêtons en ce 14 juillet sur les Champs-Elysées avec un Président de la
République portant la dépouille d'un peuple grec sucé jusqu'au sang.
Souvenez-vous de cette histoire de la chèvre de Monsieur Seguin qui nous
faisait pleurer le soir et souhaiter de vite oublier la triste "réalité"
dans un sommeil bienfaiteur de l'oubli. Après un combat héroïque la chèvre
avait capitulé aux premières lueurs de l'aube... comme l'a fait Tsipras. La
messe est dite, le Parlement grec devra voter ce qu'on impose à son peuple sans
en changer une virgule, c'est-à-dire une austérité plus grande que celle que celui-ci
a refusé le 25 juin. Toutes les dispositions législatives prises dans le cadre
de l'accord devront être soumises à l'UE avant d'être proposées au Parlement...
qui ne pourra donc que les voter telles qu'elles.
Le retour de la "troïka" est acté, alors que Tsipras s'est fait
élire sur la volonté de discuter la politique de la Grèce avec les chefs
d'Etat. Les aides financières promises ne le seront qu'après constat de mise en
œuvre de mesures immédiates consignées. Elles seront étalées dans le temps mais
devront être compensées (donc remboursées capital et intérêts) par des
privatisations ou toutes mesures ayant le même but. C'est donc le dépouillement
pur et simple du patrimoine grec. Mais pire, sur les aides promises sur 5 ans,
seulement 25% pourront être consacrés aux investissements soit environ 12,5
milliards !
Comment peut-on imaginer que la Grèce puisse, avec un pouvoir
d'achat réduit, donc une consommation intérieure plus faible, avec une taxation
supplémentaire sur le tourisme déjà en concurrence avec la Turquie, avec un remboursement
de la dette par préemption d'un patrimoine dont la part pouvant générer un profit,
sortir la tête de l'eau ? Tout ceci sans compter que ses exportations, en
particulier agricoles, vers la Russie sont amputées par les sanctions de l'UE
contre ce pays. L'agriculture (14% en 2013) et le tourisme, soumis à
l'augmentation de 10% de la TVA, sont les deux piliers actuels de son économie.
Les deux sont impactés par les décisions de l'UE ! C'est progressivement la
mise sous tutelle totale en obligeant ce peuple à demander en permanence de
l'aide, laquelle sera conditionnée soit à des efforts supplémentaires
d'austérité, soit à des pertes de souveraineté. Non seulement la dette ne sera
pas remboursée mais elle continuera à s'aggraver ne laissant aucun autre espoir
que la soumission à la pauvreté.
C'est à une véritable humiliation que sont soumis les grecs,
une capitulation en rase campagne dont se réjouit notre Président comme si
avoir réussi à garder la Grèce dans l'euro à ce prix pouvait s'appeler une
victoire ! C'est exactement à l'inverse que la France aurait pu aider la Grèce
en faisant peser son poids pour que Tsipras comprenne que la sortie de l'euro
aidée et provisoire était la meilleure solution... tout simplement parce
qu'elle ne pouvait pas être pire que l'accord du 13 juillet ! Celui auquel il
est parvenu, enfin celui qu'a imposé l'Allemagne, est une fuite en avant sans
espoir pour la Grèce de sortir de la mendicité et de l'humiliation. La France
en avait le pouvoir sinon la volonté. Elle a joué la politique du pire car de
plus elle joue aussi un mauvais tour à la zone euro, à l'UE et à elle-même.
Le véritable avenir de l'UE est apparu comme être un
fédéralisme prônant l'austérité et soumis à l'hégémonie allemande dont le
royaume est la zone euro. L'éclatement entre le nord et le sud devient de plus
en plus clivant et le pouvoir des banquiers sur les Etats de plus en plus
contraignant. Même Obama, poussé par les milieux financiers, banquiers et
lobbyistes, est intervenu pour que l'option de la sortie de la zone euro ne
soit qu'une arme de dissuasion... à n'utiliser qu'en toute dernière extrémité
mais fort utile pour effrayer l'adversaire. Car c'est bien à cause de son
impossibilité de violer sa promesse de rester dans l'euro que Alexis Tsipras a
ouvert un boulevard à la pression germanique.
C'est le défaut de la cuirasse que le ministre allemand des
Finances, Schäuble, a exploité à fond en conduisant Tsipras dans une impasse.
Pour espérer gagner, ce dernier devait faire comprendre qu'une sortie de l'euro
ne lui faisait pas peur en cas de contraintes inacceptables sur son pays.
Politiquement il n'avait pas l'appui de l'opinion grecque. A partir de ce
moment, la partie était difficile. La sortie de Varoufakis a donné le coup de
grâce à la fermeté grecque. A partir de là la capitulation était proche,
d'autant plus que la France ne voulait pas entendre parler de sortie de l'euro.
Elle voulait faire allégeance à la politique d'austérité allemande tout en
ayant l'air de ne pas avoir l'intransigeance de la chancelière.
L'accord ne pourra être mis en œuvre qu'après accord de
plusieurs parlements dont ceux de la France et de l'Allemagne. Tout peut encore
se produire mais tout sera mis en œuvre, soit pour faire démissionner Tsipras,
soit imposer cet accord au peuple grec. L'Allemagne tient à garder l'euro aussi
longtemps que possible, c'est son gagne-pain et un tremplin pour ses ambitions
sur le leadership européen. Elle veut même se garder la possibilité de choisir
le moment où c'est elle et elle seule qui en sortira. Le couple franco-allemand
est un couple de fieffés coquins dont l'opposition n'est qu'apparente. Hollande
a nettement montré que la porte de la sortie de l'euro était fermée... et que
la Grèce n'avait plus qu'à se soumettre au diktat de l'eurogroupe et de ses
chefs d'Etat dont les décisions ne pouvaient qu'être celles de l'Allemagne.
Nous pourrions payer très cher dans l'avenir, les actions
sanguinaires de ce couple où la France ne sert plus que de béquille. La Grèce a
amorcé un chemin, celui du retour de la démocratie même si cette tentative
risque cette fois de tourner court et de laisser la Grèce dans un état pire que
celui dans lequel elle était avant la prise de pouvoir de Syriza. Les peuples
essorés du Portugal, de l'Espagne et de l'Italie n'oublieront plus que pour
faire entendre la démocratie dans l'Union Européenne, il faut employer des
moyens révolutionnaires... la démocratie européenne est sous tutelle ! Les
français, au lieu d'ânonner bêtement derrière la pensée unique devraient
commencer à comprendre que, lorsque leur tour viendra ils ne seront pas plus
épargnés que les grecs car l'œil de l'Allemagne est sur eux !
Capitulation ou
décapitation vont gérer le devenir grec.
Ce peuple est condamné
à payer toutes ses erreurs
Dont celle de croire
encore à la démocratie !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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