Il va falloir enfin
présenter un budget 2014 qui respecte nos engagements envers Bruxelles d’abord
et qui soit politiquement défendable. Sur ce dernier point la réussite n’est
pas gagnée car désormais le français est convaincu, à tort ou à raison, que la
coupe est pleine. En effet l’impôt sur le revenu des particuliers n’est pas le
plus élevé d’Europe, alors est-ce l’habituelle grogne dont le français est
coutumier ?
En
fait l’exaspération générale vient du bricolage permanent que les gouvernements
font avec les impôts, les taxes, les niches fiscales, etc. Est-ce normal que,
jusqu’au dernier moment, un gouvernement invente des impôts nouveaux, des
rognages de niches, des manipulations de taux de prélèvement, des changements d’assiette,
etc. etc. ? Le particulier ne sait plus s’il doit épargner, devenir ou non
propriétaire, s’il sera imposé ou on, prendre ou résilier une assurance-vie, si
sa retraite sera revalorisée et pour l’entreprise cette non-visibilité est
particulièrement paralysante. Le nombre d’impôts qui s’abat sur elle est
impressionnant. C’est ainsi que l’Impôt sur les Sociétés (IS) se cumule avec de
multiples autres impositions (impôts sur le chiffre d'affaires, la valeur
ajoutée, les salaires...). La grande majorité des prélèvements sur l'entreprise
(plus de 85 %) repose sur d'autres bases que celle des profits en France. Outre
les principaux impôts sur la production (taxes foncières, contribution
économique territoriale, C3S contribution sociale de solidarité sur les
sociétés), il existe une myriade de petits impôts.
Si l’on
ajoute aux modifications permanentes de la fiscalité, le fait que sur les
entreprises celle-ci favorise l’investissement par l’endettement plutôt que par
les fonds propres, et que les multinationales échappent facilement à l’impôt (la
Fnac va s’implanter au Qatar), on comprend que la plupart des entreprises
françaises et en particulier les petites et moyennes participent au mécontentement
général. On peut résumer celui-ci par le ras-le-pot de l'inventivité des
politiques pour en créer sans arrêt des nouveaux, le ras-le-pot de la façon
dont ces impôts sanctionnent l'épargne et l'investissement, le ras-le-pot de la
façon dont ils sont dépensés par l'Etat et les collectivités locales et le
ras-le-pot de savoir que les avantages de nos gouvernants et représentants de l’opinion
sont toujours préservés.
Mais l’État a plus d’un tour dans son sac et il est devenu habituel de demander des
économies aux collectivités territoriales tout en leur refilant de nouvelles
responsabilités dont les dépenses ne sont pas prises en charge ou le sont incomplètement
ou temporairement. Aux dépenses somptuaires de prestige, à la propension à l’embauche
de personnel, qui sont le fait de la plupart de celles-ci, il faut ajouter leur
endettement lui aussi en progression avec les remboursements d’emprunt
associés. La conséquence c’est l’augmentation des impôts et taxes locales bien
au-delà de l’inflation théorique et officielle, elle-même en-dessous de ce que
nous ressentons sur le pouvoir d’achat.
Le comble
c’est qu’un gouvernement, qui met la justice sociale dans tous ses propos,
propose une fiscalité d’une complexité telle qu’aucun contribuable ne paie la
même somme que son voisin, même à niveau de revenus identiques. N’oublions pas
la CSG-CRDS : un prélèvement qui frappe un très grand nombre de revenus
(salaires et primes, indemnités chômage et maladie, pensions de retraite et
d'invalidité, revenus du patrimoine et de placements) et qui n’est qu’un impôt
comme les autres. Quant au coût du travail, il est lui aussi élevé. Lorsque
l'on recense l'ensemble des prélèvements obligatoires pesant sur les revenus de
l'entreprise, la France figure en position extrême au sein de l'UE.
Le
tableau serait encore incomplet sans la prise en compte de la taxation des
revenus du capital lors de leur distribution (dividendes) ou en tant que
revenus du patrimoine des ménages. En bout de chaîne, il faut aussi
s'intéresser à la taxation du patrimoine (ISF, par exemple). Au total, comme le
relève une étude du Conseil d'analyse économique de septembre 2013, la
fiscalité française du capital (une partie de l'impôt sur le revenu, de la CSG
et de la CRDS sur les plus-values, les mutations et successions, le bénéfice
des sociétés, ISF, taxe foncière) rapporte plus que dans tous les pays de l'UE,
Norvège et Luxembourg exceptés.
L’État et particulièrement l’État socialiste
se drogue à l’impôt,
Moyen commode pour ne pas faire la
chasse au gaspi,
Mais de même que trop d’impôt tue l’impôt
Le ras-le-pot pourrait tuer ses suppôts !
Lettre
de Voltaire le 10 mai 1775 :
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon