Le consensus
des deux partis droite-gauche de gouvernement sur l’opération Serval au Mali a
été total comme pour la Libye. On entend encore dans les médias de la pensée
unique ce genre de commentaires : « Contrairement à la Libye, l’opération militaire sur le Mali était
indispensable et réussie, ce fut un grand moment de François Hollande ».
En tous cas l’intéressé en était persuadé et a pu faire une entrée triomphale à
Bamako dont il garde un souvenir ému. Il était mal venu, encore il y a peu, d’émettre
une opinion différente comme je l’ai fait.
Ces
propos, relayés en boucle sur la différence entre la Libye et le Mali, tranchent
singulièrement avec ceux prononcés lors de l’opération libyenne, victoire militaire
éclair encensée pour sa défense de la démocratie. Je l’ai au contraire dénoncée
comme une opération de vassalisation aux Etats-Unis, une opération de lutte d’homme
à homme entre le pouvoir suprême des deux pays, une opération masquée à but
pétrolier, un désastre constaté à postériori. Ce désastre c’est le retour en
arrière d’un pays qui devenait leader en Afrique et où les luttes ethniques
séculaires avaient cessé même si la dictature y était répressive contre toute
opposition. C’est aussi la main mise finale des djihadistes et la dispersion de
tout l’armement conséquent de ce pays.
La situation au Mali se présente
différemment. Le Mali est un pays pauvre et vulnérable qui fait partie des 47
pays les plus arriérés socialement et économiquement. Treize ethnies
différentes y vivent et avant la colonisation ils commerçaient avec les peuples
d’Afrique du Nord intéressés par l’or, le sel et la culture mais aussi les
esclaves. Ce dernier point n’est pas oublié entre les populations noires du sud
et les arabes du nord.
Les
USA n’ont aucune envie de s’y impliquer et nous ont encouragés à intervenir
même si l’obtention de l’accord de l’ONU pour notre intervention offensive n’a
pas été obtenue sans mal. Nous avons de nombreux ressortissants là-bas et les
mines d’uranium d’AREVA du Niger sont proches de la frontière du Mali. Cela a suffi
pour lancer une opération dite anti-terroriste et de soutien au gouvernement
légal (à l’inverse de ce qui nous faisons en Syrie).
En
tant qu’ancien officier d’Etat-Major, je n’ai jamais douté que l’opération militaire éclair
serait réussie. La différence de puissance de feu et d’effectifs était
largement de notre côté, même si nous avons dû vider les fonds de tiroir et
même faire appel à l’étranger pour assurer la logistique. L’ennemi n’offrait
pas de front et ne procédait que par escarmouches, quoiqu’un peu plus virulent
dans les villes où la population leur était favorable et surtout dans les
reliefs dans la zone Est. Il était très vulnérable en terrain découvert et s’est
dispersé dans la nature qu’il connaît parfaitement, en particulier chez les
Berbères.
Seulement
voilà, nous nous retrouvons dans des conditions que nous avons vécues en
Algérie et en Afghanistan. Dans la partie Nord et Est, les rebelles se trouvent
en pays ami et leur fuite n’est qu’une accalmie avant un retour et une
politique de harcèlements, d’attentats et d’enlèvements. Cela était écrit d’avance
et je l’avais annoncé. C’est ce qui se produit et nous devons lancer une
nouvelle opération de nettoyage avant les élections du pays. Les 3000 hommes
encore présents sont maintenus jusqu’en janvier au lieu de décembre mais la
paix n’est pas pour demain. Les 6.000 hommes prévus par l’union africaine ne
sont arrivés qu’à moitié et leur efficacité est limitée à la coordination car
ils n’ont pas reçu de mission offensive de la part de l’ONU.
Depuis
la paix d’Ouagadougou, les discussions avec les Berbères sont au point mort et
ces derniers détiennent toujours une station d’émission leur permettant de
faire valoir leur point de vue. La partie Nord et Est du pays où se meuvent les
terroristes d’Aqmi, du Mujao et d’Ansar Dine, est une fois et demi grande comme
la France et très peu peuplée. On imagine facilement qu’un tel territoire ne
peut être tenu avec quelques milliers d’hommes. Les documents retrouvés et abandonnés
par Aqmi montrent que les djihadistes sont décidés à revenir et à modifier leur
attitude vis-à-vis de populations en introduisant la charia d’une façon plus
douce et plus progressive.
De même que nous quittons l’Afghanistan,
comme nous avons quitté l’Algérie, en laissant un pays à ses occupants divers,
nous devrons faire de même au Mali, sauf à y déployer une base militaire avec
des moyens d’intervention très importants. C’est déjà ce qui est demandé par le
président malien. La paix est encore loin, car la revendication d’autonomie du
Nord est refusée par celui-ci. Prise à témoin par les deux camps, la
communauté internationale, et surtout la France, danse sur un volcan. Alors que
les militaires français de l'opération Serval, encore sur le terrain, et
les forces onusiennes de la Minusma ont été contraintes de s'interposer à
Kidal, Paris se retrouve coincée entre deux belligérants qui lui demandent tous
les deux de rendre des comptes : accusés par Bamako de protéger les rebelles
touaregs, ces derniers lui reprochent eux aussi d'avoir pris parti pour l'Etat
malien.
Alors
c’est déjà 400 millions dépensés depuis le début de l’opération Serval et l’Armée
évalue à 100.000 euros par homme et par jour notre présence au Mali. Nous
donnons une aide de 7 millions à l’armée malienne et 40 aux forces onusiennes d’intervention
et nous ne sommes pas prêts de quitter le pays, la paix conclue. Le Mali est un
piège qui se refermera sur nous et nous coûtera cher. Parole de diplomate
(toujours plus intéressante que celle des politiques) :
« Les
djihadistes ont toujours l’intention de foutre le bordel au Mali,
Dans
les pays voisins, et de s’y réinstaller. »
Hollande est prévenu !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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