Le
gouvernement fait sa rentrée avec des ministres bronzés et euphoriques dans un
exercice prévisionnel inédit et à fort relent de communication. Si « Gouverner
c’est prévoir », on ne peut que féliciter le pouvoir de se pencher sur l’avenir
de notre pays. Malheureusement on ne peut qu’être très dubitatif sur la
réalisation à 12 ans des pensées euphoriques des ministres qui ont eu à rédiger
un devoir de vacances sans qu’ils puissent s’appuyer sur un véritable travail
préparatoire qui aurait dû être commencé depuis le début du quinquennat.
Pour
s’en convaincre il n’est que de se demander ce qu’aurait pu prévoir le pouvoir
en 2001, année charnière entre le lancement de l’euro et son arrivée dans notre
porte-monnaie. On commençait une période doucement euphorique qui a duré deux
ans. Dès 2004 l’euphorie économique de l’euro se ternissait et nos exportations
aussi. Puis ce fut 2007-2009 avec la crise et les remèdes de cheval pour sauver
les meubles. Que resterait-t-il aujourd’hui de prévisions euphoriques qui
auraient été faites en 2001 ? Rien. Le pays s’est endetté, les prestations
sociales sont en déficit, la croissance est en berne et les impôts en hausse.
Les statisticiens
savent ce que valent les prévisions en avenir aléatoire. En effet nous ne
sommes pas dans une économie fermée ou le commissaire au plan lançait des plans
quinquennaux dont il pouvait prétendre maîtriser tous les paramètres sauf
peut-être climatiques. Ces dernières ont causé bien des déboires à l’URSS. Dans
une économie mondialisée nous ne maîtrisons pratiquement aucun des paramètres
économiques extérieurs comme la crise de 2008 nous l’a récemment rappelé. Il
faut donc faire des prévisions dans une fourchette large d’hypothèses minimales
et maximales sur l’impact socio-économique extérieur.
La
trajectoire à définir pour le pays dans les différents secteurs
socio-économiques ne peut qu’être définie par celle à moindre risque et non par
la plus favorable. Définir par exemple ce que seront les infrastructures du
pays dans 12 ans, c’est tenir compte des investissements possibles durant cette
période autant que de définir les priorités entre le rail, la route, la voie
aérienne ou les moyens électroniques de communication. Le moindre risque ce
sera de définir une stratégie qui puisse se réaliser même dans les conditions
prises comme les plus défavorables.
Dans
les grandes industries, aéronautiques, automobiles et nucléaires par exemple,
la prévision à 5 et 10 ans est couramment pratiquée car elle est vitale ne
serait-ce que par les délais de mise en œuvre des fabrications mais les
résultats ne sont pourtant jamais en concordance avec les prévisions. Il faut
prévoir bien à l’avance le combustible de demain pour les fusées, l’énergie
motrice pour les automobiles et les réacteurs de demain pour le nucléaire.
Sinon la concurrence ne vous trouvera pas au rendez-vous du progrès.
Prévoir
ce que sera la défense de la France dans 12 ans est en effet un sujet majeur
mais nous venons de voir qu’il est devenu une variable d’ajustement du budget. Par
ailleurs le fait d’être ou non dans l’OTAN change complètement la donne et a
brusquement créé une rupture dans la planification militaire. D’une façon
générale, les prévisions qui ont des chances de se réaliser sont celles
touchant à des domaines ayant peu d’impact sur les dépenses publiques et
surtout celles pouvant procurer des économies ou améliorer l’efficacité des
administrations publiques et de la législation française. Si tel était le cas,
on ne pourrait que louer le gouvernement.
Il
reste pourtant un domaine stratégique où l’Etat a et doit encore jouer un grand
rôle, c’est celui de l’énergie. Quoiqu’en pense les écologistes, le choix du
nucléaire a été une des très bonnes décisions du couple De Gaulle-Pompidou. Non
seulement nous avons eu un avantage substantiel sur le prix de l’électricité,
mais nous avons développé une industrie nucléaire parmi les plus puissantes du
monde. Le choix des énergies renouvelables subventionnées et demandant un
nouveau maillage des distributions électriques, la course à la sécurité
renforcée sur le nucléaire (la France s’est pourtant avérée comme le pays le plus
sûr du monde) au nom du principe paralysant de précaution, vont nous conduire à
un prix qui va se rapprocher de celui des pays voisins. Le bénéfice économique va
s’en trouver annulé ne nous laissant qu’une bonne indépendance énergétique.
Dans
ce cadre énergétique les orientations sur les gaz de schiste sont stratégiquement
importantes comme on peut le voir pour les Etats-Unis. Ces derniers sont en
train de se replacer dans le rang de superpuissance pour longtemps alors que
leur dépendance énergétique et leur économie fléchissante sonnaient l’annonce
de leur déclin. On sait qu’au mieux le pouvoir laissera une recherche géologique
molle sur notre territoire.
Il n’y
a donc pas grand-chose à attendre de cet exercice prévisionnel, si ce n’est un
enfumage euphorisant de rentrée dans un exercice de communication sur des
sujets bien loin des préoccupations immédiates des français. Le chômage ne
diminue pas et chacun va constater à la rentrée que tout coûte plus cher malgré
les statistiques de l’INSEE. Les prévisions n’engagent que ceux qui les
écoutent. Comme le bronzage, elles-aussi sont éphémères !
La prévision dans la boule de cristal
Ne vaut pas plus que l’illusion d’optique.
Elle trompe son monde !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF Languedoc-Roussillon
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