Nous
voilà à 5 semaines d’un premier vote pour désigner les finalistes de l’élection
présidentielle, la plus importante élection de la Vème République dont le mandat
a été ramené de 7 à 5 ans. Historiquement le parti socialiste, encore en
période d’euphorie vengeresse, a lancé la première l’idée d’une primaire de
gauche qui a eu l’énorme avantage de mobiliser les médias et de priver d’un
support médiatique, une droite de gouvernement peu encline à une bataille de
sous-chefs. Cette pratique, issue du fonctionnement des élections américaines,
était contraire au déroulement normal d’une campagne où le principe d’égalité
des chances de chaque candidat était au cœur de notre Constitution.
Souvenons-nous que l’accession à la candidature était initialement beaucoup
facile et que l’accès aux médias télévisuels a été longtemps régi par un code de
stricte égalité de temps d’accès. Depuis l’évolution s’est faite dans le sens
de la restriction de la facilité d’accès à la candidature et par l’inégalité de
temps d’accès aux télévisions sous contrôle du CSA.
Le
peuple, toujours ravi de contempler « les jeux du cirque » ou ces
émissions à la Ruquier où la règle est le jeu de massacre, a vu dans cette
première primaire de gauche, l’occasion d’assister à un nouveau spectacle politique
dont il ignorait si le vainqueur était désigné d’avance ou s’il serait issu des
joutes oratoires. Car enfin, avec le recul, on peut se dire qu’Hollande, le
deuxième couteau après Strauss-Kahn, avait déjà pris contact avec les banquiers
après la chute de son mentor. Il restait le seul socialiste à l’être à cette
époque. Toujours est-il que Martine Aubry est rentrée dans sa mairie de Lille
et les autres prétendants ont trouvé une place au gouvernement. L’affaire était
rondement menée et donnait les apparences d’une démarche parfaitement
démocratique, sauf que le candidat finalement désigné avait disposé d’un temps
médiatique qui lui donnait une avance d’audience par rapport à tous les autres
candidats dont le principal, Sarkozy.
La
primaire viole donc le principe d’égalité sur le temps de télévision, dont De
Gaulle avait mesuré l’importance à l’époque, même si désormais les réseaux
sociaux deviennent d’une importance de contrepoids important. Ce basculement
est dû non seulement à l’évolution technique d’internet mais aussi à la
captation de l’information médiatique par quelques grandes fortunes qui s’approprient
non seulement la vérité de l’information mais œuvrent ensemble pour le maintien
du Système, celui des pouvoirs de l’argent de Paris à Bruxelles et à Washington.
L’information devient unique et pipée. Mais revenons aux primaires qui ont
néanmoins induit dans l’esprit des battus le sentiment que la revanche qui,
comme la mule du Pape, saurait attendre. C’est ainsi qu’Arnaud Montebourg,
mieux plébiscité que Manuel Valls, a mal digéré de le voir ensuite choisi comme
Premier Ministre, et que Martine Aubry a ressassé une vieille inimitié avec
Hollande avec le sentiment d’avoir été piégée dans une primaire pipée.
Tout
cela s’est développé dans une fronde ouverte et traduite dans les votes des
déçus de la primaire dans ce quinquennat qui se termine. L’opposition des
hommes et des femmes au sein du parti socialiste était exacerbée par le
sentiment d’avoir eu un assentiment populaire dans la primaire qui leur donnait
un pouvoir discrétionnaire. La deuxième primaire de gauche a cette fois tourné
au fiasco. Les dissensions accumulées ont abouti à une scission de fait entre
le candidat choisi par le parti et un homme du Système, éphémère socialiste, et
protégé du Président par obligation. Ce dernier, qui a l’hypocrisie de dire qu’il
ne veut pas intervenir dans cette élection, ne s’est pas caché pour déclarer
publiquement que l’objectif était d’empêcher Marine Le Pen d’accéder au
pouvoir. Il n’est pas plus en dehors que ne l’était Obama pour les élections
américaines. Tout laisse à penser au contraire qu’il est extrêmement présent et
actif dans l’ombre du pouvoir.
Cette
nouvelle primaire de gauche est en train de sombrer dans un sordide coup de
pied de l’âne sur le candidat Hamon, défendu on ne peut plus mollement par
Cazeneuve, et trahi sans retenue par la plupart des politiques utiles au
candidat Macron, complètement inexpérimenté en dehors de l’économie. Ce
spectacle des « tous derrière toi », murmuré parfois, à l’issue de la
désignation de l’élu socialiste, donne une image désastreuse de la politique. C’est
à l’image de Bayrou, qui, comme l’âne de Buridan, reste longtemps à choisir
entre la gauche et la droite dans l’espoir de réaliser son rêve présidentiel,
et finit par se décider vers celui qui peut lui offrir un poste de Premier
Ministre. C’est à pleurer, tant les politiques ont oublié le sens de l’État et
celui de l’engagement politique pour celui du portefeuille ministériel.
Le
spectacle à gauche est désastreux mais la première primaire de droite s’engage
dans le même processus. Le soutien à minima de Juppé était tellement à minima
qu’il en devient un déni de soutien. D’ailleurs il a déserté les barricades
pour soutenir, comme promis, son colistier en difficulté. Que Fillon arrive à
surmonter son handicap médiatique, causé par les « affaires », ou
non, qu’il soit Président ou non, le processus de dégradation du parti Les
Républicains est amorcé et conduira au même résultat qu’à gauche. Les jeunes loups
Wauquiez, Lemaire, sont d’une discrétion qui fait peur. Ce sont les hyènes qui
attendent le moment du dépeçage. Il n’empêche que ces primaires de gauche et de
droite, en projetant en avant des hommes politiques, attirent les actions de
déstabilisation qui font la une des médias et faussent le déroulement de la
démocratie en particulier pour les petits candidats qui n’ont droit qu’à des
miettes. D’autant plus que le candidat du Système, donc des médias, rafle tout
ce qui est encore disponible pour occuper l’espace médiatique.
Les
primaires faussent le processus démocratique de l’élection présidentielle. Ils
incitent même les chaînes privées à faire des copies dans des débats avec des
candidats choisis hors des « petits candidats », débats auxquels les
choisis ne manquent pas de répondre, laissant volontairement les autres dans l’ombre
sur TF1. Le jeu de questions fermées adressées aux candidats occultent d’ailleurs
tout débat constructif et facilite la tâche des candidats dont le programme est
le plus vide et le plus incohérent. Ce mimétisme des primaires est également
nuisible au bon fonctionnement de la démocratie même si c’est une distorsion
collatérale. Il va venir s’y ajouter la distorsion de temps de parole avant les
15 jours précédant le vote. Il ne faut pas s’étonner que notre démocratie parte
en quenouille et qu’un candidat réclame une sixième république sans montrer que
notre constitution est tout simplement bafouée et qu’il serait d’abord sain de
revenir à ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être.
Il n’est pas pire action de provocation
du désordre
Que de violer les principes fondateurs
D’une constitution construite
Sur la liberté et l’égalité !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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