Le 1er
débat à cinq candidats a commencé le 20 mars alors que onze candidats avaient
remis plus de 500 parrainages obligatoires au Conseil Constitutionnel. Cette
première anomalie qui crée une distorsion entre deux groupes de candidats
fausse le nécessaire équilibre démocratique. Le choix de 500 signatures sur 30
départements a été institué pour sélectionner des candidats ayant une
représentativité suffisante pour se présenter à l’élection présidentielle. Si
ces conditions sont remplies, il n’y a plus aucune raison de faire un tri des
candidats sur les critères d’élections précédentes, sauf celle d’entraver un
peu plus l’arrivée de nouveaux candidats. Cette démarche de l’entre-soi est
parfaitement anti-démocratique. Ceci étant dit, ce premier débat, où les
candidats étaient sommés de donner les solutions aux questions posées, a
conduit fatalement à un déballage de recettes dont la cohérence dans un
programme structuré a échappé aux téléspectateurs. L’accessoire s’est mêlé à l’important,
voire à l’axe politique principal qui sous-tend les programmes des candidats.
On a
assisté à une course aux dépenses, aux cadeaux catégoriels. Ce n’est pas des
futurs Présidents qui débattaient mais des futurs Premiers Ministres. A part
quelques moments d’exception, cette forme de débat et de questions, ne donne qu’un
faible aperçu au peuple français de la voie dans laquelle le futur Président
veut conduire son peuple. C’est ainsi que chacun y est allé d’un déballage de
ses dépenses, sans que l’on ait une quelconque idée claire ni du montant du
budget recettes, ni des cassettes ouvertes, pour y puiser les dépenses. Cette
vision tronquée laisse l’image du « Je
dépense, les recettes suivront. » De même l’appartenance à l’UE s’est immiscée
dans les discussions pour ressurgir plus nettement en fin d’émission sans que
le problème de fond soit réellement abordé. Or cette discussion est un préalable
puisqu’elle oppose fondamentalement Marine Le Pen au trio Fillon-Macron-Hamon,
alors que Mélenchon est resté dans le flou mis à part la sortie de l’OTAN. A
défaut d’une discussion sur ce choix fondamental, on ne peut lever l’oukase de
catastrophisme qui pèse sur la sortie de l’euro ou de l’UE.
Alors
que l’UE se désagrège et que des discussions s’engagent entre les premiers pays
fondateurs pour repartir sur une Europe à deux vitesses ou plus, alors que
cette orientation a été évoquée par Benoît Hamon d’une façon presque
subliminale, ce débat est occulté depuis trop longtemps. L’information est à
sens unique et mériterait une émission presque complète pour aller au fond du
débat tant la stratégie de la peur a rendu les français frileux et désinformés.
Ils ne savent même pas pour la plupart qu’il faut mettre 9 milliards sur le
tapis pour que la France soit dans l’UE. Pourtant ce sujet était sous-jacent
dans les discussions sur l’immigration. Nombre de propositions sur ce sujet se
heurteront pourtant aux décisions de Bruxelles et à l’unanimité requise des
Etats membres de l’UE. On n’a plus qu’à espérer que le prochain débat, qui
verra l’entrée de nouveaux candidats, contraindra les participants à débattre
sur ce sujet à condition que le cloisonnement sur ceux choisis n’empêche pas
tout débat de fond.
Nos
candidats "premiers
ministres" ont
donc dépensé de bon cœur et nous sommes rentrés souvent dans le détail. Par
contre les recettes, dont on ignore le montant et la répartition, n’ont émergé
que sous des quolibets généraux arguant de l’impossibilité de financement. C’est
alors parole contre parole et la vérité échappe au téléspectateur. Non
seulement une vraie discussion sur les recettes n’a pas eu lieu mais, une fois
débattue l’appartenance ou non à tout ou partie du trio UE-Euro-OTAN, la
présentation des hypothèses de croissance et la position de chacun sur le
déficit budgétaire, donc la dette, aurait dû être un préalable à toute
discussion sur les recettes. Car c’est avec au moins une hypothèse de croissance
et une prévision du taux d’emprunt que se bâtit le budget national. Sans cela
on est dans le rêve et les promesses s’évanouiront devant la réalité sautant à
la gorge du nouvel élu.
Quelle
famille raisonnable peut gérer ses finances en ne pensant qu’aux dépenses ?
La réalité et le banquier auront vite fait de mettre un terme aux rêves d’achats
ou d’investissement hors de portée des recettes. Entretenir nos concitoyens
dans cette déconnexion de la réalité est malsain, et participe à cette
désaffection du peuple pour les politiques. Notre pays s’enfonce dans la dette,
et notre dépendance aux banquiers ne cesse donc de s’alourdir. La BCE ne cesse
d’émettre de la monnaie de singe, car il est bâti sur le rachat des créances
les plus douteuses des banques. Leur chance de remboursement est souvent
quasi-nulle, autrement dit elles n’ont aucune valeur de contrepartie. Plus notre
dette s’alourdit, plus nous empruntons, et plus la BCE a un capital dont la
valeur diminue. Jusqu’où croyez-vous que l’on peut aller comme cela ? L’argent
nourrit surtout la spéculation et les banques se fragilisent dans des
opérations trop risquées. Les deux principales banques allemandes et italiennes
sont déjà dans le rouge et il faut savoir que l’interconnexion entres les
banques dans le monde provoque un risque qui se propage, dit systémique, qui
conduit à un krach financier final.
Donc ce risque ne
peut être caché aux français et la position du candidat sur le déficit et la
dette est un préalable, de niveau présidentiel cette fois. Laisse-t-on filer le
déficit ou non et si oui de combien ? La France ne respecte pas ses
engagements d’entrée dans la zone euro, ni le 60% de dette par rapport au PIB,
ni le 3% de déficit par rapport au PIB. Nous sommes à 100% de dette et le 2,7%
de déficit du budget de 2017 est bâti sur des hypothèses de croissance et de
recettes générées qui laissent sceptiques les économistes et la Commission des
Finances de l’Assemblée. Les français ne savent toujours pas quelle est la
position des candidats et quels arguments ils apportent sur un sujet qui les
concerne ainsi que leurs descendants. N’oublions pas que toute dépense est
payée par les particuliers et les entreprises. L’État n’est qu’une institution
de collecte et de redistribution. Les trois sources fiscales de recettes sont l’impôt
sur les revenus, l’impôt sur les sociétés et la TVA. A budget égal, si l’on
baisse les impôts sur les sociétés il faut trouver l’argent sur les deux
autres. Comment les différents candidats envisagent-ils de jouer avec ces trois
sources et de combien ?
Il faut arrêter de
prendre les français pour des imbéciles que la Finance n’intéresse pas et de
laisser croire que l’État peut tout. Le pragmatisme affiché en permanence par
Emmanuel Macron ne laisse qu’une brume légère sur ses intentions. Les augmentations
de la rémunération et du nombre de fonctionnaires impacte non seulement le
quinquennat mais les générations futures parce que pour l’instant on est
fonctionnaire à vie. La France a plus de 40% de fonctionnaires en plus que l’Allemagne,
doit-on continuer à les augmenter ? Si oui peut-on continuer à lutter avec
l’Allemagne en ayant la même monnaie ? On retombe alors sur l’appartenance
à l’euro et à l’UE. Par ailleurs la politique étrangère de la France est
impactée par ce choix, car l’UE a une politique étrangère liée à celle des États-Unis.
A l’intérieur de l’UE les possibilités de choisir notre politique étrangère va
se réduire comme s’est réduit notre possibilité de bâtir notre budget comme
nous l’entendrions. Bruxelles donne son aval.
Mis à part la facilité à exposer ses
idées et l’aisance dans la répartie
De candidats cadenassés à leur pupitre
et débattant peu entre eux,
Ce genre de débat à plusieurs avec des
questions fermées
N’apporte guère de précisions sur la
vision politique
Et berce le téléspectateur de promesses
Dont il ne peut même pas savoir
Si leur financement est assuré.
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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