L’Ukraine est
sollicitée pour un partenariat avec l’UE et son gouvernement a de bonnes
raisons de l’envisager. Ce pays est géographiquement dans l’Europe, beaucoup
plus que la Turquie. Historiquement liée à la Russie, pour avoir fait partie de
l’URSS, elle a des liens privilégiés avec celle-ci en particulier pour
l’approvisionnement gazier. L’Ukraine n’entend pas cependant entrer dans un
accord d’association avec l’UE avec des conditions draconiennes du FMI pour l’obtention
de prêts alors qu’aux pires moments l’UE n’a pas proposé son aide.
Le
gouvernement ukrainien a annoncé soudainement la semaine dernière suspendre ces
négociations, dont une condition clé était la libération de Ioulia Timochenko,
principale adversaire politique du président Ianoukovitch. Par ailleurs la
Russie a fait savoir qu’en cas de report de la signature de l’accord déjà
parafé par l’Ukraine, elle était prête à ouvrir de nouvelles négociations avec
ce pays. L’Ukraine a donc ajourné la
signature d’un accord avant le sommet de Vilnius la semaine prochaine. Le premier
Ministre ukrainien, néanmoins présent à Vilnius, va essayer de faire accepter
une négociation à trois qui lui permettrait de tirer le maximum de bénéfices de
la situation : "Nous voulons discuter des problèmes à trois"
avec la Russie et l'UE, a-t-il dit. "La Russie a accepté cette
proposition, la balle est dans le camp de l'UE".
Il
est évident que l’UE espère pêcher l’Ukraine dans ses filets pour des raisons
commerciales affichées mais à cela s’ajoute une guerre géopolitique qui permet
de mettre l’UE et l’accord de libre-échange transatlantique aux portes de la
Russie, bloc qu’il s’agit d’affaiblir économiquement avant d’y mettre une
emprise financière mortelle. Le Premier ministre ukrainien a d’ailleurs
explicitement déclaré que : "L'Ukraine n'est pas un champ de
bataille entre la Russie et l'UE", "il faut prendre en compte
nos intérêts". De son côté la Russie ne veut pas que l’UE lui fasse
porter le chapeau de l’échec des négociations. Elle déclare : "De
toute évidence, les déclarations (de l'UE) visent à mettre sur le dos de la
Russie la responsabilité des problèmes de l'Ukraine à la suite des pressions
politiques exercées par l'UE sur l'Ukraine et sur d'autres pays dans le cadre
du partenariat oriental".
Les
relations entre la Russie et l’Ukraine n’ont pas toujours été bonnes et elles ont
atteint leur point culminant lors de l’augmentation du prix du gaz russe livré à
ce pays et la menace de couper l’alimentation. La pression de l’UE sur l’Ukraine
est au fond la bienvenue pour pouvoir rétablir des relations plus normales avec
la Russie qui souhaite une zone de libre-échange orientale. Que ce soit sur le
dossier syrien ou l’ukrainien nous sommes sur le domaine géopolitique souterrain
plus qu’économique ou humanitaire affiché.
Les
tentatives d’arracher certains pays à la sphère d’influence russe avec des
accords de partenariat de diverses formes ne sont pas toutes vouées à l’échec. Depuis 2009, l’UE tente de resserrer des liens
avec 6 pays sur la frontière est-orientale : Ukraine, Biélorussie,
Moldavie, Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan sans parler de la Turquie qui a
obtenu le statut privilégié de candidat officiel à l’adhésion à l’UE. Si l’Arménie
a décidé de rejoindre le partenariat proposé par Moscou, pour la Moldavie et la
Géorgie, on est proche de la signature et pour les autres les
négociations ne sont que gelées… l’espoir reste.
Le
sommet de Vilnius est une réunion qui
se tiendra au niveau des chefs d’Etat ou de gouvernement sous la houlette du
président permanent du Conseil européen, à ses côtés le président de la
Commission européenne, la cheffe de la diplomatie européenne Catherine Ashton,
le président du parlement européen et en principe, les chefs des 28 Etats de
l’UE. L’UE va y jouer serré avec la Russie car il ne faut pas heurter de plein
fouet un pays dont on a besoin pour l’approvisionnement gazier. La politique d’encerclement
de la Russie sur le plan économique n’en est pas moins une tactique d’affaiblissement
d’un pays aux énormes ressources pétrolières, gazières et minières qui reprend
une grande place dans les économies mondiales.
Même dans le cadre de l’UE, la lutte géopolitique
des USA contre le reste du monde, avec l’emprise militaire de l’OTAN et la future
zone de libre-échange transatlantique, sera présente à ce sommet. C’est un
nouvel épisode de la mondialisation, instrument de la gouvernance mondiale que
les puissances financières et économiques appellent de leurs vœux. Nous vivons
une curieuse période où l’UE étend ses tentacules et, dans le même temps l’Ecosse
présente le mode d’emploi d’une possible indépendance. Nous vivons une
dangereuse période où des bruits de guerre se font entendre en Asie et où deux
bombardiers américains B-52 ont pénétré dans la zone controversée de défense
aérienne mise en place par la Chine, sans en référer à Pékin, selon des
responsables américains mardi.
Les petites saynètes
de diversion jetées en pâture au peuple,
Comme la
grande réforme fiscale qui accouchera d’une souris,
Nous masquent
les grands enjeux d'un nouveau monde
Qui se joue
devant nos yeux embués !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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