Nous sommes dans la mouïse et chacun de rejeter la faute sur les autres. La France reproche à l’Allemagne son blocage des moyens de financement des états, celle-ci nous traite d’état cigale. Tout le monde s’accorde pour attaquer les banquiers sans lesquels rien de tout cela, soi-disant, ne serait arrivé. Les états ne trouvent plus de financement à taux raisonnable et leur dette s’alourdit constamment. Ils accusent les agences de notation. Les citoyens voient arriver le spectre de la diminution de leur pouvoir d’achat pendant que les multinationales et les puissances financières font de colossaux bénéfices. Tout le monde accuse tout le monde.
Les politiques se justifient sur le dos de la crise mais la crise d’où vient-elle finalement ? Des banquiers ? Des puissances financières ? Des états ? Des trois mon général, même si le nouvel ordre mondial, nébuleuse des puissances de l’argent, peut en être considéré comme le moteur. Car ce sont eux qui tiennent les banques et les états, simples jouets entre leurs mains. C’est eux qui poussent aux conflits militaires et économiques, c’est eux qui veillent à la mise sous tutelle voire à l’élection des chefs d’état.
Il n’est que de lire les propos de Danielle Mitterrand pour s’en convaincre. Le nouvel ordre mondial dirige le monde. Ceci étant, la mise en œuvre de la santé économique d’un état appartient à ses dirigeants. Certains états résistent donc mieux que d’autres à cette pression s’ils s’appuient sur le peuple qui peut alors servir de frein à leurs dérives. C’est toute l’importance de la démocratie, elle peut échapper au contrôle extérieur. La condition impérative, pour qu’elle joue son rôle, est de lui demander son avis sur les grandes décisions et de les respecter.
La France et l’Europe sont en train de l’oublier en s’éloignant de leurs peuples et fatalement leur dépendance aux grands intérêts privés s’aggrave. La corde se tend entres leurs dirigeants et leurs peuples dont la capacité d’absorption a des limites. Le franchissement de celles-ci peut conduire jusqu’à la guerre civile dans des pays où l’écart entre les plus riches et les plus pauvres ne cesse de grandir.
Cette « crise » qui n’en finit pas depuis 2007 semble résister à toutes les recettes. Depuis deux ans on nous promet une sortie, or nous nous enfonçons. Ni les Etats-Unis, ni l’Europe ne trouvent la bonne recette. Et s’il n’y avait pas de recette miracle ? La croissance à tout prix selon la Fed a mis sur le marché 5.000 milliards de dollars (3.700Mds€) depuis la crise et cela ne semble pas suffire. La zone euro ne sait quoi inventer pour trouver de l’argent de sauvetage des pays en difficulté pour ne pas dire en quasi-faillite. On est prêt à abandonner toute souveraineté pour faire risette aux agences de notation qui ne font que suivre les pulsations des marchés et de la confiance des investisseurs.
Savez-vous que, selon « The Economist », la dette planétaire est de 43.000 milliards de dollars soit 32.000Mds€ à ce jour ! La France va émarger en 2012 pour près de 1.700Mds€, l’Allemagne pour près de 1.800Mds€, Le Royaume-Uni pour 1.500Mds€, l’Italie pour 1.700Mds€, l’Espagne pour 750Mds€. Les cinq plus importants pays d’Europe totalisent près de 6.500Mds€ de dettes. Les dettes les plus importantes sont celles des Etats-Unis avec plus de 8.800Mds€ et du Japon avec 8.200Mds€.
Si la situation du Japon est particulière car la dette est détenue presque totalement par des citoyens ou des sociétés japonaises, celle des Etats-Unis est aussi préoccupante que celle de l’Europe quoique le rapport dette/PIB soit assez identique à celui de l’Allemagne. Mais c’est eux qui ont inondé le monde de monnaie papier grâce à la libre circulation des capitaux voulue par un grand nombre de pays et en particulier l’Europe.
C’est donc à un surendettement planétaire que nous assistons, un niveau de dépenses des états beaucoup plus élevé que leurs ressources le permet. Nous avons vécu depuis trente ans largement au-dessus de nos moyens. En France nous avons voulu des salaires et une protection sociale augmentant plus vite que la croissance le permettait, l’Etat a dépensé dans son fonctionnement plus que d’autres. Il s’en est suivi un endettement grandissant, l’intérêt de la dette devenant le premier poste budgétaire, une perte de compétitivité, une désindustrialisation et une délocalisation des grandes industries. L’absence d’une politique d’économie budgétaire de fonctionnement, de réformes structurelles importantes, d’investissement suffisant dans la recherche, l’innovation et les infrastructures nous met aujourd’hui dans une position de faiblesse suicidaire.
Le temps de payer la note est arrivé chez nous et dans le monde occidental. Il va falloir une dizaine d’années d’austérité, de régression du pouvoir d’achat, de plans de relance dans les secteurs de la recherche, de la formation et de l’industrie pour en sortir. L’incohérence native de l’Europe ne peut être qu’un frein à notre redressement et les deux principaux protagonistes pour l’élection présidentielle semblent ne pas avoir compris que les « mesurettes » et les appels au secours au FMI ne font qu’augmenter la dette sans proposer un véritable plan de sauvetage. Même si le remède est tardif et, sans doute du coup, trop indigeste, le Royaume-Uni semble l’avoir compris mais eux ils gèrent la livre… pas l’euro.
« Aide-toi le ciel t’aidera »
Un jeune est majeur et libre
s’il est indépendant financièrement.
C’est valable pour les états !
Claude Trouvé