Avant de quitter le
nucléaire et les attaques dont il fait l’objet, dont la dépendance à la
fourniture d’uranium, il faut savoir que la France maîtrise l’ensemble du cycle
du combustible, de la mine au réacteur, et du recyclage du combustible au
réacteur, tout en assurant le stockage des déchets radioactifs. L’uranium
transite en effet dans plusieurs types de molécules chimiques. Il faut amener l’uranium
naturel à 0,7% d’235U fissile extrait de la mine, à 4% pour son
utilisation sous forme d’oxyde dans les réacteurs. Le passage de 0,7% à 4% s’appelle
l’enrichissement et nécessite le traitement d’un gaz, l’uranium doit se
présenter sous la forme d’hexafluorure (UF6). La France maîtrise
toutes ces opérations. Elle tient d’ailleurs le troisième rang dans le monde
pour cette fabrication. En ce qui concerne le retraitement (séparation uranium,
plutonium et déchets), seuls trois pays possèdent cette technique : France
– Royaume-Uni – Japon qui a acquis la technologie française.
Enfin,
avant de brader cette industrie du nucléaire, Il faut savoir qu’elle emploie un
grand nombre de salariés. C’est environ 48.000 salariés qui travaillent sur les
installations d’AREVA et c’est 22.000 personnes qui travaillent sur les
réacteurs d’EDF pendant les arrêts de tranche. Mais l’industrie nucléaire fait
marcher tout un pan du secteur privé et c’est beaucoup plus qu’une centaine de
milliers de travailleurs qui vivent du nucléaire. Ces deux précisions montrent
l’importance de ce secteur industriel qui est de plus exportateur de réacteurs
mais aussi de services d’enrichissement et de retraitement du combustible.
Le nucléaire, comme
les énergies renouvelables intermittentes, ne produit pas de CO2. Le
seul argument, en dehors de la dangerosité, qui puisse motiver son remplacement
est le coût du kWh. Dans le cadre de la transition énergétique, le gouvernement
vient d'arrêter la Programmation pluriannuelle des investissements (PPI) dans
l'électricité dite « renouvelable ". On y trouve pour le photovoltaïque,
l'éolien terrestre et l'éolien maritime la puissance installée planifiée pour
2018 et pour 2023. Malheureusement on n’y trouve pas de chiffrage du coût des
investissements correspondants. Il faut donc se livrer soi-même à un calcul à
partir des données (peu sûres) dont nous disposons pour le coût de 1 gigaWatt
installé : 2 Mds€ pour le photovoltaïque, 1,8 pour l'éolien
terrestre, 4,8 pour l'éolien maritime. On obtient ainsi le coût du programme
arrêté pour les cinq années 2018-2023 : entre 71 et 102 milliards d'euros. Il
faut y ajouter les dépenses d'investissement à engager pour le développement du
réseau de transport de l'électricité. Comme la consommation n'augmente pas et
que le réseau actuel est suffisant, les lignes nouvelles prévues (en plus des
investissements de renouvellement) se justifient uniquement par la géographie
nouvelle des installations de renouvelables. RTE, le responsable du réseau,
estime cet investissement à 1 milliard par an, soit 5 milliards pour la période
considérée. Au total, le PPI énergétique implique donc entre 76 et 107 milliards
d'investissement, soit entre 15 et 21 milliards
par an, soit dans l’hypothèse haute l’ensemble des budgets de l’Enseignement
supérieur et de la Justice !
Pour
cet investissement, et en supposant que ces installations ne demandent aucun
entretien alors que ce n’est pas le cas, on a une énergie électrique « gratuite »
pour 20 années de durée de vie. On voit que cette gratuité demande un coût. On
va admettre que la production électrique est suffisante puisque nous sommes
exportateurs d’électricité à hauteur de 6 à 8% et que notre consommation n’évolue
plus depuis plusieurs années. Dans le PPI on voit apparaître un distinguo entre
l’éolien et le solaire photovoltaïque selon que l’on y adjoint un stockage ou
non. Il n’existe aucun moyen de stockage de l’énergie électrique autre que les
retenues d’eau en hauteur, la fabrication d’hydrogène et les batteries. La
capacité des retenues d’eau est très inférieure aux nouveaux besoins et la
fabrication d’hydrogène est très consommatrice d’électricité par rapport à l’énergie
récupérée. Les batteries pour des stockages aussi importants sont aussi très
coûteuses et le coût n’est pas fourni. On trouve dans le privé le chiffre de 600€ pour
un panneau solaire de 500W à 1000€. Donc pour une prévision de
20GW de solaire photovoltaïque avec stockage, soit 40 millions de panneaux, il
faudrait compter 24 milliards d’euros de coût supplémentaire hors coût de
remplacement des batteries.
Pour simplifier l’évaluation
du coût du kWh supplémentaire, on va se borner à considérer la puissance éolienne
et solaire comme mise en œuvre sans stockage. Que peut-on attendre de ces
puissances installées en EnRi ? Il faut tenir compte de l’intermittence de
ces énergies. On trouve, sur les statistiques énergétiques de RTE en 2015, une
puissance utile de 13,64% pour le solaire et de 23,36% pour l’éolien par
rapport à la puissance installée. On considère que l’on peut atteindre 35% pour
l’éolien en mer. Ceci nous donne, suivant les deux hypothèses basse et haute, 7,6
GW et 8,8 GW soit un investissement de 10 Mds€ et 12 Mds€ pour 1 GW de puissance
disponible. A ceci il faut ajouter, comme je l’ai montré à partir des
statistiques de RTE sur 2014-2015 (tableau ci-dessus) que 1 kWh d’EnR
(bioénergie+ éolien + solaire) nécessite la production de 1 kWh de centrale
thermique, les autres sources d’énergies n’ayant pas significativement évolué.
En admettant que la disponibilité d’une centrale thermique est de 100%, cela
veut dire qu’il faudra mettre en œuvre une puissance thermique supplémentaire
de 7,6 GW à 8,8 GW. Si l’on s’en tient aux chiffres de 2015, ceci est possible
car il resterait 18 GW utilisables dans la puissance installée de 22 GW.
Ceci veut
dire que le supplément d’EnRi conduit à un mixte obligatoire avec le thermique
avec une puissance disponible totale de 15,2 à 17,6 GW. Le taux de
disponibilité du nucléaire ayant été de 75,37% en 2015, la puissance nucléaire
installée qui peut être remplacée est de 20 à 25 GW soit 20 à 25 réacteurs de 1
GW. L’objectif de remplacement de 40% du nucléaire serait atteint mais grâce à un
mixte moitié énergies renouvelables et moitié thermique ! La puissance
thermique utilisée en 2015 étant de 3,9 GW, cela entraîne une augmentation des
rejets de polluants et de CO2 de 90 à 125% même si cela réduit
les déchets nucléaires de 34 à 43%. Les EnRi sont indirectement polluantes et
participent au réchauffement climatique s’il est toujours prouvé qu’il existe
et que sa cause est anthropique. Nos réacteurs
ont besoin d’un grand « carénage » qui coûte 1 milliard par réacteur,
donc la fermeture de 20 à 25 réacteurs économise 20 à 25 milliards à comparer
aux 76 à 107 milliards d’investissement sur les EnRi. C’est 56 à 82 milliards d’investissements
en plus. Peut-on néanmoins en espérer un abaissement du coût du kWh ? C’est
ce dont on parlera dans le prochain article.
Le plan d’investissement dans les EnRi prévu de 2018 à
2023
Entraîne une dépense de 56 à 82 milliards
supplémentaires.
Non seulement ceci est très lourd budgétairement
Mais ce plan aggrave l’émission de CO2
Et la pollution en général.
Claude Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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