lundi 9 mai 2016

L’Europe ? Cacophonie antidémocratique, antisociale et meurtrière (2ème partie)



Si le traité de Maastricht a amené l’euro dès 1999, et dans nos portefeuilles en 2002, créant une première scission entre les pays de l’UE, la Convention de Schengen, signée entre les cinq pays concernés de l’époque en 1995 dans ce village luxembourgeois, a trouvé son institutionnalisation par le traité d’Amsterdam le 2 octobre 1997. Il a délimité un territoire, communément appelé « espace Schengen », ouvert à la libre circulation des personnes et des marchandises, mais a aussi institué une coopération policière, et sur l'immigration et l'asile, dont on voit nettement aujourd’hui les implications. Mais ce traité va ouvrir une nouvelle voie de cacophonie avec des choix d’entrée laissés aux pays de l’UE mais aussi à des pays européens extérieurs à l’UE. Les accords sont aussi acquis avec des exceptions qui rendent la cohésion européenne très compliquée. Il est ainsi particulièrement intéressant de noter que la Grèce qui a adhéré le 8 décembre 1997, n'applique l'accord que dans les aéroports et les ports (principalement liaisons entre Igoumenitsa et différents ports italiens), n'ayant pas de frontières terrestres avec un autre État appliquant les accords de Schengen. De plus, ce pays n'applique pas la convention de Schengen pour les ressortissants de la République de Macédoine. On comprend aujourd’hui que le problème de la vague migratoire arrivant en Grèce met cette exception à l’ordre du jour et ne peut aboutir qu’à des décisions inefficaces. Elles ouvrent la porte à de nouvelles décisions d’exception.
A l’entrée du 21ème siècle, l’Europe des six sera passée à l’Europe des quinze en moins d’un demi-siècle. Elle est  alors profondément occidentale et nordique. Le traité de Maastricht et celui d’Amsterdam l’ont marquée par deux évènements majeurs, un espace territorial partiel de libre circulation des personnes et des marchandises, mais aussi une libre circulation des capitaux cette fois au sein de toute l’UE. Ce dernier point a peu intéressé les citoyens, c’est pourtant un point capital, si je puis dire. Le Royaume-Uni y est inclus, hors euro et hors espace Schengen. Pour la grande finance new-yorkaise et la City, le reste importait peu. A ce stade on sent déjà que la coordination, entre d’une part les pays de culture hanséatique au nord, et d’autre part ceux de culture catholique et méditerranéenne au sud, ne va pas être facile. Cette dernière a d’ailleurs été symbolisée plus tard par le surnom de pays du club Med. Il faut noter que la France occupait alors une partie centrale de l’UE lui donnant un pouvoir géographique indéniable.  L’Allemagne au contraire, en phase finale de digestion de sa réunification et en possession d’un euromark fort, visait l’extension de l’UE vers l’est pour trouver des débouchés économiques et de la main-d’œuvre bon marché dans son aire germanique, et se repositionner en place centrale de l’Europe. Berlin voulait redevenir l’Aix-la-Chapelle de Charlemagne. 

L’UE, qui n’avait pas réussi une union monétaire complète avec l’euro, n’avait pas perdu son envie d’agrandissement qui s’est concrétisée dans le traité de Nice du 26 février 2001. Signé par les quinze pays de l’UE, il est passé à tort un peu dans l’oubli. Il fixa pourtant les principes et les méthodes d'évolution du système institutionnel au fur et à mesure que l'UE s'élargissait avec l'entrée des Pays d’Europe centrale et orientale (« PECO »). Les modalités de prise de décision au sein des institutions ont dû faire l'objet d'adaptations. Une nouvelle répartition des voix attribuées à chaque État au Conseil, ainsi que la définition d'un nouveau calcul de la majorité qualifiée, ont paru nécessaires au bon fonctionnement de cette instance décisionnelle menacée déjà de paralysie. Le calcul de la majorité qualifiée au sein du Conseil de l’Union Européenne est changé ainsi que le nombre maximal de 732 de députés du Parlement européen et la composition de la Commission européenne. Ce traité marque le départ vers l’inconnu d’un élargissement sans limite, dont nous voyons aujourd’hui le résultat, vers lequel nous pousse l’OTAN jusqu’aux frontières de la Russie. Il marque aussi la volonté non-démocratique inculquée aux dirigeants des principaux pays.  Le traité de Nice et l'élargissement ont fait l'objet d'un référendum en juin 2001 en Irlande. Les Irlandais avaient alors dit « non » le 9 juin ; après un second référendum, ils ont finalement ratifié le traité. Votez « oui » quand on vous dit de voter « oui », cela fera gagner du temps ou alors on se passera de référendum.

Il est notable que la France n’a pas demandé de référendum alors que le traité de Nice signe sa perte d’influence future. Il s’agit de l’une des erreurs majeures de la troisième cohabitation entre Jacques Chirac et Lionel Jospin. Non seulement l’UE va basculer dans des difficultés de convergence d’opinions et va perdre tout crédit en politique étrangère. Trois nations vont alors chercher à s’imposer, le Royaume-Uni avec la finance, la France avec son influence méditerranéenne et africaine, et l’Allemagne avec une monnaie adaptée à son économie. Les Etats-Unis vont, par la suite et jusqu’à aujourd’hui jouer sur ces trois registres. La volonté d’élargissement se concrétise dans le traité d’Athènes signé le 16 avril 2003 après le vote du Parlement européen. Elle autorise l’adhésion de dix nouveaux pays qui va s’échelonner de 2003 à 2015 : la Pologne (2003), la République tchèque (2004), la Hongrie (2004), la Slovénie (2007), les îles méditerranéennes (2008) de Malte et de Chypre, y compris la zone sous contrôle turque ( ! ), la Slovaquie (2009), l'Estonie (2011), la Lettonie (2014), la Lituanie (2015).

Le décor du futur de l’UE venait de s’écrire. Sans pouvoir politique, sans défense, l’UE entendait s’étendre dans une mondialisation sensée pacifique. Mais la politique hégémonique américaine est déjà à l’œuvre. Le 10 juin 1999, le Conseil de sécurité des Nations unies adoptait la résolution 1244 mettant fin à la guerre au Kosovo et aux bombardements de l'OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie (RFY). Le même jour, lors d'une rencontre à Cologne, les ministres des affaires étrangères de trente-huit pays et quinze organisations internationales, répondant à un appel de l'Union européenne, approuvaient le Pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est, marquant ainsi le début d'une nouvelle phase de la politique internationale à l'égard des Balkans. Destiné à coordonner les acteurs et programmes impliqués dans les Balkans (Union européenne, OTAN, Organisation pour la coopération et la coopération en Europe (OSCE), Fonds monétaire international (FMI), Banque mondiale, pays donateurs et organisations non-gouvernementales), le Pacte était ouvert à tous les pays de l'Europe du Sud-Est, à l'exception de la République fédérale de Yougoslavie dirigée à l'époque par Slobodan Milosevic et composée de la Serbie et du Monténégro. Ceci aboutit à la mainmise américaine sur cette région balkanisée par le biais du FMI, et de l’OTAN qui implanta la base militaire Camp Bondsteel, au Kosovo. Cette base, qui peut accueillir jusqu’à 7.000 hommes, a été soupçonnée par ailleurs d’être un mini Guantánamo de la CIA.

Dès la fin de la guerre des Balkans, Georges Soros et ses ONG, le milliardaire américain financier des révolutions dites « colorées » soutenues par le Département d’État américain, étaient à l’œuvre, ainsi que le CFR de New-York, cercle d’influence créée par les Rockfeller et ses amis banquiers, JP Morgan en tête, durant les négociations de paix de Versailles en 1919 afin de coordonner la politique étrangère globale anglo-américaine. Il fait partie de la triade du Nouvel Ordre Mondial (Bilderberg, Trilatérale, CFR). L’implantation de l’OTAN au cœur de l’Europe du Sud-Est ne faisait que commencer. C’est aussi les prémices de la violation de l’accord signé par Gorbatchev au nom de l’URSS qui stipulait le décrochage des républiques soviétiques de la fédération de Russie avec la contrepartie d’un non accès de l’OTAN aux pays limitrophes de la Russie. Avec l’entrée, prévue bien que non encore réalisée, des trois pays baltes, Estonie, Lettonie, Lituanie, la frontière de la Russie était atteinte ainsi que son enclave de Kaliningrad en Lituanie. Par ailleurs dès 2004, les écarts entre les économies des différents pays ont recommencé à se creuser. Les politiques nationales menées sacrifiaient à la dette publique et le taux de chômage frisait toujours les 10% en France. A l’extérieur la guerre d’Irak, déclenchée par Bush sur un prétexte mensonger, complétait la vision hégémonique de la politique américaine qui entendait s’implanter économiquement et militairement en Irak, et maîtriser tout le Golfe Persique. Pour la dernière fois sans doute, la France affichait sa souveraineté en refusant d’y participer.
  
Tout ce qui s’est passé ensuite et dont nous parlerons prochainement était en train de s’écrire. L’Union Européenne allait devenir un espace de juxtaposition de pays, guidés par une politique étasunienne, vers un fédéralisme non assumé par les peuples, mais terrain de jeu des banquiers et des multinationales qui feront plier les gouvernements, et de l’OTAN qui enverra notre pays dans ses guerres pour la « démocratie (?) » et finira par s’implanter partout en Europe toujours plus près de l’ennemi diabolisé russe. L'Empire européen mal ficelé se préparait à se fissurer au premier séisme.

On ne peut voir clair dans le jeu des nations 

Sans se pencher sur l’histoire récente.

On lit alors comme dans un livre 

Tout ce que l’on nous cache,

Les vrais buts visés ! 

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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