Le 3 décembre 2014, le conseil des ministres allemand a adopté un plan
d'action qui doit permettre au pays d'atteindre ses objectifs de réduction de CO2
d'ici 2020, en combinant économies d'énergie, limitation du recours au charbon
et mesures ciblées dans les transports. Si l'Allemagne, première économie
européenne, continuait au rythme actuel, elle manquerait de six à sept points
son objectif de réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre entre
1990 et 2020. Avec le programme adopté le pays veut combler la différence,
c'est-à-dire générer, d'ici 2020 au moins, 62 millions de tonnes
supplémentaires de réductions d'émissions de dioxyde de carbone.La plus
grosse contribution à ces réductions (25 à 30 millions de tonnes) viendra de
mesures d'efficacité énergétique, par exemple grâce à des incitations fiscales
à la rénovation du parc immobilier pour économiser du chauffage et de l'eau
chaude.
Le chiffre finalement retenu se traduit par une réduction annuelle de
4,4 millions de tonnes, sur un total de rejets de CO2 d'environ 300 millions
tonnes par an de la génération d'électricité. Pour beaucoup d'associations
écologistes et pour l'opposition verte, qui réclament une sortie complète du
charbon, le plan du gouvernement est beaucoup trop timoré à cet égard.
Ailleurs, le transport devra réduire ses émissions de sept à dix millions de
tonnes, par le biais notamment d'une augmentation des tarifs du péage pour les
camions les plus polluants. Les automobilistes auront droit à des formations à
l'usage économe de carburant. L'agriculture sera elle aussi mise à contribution
sous forme entre autres de restrictions à l'utilisation d'engrais.
On notera le faible impact de la production électrique sur la réduction des
Gaz à Effet de Serre (GES) avec seulement 7% du total prévu. Ceci contraste avec
le développement des énergies renouvelables (EnR) annoncé. La totalité de la
production d'électricité nucléaire peut être remplacée dès 2020 par de
l'électricité d'origine renouvelable, avant la date d'arrêt des derniers
réacteurs prévue en 2022, puisque la production d'électricité renouvelable
augmentera entre 108 et 180 TWh selon les projets. Celle-ci a déjà augmenté de
52,6 TWh entre 2010 et 2014 (de 104,8 à 157,4 TWh), alors que le nucléaire a
reculé de 43,7 TWh. On peut y voir là la résistance des propriétaires des centrales
au charbon et la nécessaire compensation par les énergies combustibles à l’intermittence
des EnR. L’essentiel du gain sur les GES
viendra des réductions obtenues sur le parc immobilier et le transport. Les EnR
n’y seront pas pour grand-chose.
A titre
indicatif, la proportion d’électicité consommée à partir du charbon et du
lignite est en augmentation de 8% et est passée de 42,7% en
2010 à 46,1% en 2014. On voit bien que l’introduction des EnR n’entraîne pas
une diminution des GES émis, bien au contraire, les centrales au charbon étant
les plus polluantes. Comme par ailleurs le coût des EnR est largement supérieur
au coût du KWh nucléaire, en particulier pour l’énergie photovoltaïque, le
choix énergétique allemand ne paraît être ni économiquement justifié ni
répondre à un but de de diminution des GES. C’est un but politique pour suivre
la demande écologiste, forte en Allemagne. L’Allemagne, engagée réellement dans
les EnR depuis 2000, a fait le choix en 2011 de sortir complètement et
définitivement de la technologie nucléaire pour sa production d’électricité
d’ici 2022 tout en souhaitant valoriser massivement les énergies renouvelables
éolienne et photovoltaïque.
Il s’avère que le coût à payer par l’Etat, et finalement le
consommateur, est beaucoup plus élevé qu’en France (en 2012 338,75 $/MWh
en Allemagne contre 174,77 $/MWh en France, soit près de 2 fois plus).
Par ailleurs si l’impact sur les GES de la politique allemande lui a fait
gagner sur le contenu carbone de la production d’électricité jusqu’en 2010, l’augmentation
du pourcentage d’énergie thermique, surtout par le charbon et le lignite, se
fera obligatoirement sentir à moins que la production totale baisse. La
diminution des GES n’est pas, et ne peut pas être obtenue par la politique des
EnR, contrairement à ce que laisse croire le plan énergétique allemand, mais
ailleurs (parc immobilier, transports, etc.). Le seul gain possible est de
remplacer les centrales au charbon par des centrales au gaz moins polluantes.
En raison d’une structure économique et sociétale différente, la situation
énergétique de la France et de l’Allemagne est actuellement très contrastée. A
ces éléments s’ajoutent des choix historiques de stratégie énergétique
différents, en particulier pour la production électrique : la France a
choisi de se tourner vers la technologie nucléaire dès les chocs pétroliers des
années 1970, tandis que l’Allemagne a privilégié les sources fossiles (gaz,
charbon, lignite, fioul) pour assurer sa production électrique. Cela conduit à
dessiner deux panoramas énergétiques bien distincts de part et d’autre du Rhin,
ce qui se reflète par des émissions de GES allant du simple au
double entre la France et l’Allemagne. J’ai pu constater de visu combien l’air été chargé dans les régions où les fermes d’éoliennes et
les centrale thermiques allemandes sont associées. Il en est de même en
Pologne. Ne nous étonnons pas de voir la région Lilloise et Paris envahis par
des particules fines par vent d’Est.
L’Allemagne a déjà dépensé des centaines de milliards pour développer les
EnR mais son électricité est l’une des plus chères du monde pour un impact sur
les GES qui ne peut être que négatif. L’arrêt du nucléaire ne répond donc qu’à
une politique non pas écologique mais écologiste. La dangerosité des centrales
nucléaires n’a nullement été prouvée en France et le Royaume-Uni relance le
nucléaire. On ferait bien en France d’éclairer les électeurs sur l’erreur
économique de nos amis allemands et cesser de faire croire à nos concitoyens
que la solution est dans les EnR avec arrêt, même partiel, du nucléaire. Même si,
comme le pense un nombre grandissant de scientifiques, les GES n’ont qu’un
impact dérisoire sur le réchauffement de la planète, il n’en reste pas moins
que ces EnR ne diminuent pas notre indépendance (concurrence industrielle de la
Chine, terres rares, etc.) et s’avèrent un gouffre financier… que l’Allemagne peut
encore se permettre, pas nous !
Il serait triste pour la France que
l’expérience allemande
N’ouvre pas enfin les yeux de
nos concitoyens
Sur l’erreur de leurs choix
énergétiques !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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