samedi 12 juillet 2014

Ecotaxe encore un impôt de plus… et des routes bloquées ?




L’Écotaxe revient remaniée après les manifestations bretonnes. Ségolène Royal a proposé sa « Ségotaxe », rebaptisée « péage de transit », au Parlement pour un essai virtuel en octobre et une mise en œuvre au 1er janvier 2015. A l’heure où le gouvernement se fait fort de diminuer les charges des entreprises, il continue à augmenter la pression fiscale. La taxe pour pollution a bon dos ! «Ça n'a rien à voir avec le transit, c'est le transport routier français qui est touché, et notamment le transport de proximité», a déclaré Nicolas Paulissen, délégué général adjoint de la FNTR (Fédération Nationale des Transports Routiers), qui dénonce une «rupture de l'égalité territoriale, avec des régions très touchées et d'autres pratiquement exonérées de l'écotaxe nouvelle mouture». 

Du côté des organisations professionnelles de routiers, la déception est grande. «Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une fiscalité supplémentaire pour les entreprises.  Ils changent le nom et la forme mais ça reste une taxe qui va peser sur le déficit de compétitivité dans un contexte de crise économique. En réalité, c’est le retour de l’écotaxe. Et elle s’ajoute à d’autres mesures comme le compte pénibilité qui irrite fortement les PME et les TPE et qui doit aussi entrer en vigueur en 2015 », soulignait dimanche Nicolas Paulissen. De son côté, l'Organisation des transporteurs routiers européens (Otre) a prévenu lundi : " Il n’est pas question que les transporteurs routiers français soient obligés de s’acquitter d’une taxe dont les recettes serviront quasi uniquement à rémunérer la société Écomouv". 

Évidemment les bérets rouges ne sont pas en reste. L’un de ses porte-paroles déclare : "Je crois que la copie est encore à revoir. Il faut trouver d'autres moyens. Ce n'est pas une véritable remise à plat". Pourtant à part l’A84 de Nantes à Saint-Lô, la Bretagne est épargnée. Quant à la Confédération française du commerce de gros et international (CGI), son Président s’exprime ainsi : "cette écotaxe-bis représentera un véritable casse-tête commercial et administratif. Elle (va) peser lourdement sur la chaîne de production et de commercialisation des productions françaises avec un effet mécanique sur les prix, sans permettre de soutenir la production française face à la concurrence étrangère." 

Le péage de transit poids lourds met en œuvre le principe de l’utilisateur/payeur et du pollueur/payeur. Il concernera les poids lourds de plus de 3,5 tonnes circulant sur un réseau de 4 000 kilomètres de routes nationales et locales, au lieu des 15.000 kilomètres prévus initialement, qui supportent un important trafic (plus de 2 500 poids lourds par jour) qui est pour une large part international. Les axes routiers concernés complètent ainsi le réseau concédé. En seront exonérés les véhicules et matériels agricoles, les véhicules dédiés à la collecte du lait, les véhicules forains et de cirque. Les transporteurs en compte propre, comme, par exemple, les coopératives agricoles, pourront faire figurer en bas de leur facture les charges supportées au titre du péage de transit poids lourds. 

Le dispositif repose sur le principe d’une tarification en fonction des kilomètres parcourus, du niveau de pollution et du nombre d’essieux des poids lourds. En pratique cela signifie que les camions de plus de 3,5 tonnes doivent être équipés d’un boitier GPS dès lors qu’ils empruntent ce réseau. Ce boitier GPS détermine la position du camion, calcule le nombre de kilomètres parcourus et facture en conséquence. Les portiques seraient conservés pour détecter les camions non équipés de GPS. Le barème repose sur un taux moyen de 13 centimes d’euro par kilomètre et dépend du niveau d’émissions et du nombre d’essieux du véhicule. 

Il est supposé rapporter chaque année 550 millions d’euros à l’État au lieu des 1,2 milliards escomptés avec le précédent dispositif. Mais celui-ci se trouve débiteur de 850 millions envers la société Ecomouv, qui gère le système et la redevance, si la nouvelle Écotaxe n’est pas mise en place en 2015. Il lui faudra néanmoins dédommager la société de toutes façons pour un montant non encore précisé mais du même ordre de grandeur, au titre d’un dédommagement exceptionnel pour 2014, et verser un « loyer » annuel de 220 millions à cette société selon Matignon. La société Écomouv' est contrôlée pour 70% par Autostrade per l'Italia. Les autres actionnaires sont les sociétés Thales qui détient 11 % du capital, SNCF 10 %, SFR 6 % et Steria 3 %. Cette société bénéficie d'un partenariat public-privé (PPP) pour percevoir la redevance poids-lourd, qu'elle a gagné face à Alvia après quelques aléas de soupçon de corruption. 

L’affaire est donc loin d’être terminée et va coûter fort cher à l’Etat. Celui-ci n’exclut pas de prélever une nouvelle redevance sur les autoroutes pour tous les passages, ce qui ne manquerait pas de se répercuter sur l’usager. Seulement cette ponction peut s’avérer difficile selon l’Association française des sociétés d’autoroutes : "Pour les taxer davantage afin de compenser le manque à gagner qu’a suscité le report de l’écotaxe, il faudrait modifier le contrat de concession qui lie ces sociétés privatisées à l’État. Une telle modification impliquerait que l’État leur verse des compensations financières". L’État envisage également une prise de participation dans le capital de la société, via la Caisse des dépôts, pour récupérer d’une main ce qu’il donne de l’autre et pour soi-disant « contrôler le dispositif ». 

D’ici septembre la FNTR dit vouloir négocier avec les pouvoirs publics sur la «suppression» ou la «révision complète» du dispositif et veut y ajouter un «alignement de notre règlementation sociale sur la règlementation européenne». Un mouvement de grève et de blocage routier en septembre sera alors ou non voté au vu des résultats de cette négociation. Voilà encore une affaire bien mal engagée et dans laquelle le gouvernement et le précédent ne brillent pas par leur bonne gestion. 

Qui d’entre nous imaginerait une action écologique 

Qui ne diminuera pas la nuisance de pollution, 

Mais va coûter finalement très cher à l’État, 

Menacer de paralyser les routes du pays, 

Qui augmente le coût du transport, 

Et va racketter l’automobiliste ? 

Aucun d’entre nous ! 

Eux le font ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon



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