J.C Juncker, Président De la Commission Européenne,
n’avait pas l’air d’un gagnant mais d’un perdant lors de son intervention à
Bruxelles à la mi-journée. Il donnait l’impression de faire le bilan de son
action avant de quitter la place. Son intervention est lancée vers les grecs
pour les persuader de voter OUI aux propositions des créanciers. Elle était
pitoyable. Alors que les grecs réclament seulement d’avoir une dette moins
lourde à supporter et font leur affaire du reste, on leur inflige un niveau de
mesures d’austérité devenu insupportable. L’UE ne veut pas écouter la Grèce,
elle négocie mais pour imposer son diktat. La troïka (UE, BCE, FMI), qui a
écrit le scénario de la tragédie, ne passera pas à la postérité comme le trio
grec Sophocle, Euripide et Eschyle. La mise à mort de la démocratie grecque va se
transformer en un coup de poignard dans le dos des parricides de cette même
démocratie. Que vient faire ce Président de Commission, qui n’est pas élu par
les peuples et est un simple technocrate coopté et payé grassement ? Il
dit avoir consacré sa vie à l’Europe, mais pourquoi les luxembourgeois l’ont-ils
mis dehors comme Premier Ministre ? A cause d’opérations personnelles frauduleuses !
L’UE prépare sa mort par l’incapacité des politiques
et des technocrates à gérer un ensemble mal bâti, avec un esprit peu tourné vers le
Bien commun, mais centré sur le pouvoir et l’argent et peu enclin à s’appuyer
sur la démocratie. On les voit aujourd'hui tous les uns après les autres, sentir le vent du
boulet, les Sarkozy, Hollande, Moscovici, Juncker, etc. et se fendre de
déclarations de catastrophisme pour les grecs, et de propos humiliants pour ceux-ci.
Un petit pays affronte une énorme meute de loups féroces dont la force tient à
la puissance de l’argent et à l’hégémon américain. Courageusement les députés
grecs ont approuvé ce week-end du 27 et 28 juin la proposition du gouvernement
d'organiser le 5 juillet prochain un référendum concernant le plan d'aide au
pays. Les pronostics sont ouverts quant à l'issue pour la zone euro, mais cette
fois la peur change de camp. Si les grecs votent NON au nouveau plan
d’austérité, tout l’édifice de l’Union Européenne est en danger. La meute
susurre que les négociations peuvent reprendre alors que lorsque Tsipras a fait
part de son intention de faire un référendum, elle a tenu ensuite une réunion
sans la Grèce, l’excluant de fait.
Toutefois à
lire les propositions soumises à Tsipras, on peut se demander dans quelle
mesure les Européens n’ont pas tout fait pour rendre le recours aux urnes
inévitable. L’offre d’une aide de 12 milliards d’euros en 2015 est
notoirement insuffisante pour remettre la Grèce sur les rails et elle organise
l’insolvabilité du pays. Elle ne servira qu’à rembourser les créanciers et ne contient pas la moindre liquidité pour
l’Etat. De plus la longueur des négociations a obligé la Grèce à des emprunts
d’attente supplémentaires. Autrement dit, les Européens ont fini par proposer
aux Grecs de l’argent pour se rembourser eux-mêmes, à charge pour les Grecs de
se débrouiller pour survivre. En contrepartie de cette solution minimaliste,
les Grecs doivent entreprendre des réformes sanglantes : une TVA sur la
restauration à 23%, des coupes sombres dans les retraites et un excédent
budgétaire massif. Tsipras n’a évidemment aucun intérêt à accepter cette offre
léonine qui semble préparer un Grexit voulu par l’Allemagne. Depuis le mois de
février, le ministre allemand des Finances, le cruel Schaüble, soutient qu’un
« Grexit » serait un bien plutôt qu’un mal, et qu’il ne comporterait
que très peu de conséquences négatives pour la zone euro. La déclaration de
Hollande ce midi va dans le même sens puisqu’il affirme que la sortie de l’euro
n’aurait aucun effet sur la zone euro donc la France.
Quelle leçon peut donner la France alors qu’elle
présente toujours un déficit du budget primaire (hors remboursement des
intérêts de la dette) alors que la Grèce propose un excédent de 1%, lequel est
jugé insuffisant par la meute ? Quelle leçon de solidarité peut donner
l’Allemagne qui est le pays de l’UE dont l’excédent commercial énorme de plus
de 200 milliards se fait au détriment de l’ensemble des autres pays ?
Quelle leçon peut donner Obama qui demande de tout faire pour garder la Grèce
au sein de l’euro alors qu’il n’y voit que son intérêt, celui de disposer d’une
UE centralisée, politiquement faible, sans réelle puissance militaire
organisée, donc facilement manipulable ? Sans prendre même la peine de se
cacher derrière l’OTAN, les USA renforcent leur implantation militaire sous
prétexte d’invasion imminente de l’ours russe et vont contraindre l’UE à signer
le Traité de libre-échange avec eux. 250 chars américains se déploient dans
l’UE aux frontières russes sans tambour ni trompette. L’UE ne dit rien et
renforce les sanctions contre un pays ceinturé toujours plus près jusqu’à
l’étouffement.
Mais la Grèce a une position particulière et
stratégique au sud-est de l’Europe. La Grèce est devenue un enjeu stratégique
pour les USA et aussi pour l’URSS. Pour les USA la Grèce fait partie de l’OTAN
et se doit de lui offrir l’accueil de bases terrestres et maritimes. Pour
l’URSS c’est un pays en souffrance donc à l’écoute de propositions de
coopération sur l’écoulement des ressources gaz et pétrole russes ainsi que la
possibilité pour la marine russe de stationner en Méditerranée. La Grèce est un
enjeu géostratégique majeur pour l’hégémon américain et pour le désenclavement
russe. Tsipras a pris tous les risques en allant traiter à Moscou le contrat
sur le gazoduc passant sur son territoire, mais il détient une carte majeure.
Le petit poucet grec risque fort de marquer
l’histoire de l’Union Européenne, le problème de l’euro étant presque
secondaire désormais. L’euro ne va d’ailleurs bientôt plus faire le poids entre
le dollar et la montée du yuan au sein des BRICS. L’euro n’a d’ailleurs déjà
plus la même valeur partout dans l’UE puisque les Etats endettés ne s’en
procurent pas au même taux d’intérêt chez les investisseurs traditionnels, taux
faibles pour les forts, taux forts pour les faibles. Mais contrairement aux
discours rassurants des politiques, la pression extrême sur la Grèce aura renforcé
le sentiment anti-euro dans ce peuple et poussé à sa sortie de l’euro
maintenant ou plus tard mais devenue inexorable. Les pays en difficulté vont
accentuer leurs demandes d’aides, comme l’Espagne où Podemos demande un
allègement de l’austérité. Le clivage entre nord et sud va s’accentuer car les
intérêts divergent de plus en plus. C’est désormais l’éclatement de l’UE qui
est une possibilité qui s’ouvre devant nous et peut-être, si une nouvelle
Europe voit le jour, le devrons-nous à cet homme jeune, traité d’irresponsable,
qui a osé s’opposer à la meute des créanciers et des politiques serviles.
Il
était difficile de prévoir quand l’UE tanguerait sur ses bases.
2015
sera bien l’année de sa remise en cause.
Grexit,
Brexit, sont autant de menaces
Et
un nouveau référendum
Ne
pourra plus être…
Truqué !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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