A deux ans de la fin de son
quinquennat, avec une cote de confiance de 20%, un budget devant se plier à
l’austérité allemande, et une furieuse envie de rempiler, François Hollande se retourne
vers les réformes qui ne coûteront rien à l’Etat. Elles sont censées lui
ramener son électorat socialiste de base et grappiller celui plus facile de la
jeunesse qui ne traîne pas avec lui des dizaines d’années de déceptions. Il a
donc choisi la réforme de l’enseignement, et de la santé. Malheureusement les
choses ne se présentent pas bien, non pas que ces réformes ne seront pas
finalement votées puisqu’il dispose d’une majorité théorique à l’Assemblée
Nationale, mais ça renâcle au parti socialiste et dans l’électorat de
l’Education Nationale.
L’opposition
s’est emparée évidemment de l’aubaine sans apporter des solutions originales et
n’ayant pas prouvé dans les réformes de l’enseignement que nous avions
progressé ou, s’il y a eu mouvement, il s’agit de recul. Dans ce domaine toute
éventualité de réforme se traduit toujours par une demande d’augmentation du
personnel par les syndicats d’enseignants. Si ce préalable n’est pas franchi,
la réforme ne peut passer qu’au forceps et est suivie de grèves à répétition. Or
cette fois les budgets sont ric-rac. Il faut donc se battre sur le fond en
terrain découvert. Le processus de concertation ayant été délibérément
court-circuité, les belligérants arrivent armés. Le Haut Conseil des programmes
a pondu sa logorrhée habituelle traduite dans des termes abscons ce qui ne
facilite pas la compréhension des citoyens.
Cela fait des dizaines
d’années que l’enseignement souffre de réformes incessantes que le corps
enseignant a essayé de digérer tant bien que mal. Il vient s’ajouter d’année en
année une modification de notre société où la présence parentale auprès des
enfants diminue et où l’éducation d’un nombre croissant d’enfants nécessite
d’être largement complétée à l’école. Le temps consacré à l’éducation croît au
détriment de l’enseignement. Le manque d’éducation se traduit par une
indiscipline qui pollue le passage du savoir. Si l’on ajoute une hiérarchie de
plus en plus administrative et ignorante des difficultés de l’enseignement,
plus une difficulté croissante de recrutement, on voit que bien des raisons de
baisse de la qualité de l’enseignement ne sont pas inhérentes aux programmes
sans cesse remaniés. Il faudrait plutôt agir d’une part du côté de l’autorité
et de la qualité des enseignants qui baisse avec une diminution des candidats,
d’autre part dans les cursus proposés aux enfants pour mettre en concordance
leurs qualités et les besoins des métiers.
Le
constat de l’échec de l’Education Nationale est dramatique, c’est vrai. Les
derniers constats de celle-ci nous disent que le niveau des élèves les plus
doués, soit environ 1 sur 10, n’a pas baissé. On sait que ces enfants n’ont
besoin que d’un guide pour leur indiquer ce qu’ils doivent savoir, ils peuvent
ensuite se débrouiller seuls. L’enseignant est là surtout pour les autres. Réalisée
tous les 6 ans par le ministère, l’enquête affirme que le pourcentage d'élèves
de 3ème ayant un "faible ou très faible" niveau en maths est passé de
15 % en 2008 à 19,5 % aujourd'hui. En clair, 1 enfant sur 5 en 3ème n'est pas
capable de résoudre un problème de CM2… Le plus inquiétant est l’évolution
négative à laquelle nous assistons car nous savions déjà par l’enquête mondiale
PISA que nos moins de 15 ans ne plaçaient plus la France dans les premiers pays
du monde.
Malheureusement nous allons
avoir encore une réforme mal préparée, mal médiatisée et qui se base sur une
notion idéologique d’égalitarisme qui ne fera que nuire au temps consacré par
les enseignants aux élèves moyens qui sont les plus nombreux et pour lesquels
l’enseignant est absolument nécessaire. Dès l’enfance les qualités
intellectuelles, manuelles et artistiques prédestinent l’enfant à un
enseignement adapté pour certains types de métiers. S’il y a des connaissances
fondamentales à acquérir il y a des manières et un timing différent dans
l’enseignement à appliquer selon les enfants. C’est là que le collège unique et
la propension à vouloir que tout le monde apprenne de la même façon, les mêmes
programmes et au même moment, auquel on associe une tendance à supprimer
l’évaluation périodique, défient le bon sens.
Sans critère de choix avec
des passages obligés trop longs dans la scolarité et des possibilités de
bifurcation insuffisantes et souvent dévalorisées à priori, nous aboutissons
aux bac(s) pour 80% des élèves, grâce à une surévaluation des notes. Les bac(s)
ont des valeurs très différentes et certains ouvrent des métiers auxquels les
élèves auraient pu aspirer bien avant en passant par l’apprentissage. Les
universités regorgent d’étudiants qui ont tellement de mal à passer la première
année que le niveau doit aussi être abaissé. Ceci ne nous conduit qu’à une
baisse de qualité générale et des étudiants bac+5 qui ne trouvent pas de
travail.
Ce n’est pas les
aménagements d’horaires, les matières étudiées par thème et les groupes de
travail multidisciplinaires qui changeront significativement le niveau des
élèves. Il est un âge où l’on doit savoir, lire et compter. Pour les plus doués
c’est un acquis en cours préparatoire, pour d’autres ce sera au cours moyen
mais il est inadmissible qu’en sixième 25% des enfants ne comprennent pas ce
qu’ils lisent ou ânonnent. Ils n’ont rien à faire dans le type d’enseignement
proposé auquel ils sont dès le départ désadaptés. Pour eux il faut leur ouvrir
d’autres voies, d’autres types d’apprentissage du savoir, d’autres centres
d’intérêts ou la réussite les poussera alors vers le haut, c’est-à-dire
l’exploitation maximum de leurs qualités. C’est d’abord sur l’école primaire
que doit commencer la réforme, par la base des acquis fondamentaux.
Notre ministre de
l’Education Nationale, bon chic bon « genre » et qui marche dans les
traces de son prédécesseur Peillon, est à la merci des hauts fonctionnaires de
son ministère. Elle va non seulement rater l’objectif de monter globalement le
niveau des élèves mais aussi celui de réduire les inégalités devant l’accession
à un métier. L’image de l’enseignement public s’en trouvera affecté et les
parents qui le peuvent se retourneront un peu plus vers l’enseignement privé
plus élitiste. Il faut bien voir que l’égalitarisme ne veut pas dire que tous
les enfants ont droit au même enseignement. L’égalité des chances c’est la
probabilité égale pour un enfant d’avoir un métier et non pas d’avoir le même
enseignement, ce qui est bien différent. Le plombier finit souvent plus riche
que le professeur et il peut l’être bien avant. Qu’il ne sache pas ce que
recouvre la notion de développement durable ne l’empêchera pas de travailler,
mais ne pas savoir compter oui.
Il n’y a pas deux réformes, le collège et les programmes
Il y a l’obligation d’une réforme en profondeur
Reposant clairement les objectifs
Dont le plus important
Un métier pour tous !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
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