mercredi 4 mars 2015

Prime d’activité contre le chômage et la pauvreté ou prime à l’activité électorale ?



Manuel Valls vient de tirer de son sac à malices un nouveau miroir aux alouettes pour lutter contre le chômage. L’idée d’encourager la volonté de retour à l’emploi ou plutôt de ne pas encourager à rester dans un chômage aidé est évidemment de bon sens mais est-elle réellement efficace pour lutter contre la pauvreté et même le chômage ? Il faut tout d’abord écouter les économistes qui nous disent que toute aide financière à l’emploi du style « emplois aidés » est destructrice du même nombre d’emploi. En effet cet argent de l’Etat est pris sur le pouvoir d’achat de l’ensemble des consommateurs par des taxes ou impôts supplémentaires et génère donc des pertes de consommation, d’où de production et d’emploi avec un décalage dans le temps. Ces mesures n’ont qu’un effet final de solidarité sans effet réel sur le chômage. Par exemple l’aide à l’emploi pour les jeunes induit presqu’automatiquement une destruction d’emploi pour les autres catégories d’âge. C’est le principe du reversement des économistes.

Manuel Valls propose la création au 1er janvier 2016 d’une « prime d’activité » destinée aux travailleurs à revenus modestes, qui remplacera les actuelles primes pour l’emploi (PPE) pour 2,2Mds€ et RSA-activité pour 1,9Mds€, dispositifs jugés trop complexes et peu efficaces. L’enveloppe qui lui sera consacrée sera de près de 4 milliards d’euros par an. Le PPE a pour défaut d’être versée avec un décalage d’un an, comme tout crédit d’impôt, et d’être distribuée très largement (plus de 5 millions de ménages bénéficiaires en 2013), d’où des accusations de « saupoudrage ». Toutefois celle-ci était versée automatiquement. La nouvelle prime devra être demandée. Quant au RSA-activité, versé sur demande et qui sert de complément à un petit salaire pour quelque 750 000 ménages bénéficiaires, il n’est demandé que par un tiers des personnes qui y ont droit, en raison notamment de sa complexité. Elle pourra être versée à tout travailleur pauvre âgé d’au moins 18 ans. Contrairement au RSA-activité, la prime d’activité sera ouverte aux jeunes travailleurs de 18 à 25 ans. 

Au-delà de l’effet d’annonce, il faut noter que Manuel Valls réitère qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôts. On imagine mal comment le gouvernement qui se voit enjoint par Bruxelles de trouver 30 milliards d’économies de plus peut faire accepter par celle-ci une mesure de prime d’activité plus coûteuse que le coût cumulé de la PPE et du RSA-activité. Les modalités d’application n’étant pas encore clairement définies, on peut même craindre que le budget attribué en soit globalement réduit. De toute façon il y aura obligatoirement des gagnants et des perdants. Bien des questions restent en suspens. Sera-t-elle attribuée en fonction des revenus des ménages ? Jusqu’à quel niveau de Smic sera-t-elle versée ? 1,2 Smic ? A partir de quel niveau de Smic le salarié sera-t-il gagnant ? 0,5 Smic ? Quel sera le montant maximal de cette prime ?

Les plus petits revenus percevraient un montant équivalent au système actuel. Si c’est le cas ne parlons plus de solidarité, ni de lutte contre la pauvreté mais de mesure à tendance libérale. Par ailleurs il est clair que le gain global sur l’emploi sera proche de zéro puisque ceci ne favorise en rien l’envie d’embaucher des entreprises. Tout au plus peut-on espérer que des emplois soient pris dans les emplois non pourvus si l’employeur accepte le profil du demandeur. Mais tout se jouera déjà sur la complexité ou non des formalités administratives à remplir car celle-ci est très dissuasive. Le gouvernement compte déjà que 50% ne les tenteront pas ! On peut espérer toutefois que cela ne soit pas un frein pour des jeunes qui cherchent désespérément un emploi. 

En conclusion il s’agit manifestement d’une répartition nouvelle des aides. On peut la considérer plus juste parce que, contrairement au PE, la prime d’activité sera calculée sur l’ensemble des revenus de la famille. Par contre son effet sur le chômage est très restreint et surtout il n’agit en aucune façon de lutter contre la pauvreté puisque les revenus les plus faibles ne seront pas plus aidés et qu’en plus ils devront en faire la demande. La solidarité n’est pas nationale puisque l’on agit à budget constant et que ce sont ceux qui avaient l’aide la plus élevée qui paieront pour les autres, dans une simple répartition solidaire interne. Quant à moi, vu la recherche d’économies en cours, je ne suis pas loin de penser que grâce à l’obligation de la demande de prime et à la manipulation des différents coefficients d’application, l’aide globale apportée sera finalement inférieure à celle existante. Ce sera bon pour les finances publiques et peut-être donc finalement pour l’emploi, très probablement pas pour les plus pauvres mais cela reste un excellent argumentaire pré-électoral. Vive le socio-libéralisme !

Un tiers de la richesse nationale produite chaque année est confisquée par l’État au titre de la « sécurité sociale ». Cette dépense représente 10% du PIB national, 10 points de plus que la moyenne européenne. N’y a-t-il pas autre chose à faire ? 

Le gouvernement s’avère le champion du miroir aux alouettes.

Devant le fiasco de la politique sécuritaire et économique, 

La montée inexorable de la dette et du chômage,

On crée un nouvel outil de tripatouillage 


Du budget et d’un électorat blasé ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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