Une formidable bataille s’est engagée contre l’hégémonie américaine et
les USA sont confrontés à une Eurasie en formation qui va obliger à de profonds
changements dans la géopolitique mondiale. Le couple Russie-Chine s’est
constitué après le refus de l’UE de continuer à tendre la main à la Russie et la
mise en place de sanctions contre elle derrière les américains. C’est une erreur
majeure qui peut, non seulement retarder une évolution inéluctable de l’éloignement
de l’Europe de la chape économico-militaire des USA pour retrouver son
indépendance, mais aussi faire parler les armes dans un conflit mondialisé.
Cette chape tient essentiellement au dollar, monnaie de référence actuelle, et
à la puissance militaire colossale des USA. Cette dernière ne cesse de se renforcer
avec l’augmentation budgétaire de la Défense américaine multipliant le nombre
et la sophistication des armes et celui du nombre de bases militaires dans le
monde entier.
Face à cette évolution la Russie et la
Chine font également un effort d’armement et non seulement se rapprochent
économiquement, monétairement mais aussi stratégiquement. C’est une évolution
historique majeure qui leur fait oublier les querelles de frontières et qui ont
nécessité une réorientation majeure de la politique étrangère russe qui avait
montré son intérêt pour être partenaire de l’UE. La constitution de l’association
des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) suscite l’intérêt d’autres
pays comme l’Iran et le Pakistan. Ce dernier est dans l’influence américaine, il
s’agit donc d’une évolution majeure. L’Iran commerce avec la Russie (réacteurs
nucléaires, armes) et le recul des USA dans les négociations sur l’énergie
nucléaire y est lié. La diplomatie américaine cherche à ne pas faire définitivement
basculer ce pays dans le camp adverse sachant d’autant plus qu’il est
pratiquement impossible de l’empêcher d’atteindre l’arme nucléaire. L’enrichissement
de l’uranium par centrifugation permet rapidement d’atteindre la concentration
U235 à plus de 90% nécessaire à la fabrication des armes. Les USA cherchent à
négocier pour en retarder l’éventualité. L’Iran va jouer sur les deux tableaux
pour s’arrimer aux BRICS avec le plus d’avantages et l’issue est écrite d’avance.
Certaines
puissances déterminantes à Washington commencent à perdre patience avec la
maison des Saoud, dont la stratégie du pétrole à bas prix torpille l’industrie
du gaz de schiste aux USA. D’autres s’inquiètent d’un rapprochement entre la
Turquie et la Russie, qui ont conclu un accord clé du Pipelinistan, le gazoduc
Turk Stream. L’Arabie Saoudite commence donc elle aussi à jouer un double jeu
et son attaque sur le pétrole est significative. Seule l’opposition sunnite-chiite
l’empêche d’aller plus loin et l’oblige elle-aussi à jouer le double jeu avec l’Etat
Islamique en adoptant la stratégie du chaos. L’Irak est gouverné par les
chiites, la constitution d’un Etat sunnite n’est finalement pas pour lui
déplaire. Quant à la Turquie, elle joue aussi son propre jeu, en refusant de
jouer celui des américains sur Daesh, et en soutenant ouvertement Daesh pour
régler son problème kurde. La position turque est à suivre de près car c’est un
partenaire de l’OTAN qui a refusé d’accueillir les avions américains pour
bombarder en Syrie. Elle est visiblement elle aussi dans une phase de double
jeu sans oublier sa vocation d’hégémonie ottomane. Il ne faut jamais oublier l’histoire.
La Syrie a choisi son camp et ses liens
avec la Russie et l’Iran sont définitifs mais ceci entraîne la possibilité de
ralliement du Liban du Hezbollah qui combat au côté des Syriens. On comprend qu’Israël
et la puissance juive américaine fassent feu de tout bois pour inciter les USA
à durcir leur position envers l’Iran. Pour la première fois les USA font la
sourde oreille et Israël se trouve isolé, l’axe Israël-USA faiblit et Israël se
rapproche de l’Egypte. Tout le Moyen-Orient est en train de se reconstruire et
l’Etat Islamique en est le fer de lance dans une confrontation des différentes
tendances de l’Islam dont les sunnites, les chiites et les alaouites. La
pression militaire des USA et de leurs alliés ne fait qu’aggraver une situation
explosive mais il est désormais évident que l’hégémonie américaine va se
heurter à une résistance globale d’une Asie en reconstruction où l’OCS, Organisation
de Coopération de Shangaï dont la Chine et la Russie, aura son mot à dire avec
ses pays partenaires ou observateurs, comme la Turquie et l’Iran.
Mais l’hégémonie américaine sur l’UE est
aussi en train de s’effriter et une autre Europe liée à l’Asie commence ses
premiers balbutiements. Au changement du gouvernement grec qui secoue le joug
de la troïka où le FMI relaie la pression américaine, Chypre vient de faire un
pied de nez aux USA en acceptant d’accueillir le mouillage de la flotte navale
russe dans une sorte de base de port d’attache et de maintenance. Après Tartous
en Syrie, la Russie est en passe de montrer sa présence en Méditerranée. Mais
surtout Chypre est un pays faisant partie de l’UE qui a mal digéré la façon
dont l’UE est intervenue dans la crise chypriote. Sans aucun doute Chypre prend
du recul et les liens entre la Russie et la Grèce vont être de nouveau à l’ordre
du jour dès juillet prochain après la période probatoire assurant la survie provisoire
des finances grecques.
La
mainmise des USA sur le Moyen-Orient et l’UE risque d’être de plus en plus
difficile à maintenir. L’Eurasie est en train de se construire lentement et les
soubresauts ne vont pas manquer. La naissance de conflits comme l’Ukraine peut
se généraliser tant que la politique de soulèvement interne des USA, les fameux
« printemps arabes » continueront. Or cette politique se généralise
et l’objectif de déstabilisation de la Russie est fondamental. L’assassinat à
Moscou en fait partie. Il faut agenouiller la Russie et casser l’axe
Chine-Russie maintenant que l’axe UE-Russie est remis à plus tard. D’un autre
côté la Russie n’a pas abandonné de créer le lien entre la Chine et l’UE, en
pensant à la vente de ses ressources gazières et pétrolifères. La construction
d’une nouvelle Asie plus solidaire va de pair avec celle de l’Eurasie,
particulièrement à l’heure où l’UE montre des signes de désintégration. Une
énorme bataille est en cours, bataille dangereuse où les adversaires joueront à
plein sur l’économie et les sanctions, la monnaie, l’affrontement militaire par
dissuasion ou conflit ouvert, le pourrissement politique des pays récalcitrants.
Sur 247 années de son existence, les USA ont mené des guerres pendant 222 ans…
ils continuent sous le slogan « la paix, c’est la guerre ».
P.S : "Si vis pacem, para bellum", si tu veux la paix, prépare la guerre, tel est la devise de l'Etat-Major français. Une conception toute différente qui a conduit à la dissuasion nucléaire. Une autre conception que nous sommes en train aussi d'oublier dans l'OTAN.
La face du monde est en passe de changer
radicalement.
L’accord de Yalta vole en éclats sous la
pression
D’un géant devenu à pieds d’argile.
L’Eurasie est en marche.
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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