La réforme territoriale, repoussée par le
Sénat, dont les contours ne seront connus qu’après le vote d’une Commission
mixte paritaire, est annoncée comme l’une des mesures phares du gouvernement.
Le découpage de la France en super-régions, fait sur un coin de table, sous la
lampe avec le téléphone pour écouter les désidératas politiques des uns et des
autres, s’appuient sur deux idées de justification. La première qui peut
apparaitre logique serait la recherche d’une baisse du coût des dépenses
locales. La seconde, qui me semble la plus plausible car les économies (encore
faudrait-il démontrer qu’elles existent) ne sont pas pour demain et la fin du quinquennat
n’y suffira pas, la seconde dis-je c’est la poussée européenne sur la régionalisation.
Une Commission spéciale existe à cet effet. Lorsque les fédéralistes de l’Union
veulent arriver à leurs fins, il faut diviser l’Europe en une centaine de
régions devenues assez puissantes pour supprimer les États.
Après tout Hollande est de moins en moins
sûr de pouvoir refaire un mandat et il ne serait pas déplaisant que son
successeur voit ses pouvoirs encore diminués, pendant qu’à la tête d’une
super-région il voit augmenter les siens. Muni d’une expérience d’État et de
département, il est tout désigné pour la fonction. On peut ajouter l’intérêt politique
qu’il y a à lancer un sujet de polémique profonde dans le pays et à détourner l’attention
de la situation économique et budgétaire qui empire de jour en jour.
Si
ce n’était pas le cas on ne comprendrait pas qu’un tel remue-ménage n’ait pas
donné lieu à plus de remue-méninges. Une telle réforme ne s’improvise pas et là
encore un référendum serait nécessaire. N’oublions pas que le Général De Gaulle
n’a pas eu l’accord des français pour une avancée dans la régionalisation !
Désormais plus aucun sujet ne mérite que la question soit posée aux français.
Les questions sont toujours mal posées, trop complexes pour des esprits
frustres. Les français ont souvent la mauvaise idée de voter NON et entraînent
de graves conséquences pour le pays. Il est dangereux de poser la question aux
français.
Sur
ce constat qui laisse à l’élite, formée à l’ENA, le soin de penser pour tout le
monde dans une démocratie des sages, il faut donc se résoudre à adopter l’attitude
du bon sens du contribuable qui veut savoir si les dépenses de l’Etat vont
diminuer (ce qui ne veut pas dire ses impôts néanmoins) et si le service des
administrations locales va s’en trouver amélioré. Regardons donc de plus près
le secteur dépenses des collectivités territoriales. Au départ il s’agissait d’un
simple transfert de compétences financé euro versé pour euro dépensé. A l’arrivée
que constate-t-on ?
En
2013, alors que l’État parvenait à contenir ses dépenses, celles des collectivités
augmentaient de 3 ,2%, presque comme celles de 2011 et 2012, alors que l’inflation
était de 2% ces trois années. Pour le contribuable les impôts locaux ont
augmenté de 4,6% ! Malgré ces deux augmentations, l’équilibre des budgets des
collectivités locales (Régions, départements, communautés de communes, communes) n’était pas
réalisé et l’endettement a atteint 137Mds€ fin 2013. Plus grave est que le nombre
de fonctionnaires publics a augmenté de 250.000 de 2006 à 2012 non compté les
décentralisations de l’Etat. C’est le rapport annuel de l’Observatoire des
finances locales qui l’affirme.
Le constat est que, comme partout, la
décentralisation est potentiellement génératrice de surcoûts. Dans le privé on
doit les limiter au maximum et globalement dégager un gain entre le siège d’une
entreprise et les délocalisations régionales. Dans le public, le gain doit être
dans le service. Une grande partie du service est contenu dans la proximité. Si
l’on a une gestion plus rigoureuse, moins dispendieuse pour des objectifs
contestables voire des gabegies, et visant à l’équilibre sans diminuer la
qualité du service, il n’y a rien à changer à court terme. La Réforme
territoriale qui se prépare commence par diminuer la qualité du service de
proximité alors que le coût de la gestion locale augmente chaque année et les
impôts locaux avec. Elle risque fort de dégénérer en un conflit social et de
finalement détériorer un peu plus la confiance.
Cela
commence donc mal et on constate que le problème endémique de l’augmentation
des dépenses locales est indépendant de la taille des collectivités. La super-région
ne peut donc résoudre autre chose qu’une amélioration instantanée du coût.
Pourtant à court terme c’est un surcoût qu’il faut attendre, car le mouvement
de re-centralisation est coûteux comme celui de la décentralisation, comme les
déménagements. Par ailleurs le surplus de fonctionnaires ne peut être résorbé,
ce sont des emplois à vie. Ils iront donc enfler les dépenses de l’État
ailleurs. Des économies sont à faire, même sans diminuer la qualité du service
public, mais elles sont dans la gestion de ces collectivités beaucoup plus que dans
des re-centralisations faites à la hâte et sans véritable concertation de ceux
pour lesquels elles œuvrent.
C’est
la tâche que s’imposent les entreprises pour diminuer leurs dépenses et augmenter
leur compétitivité. Ils pratiquent aussi des enquêtes pour savoir le degré de
satisfaction des clients et des attentes non satisfaites. C’est ce que semblent
ignorer ceux qui nous gouvernent puisqu’ils savent eux mieux que nous si nous
sommes bien servis. Dans l’analyse des strates administratives, il faut d’abord
faire une liste complète des tâches à accomplir, puis attribuer à chaque strate
ce qu’elle est capable de faire au mieux… pour l’administré. Chaque strate est
alors dimensionnée en fonction des tâches attribuées. Cela évite les
redondances et les dossiers qui transitent à tous les échelons qui sont l’apanage
du millefeuille français. On procède ensuite à la meilleure façon de réaliser
chacune des tâches inventoriées.
Malheureusement
il semble que le bon sens soit oublié dans les arcanes des décisions
politiciennes qui obéissent à d’autres règles d’enfumage électoral et de
distribution des pouvoirs entre coquins. Il faut donc voir dans cette Réforme
territoriale un coup politique sans risque, croient-ils, car il sera difficile avant
longtemps de savoir si cela se traduit par un gain mais l’administré jugera
bien vite de la pagaille provisoire encore excusable mais de la diminution de
la qualité des services de proximité.
L’Europe cherche à diviser pour régner.
Les politiques cherchent un duché.
L’administré est là pour payer !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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