De
la ligne « Tout pour diminuer le chômage », on est passé depuis le
début de l’année à « Tout pour la croissance », traduit dans les
faits par « Tout pour l’entreprise ». Je passe sur la menue monnaie
que l’on va distribuer pour les plus faibles revenus, mesures hautement
populaires, mais monnaie qui ne va probablement pas compenser les hausses diverses,
eau, électricité, gaz, assurances, transports, etc. que subira cette catégorie
de revenus. Ceci ne freinera pas la croissance des inégalités entre riches et
pauvres.
L’État prend comme une vérité vraie que la croissance va générer une augmentation du
PIB/habitant et une diminution du chômage. Autrement dit le choix de l’effet
est déterminé et il reste à trouver les moyens de le produire. On passe d’une
logique de causalité à une logique de prédiction. La croissance est la cause de
nos malheurs et on va mettre les moyens de l’État en œuvre pour cet objectif.
Cette logique est dénommée celle du « top down ». Elle est largement
incluse dans l’idéologie actuelle et se traduit par une intervention directe
sur le fonctionnement des entreprises sous formes d’aides et de dégrèvements.
Ceci transforme celles-ci en assistées qui d’ailleurs demandent toujours plus.
Si
vous donnez de l’argent à un enfant qui n’est lié à aucun effort réalisé antérieurement
de sa part, il continuera à demander, à demander toujours plus. C’est
exactement ce qui se passe avec le Medef, la boîte à bijoux a été ouverte et
madame se pare de plus en plus des pieds à la tête. C’est pourquoi les membres
de la classe politique, friands
donneurs de leçons et pourvoyeurs de plans en tous genres, feraient bien de
s’insuffler une dose d’humilité épistémologique et de se départir de leurs
paradigmes idéologiques et autres réflexes clientélistes. Leurs certitudes, qui
varient d’ailleurs avec le temps viennent d’être mise en cause par une chercheuse
indienne de l’université de Washington, Saras Sarasvathy, et par Nassim
Nicholas Tale, professeur à l’Institut polytechnique à l’université de New
York, considéré comme l’un des plus brillants esprits de notre temps par David
Kahneman, Prix Nobel d’économie en 2002.
Selon
leurs travaux, à l’idéologie actuelle il est préférable de substituer une
logique d’effectuation et une logique de contrôle qui évaluent les moyens disponibles et s’attachent
à découvrir, parmi eux, ceux qui donneront les meilleurs effets possibles.
Cette logique du « down top » est la logique de l’entreprise qui
considère qu’elle travaille dans un monde aléatoire, difficilement prévisible
qui nécessite une adaptation constante des effets à partir des moyens
disponibles, y compris d’investissement. Une entreprise assistée par l’État
dépense de l’énergie de celui-ci, énergie qui pourrait trouver meilleur emploi ailleurs. C’est bien
dans la création d’entreprises et leur réussite grâce à leur innovation, leur productivité
et en définitive à leur compétitivité que les richesses vont être créées.
Seulement
on voit là que l’État doit se cantonner dans son rôle de « faciliteur »
de l'entrepreneuriat, en diminuant au maximum les contingences qui pèse sur lui,
en exerçant une pression fiscale, sur les entreprises et les contribuables,
compétitive avec les autres pays, en améliorant les infrastructures qui les
concernent, en cherchant la qualité d’une formation orientée vers l’acquisition
d’un métier et la flexibilité des esprits dans un monde de plus en plus
rapidement changeant.
Le
monde économique actuel commence à toucher le fond de la politique économique
et monétaire qui a commencé lorsque le dollar s’est déconnecté de l’or et qu’il
est devenu la monnaie internationale des échanges commerciaux. Le déversement
de l’argent factice, de liquidités, quasiment sans limite au gré des demandes
de croissance forte, crée une montagne de dettes qui menace de s’écrouler sous
son propre poids ou de s’évaporer en bulles de plus en plus énormes dont l’apparition
se fera de plus en plus fréquente. La croissance que nous avons connue avant ce
que l’on a appelé la crise de 2008-2009 est donc aussi factice que l’argent qui
l’a générée. Ce n’est pas la crise qui continue, c’est l’entrée dans une autre
ère économique.
La vraie
croissance est celle issue des progrès et innovations technologiques. Elle est
naturelle, c’est une énergie verte sans engrais. Elle donne une croissance
faible mais de « développement durable » pour autant que les États ne
dépensent pas plus que les richesses qu’ils produisent ou que la pression fiscale
soit trop lourde et plombe leur économie, ce qui revient au même. Dans un monde
idéal, les balances des commerces extérieurs de tous les pays devraient être
équilibrées. La croissance permettrait alors d’apporter dans chaque pays l’augmentation
de la consommation intérieure correspondant à celle-ci.
Le
monde n’est pas idéal et la zone euro est loin d’être optimisée. C’est pourquoi
le déséquilibre entre l’Allemagne et les pays du sud ne peut encore durer
longtemps. La théorie du « down top » ne peut néanmoins s’affranchir
de l’influence de la monnaie qui est une variable d’ajustement indispensable et
manque cruellement à notre pays. En conclusion nous ne résoudrons pas l’équation
économique qui nous mène vers la récession et une décroissance du PIB/habitant
sans se rendre maître du levier de la monnaie et sans, d’une part desserrer les
contraintes normatives et budgétaires de Bruxelles, et d’autre part arrêter les
aides directes et les contingences de l’État sur les entreprises. La déflation
menace dit Manuel Valls, oui elle commence par celle du moral des français.
La vraie croissance ne peut venir que
des entreprises.
Sauf grand saut technologique, elle est
faible.
L’État ne la crée pas mais peut la
détruire
Quand il sort de ses tâches régaliennes
Et ne gère plus sa monnaie !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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