Le sommet européen a désigné Jean-Claude Junker, le luxembourgeois, comme
candidat à la Présidence de la Commission Européenne en remplacement de Manuel Barroso,
le portugais. C’est le Parlement européen qui le désignera officiellement
puisqu’un seul choix lui sera présenté. Le choix de Junker n’est pas anodin. Le
Luxembourg est le paradis fiscal par excellence qui n’a pas subi contre elle les
mêmes menaces, en particulier françaises et américaines, que la Suisse. Cette
dernière ne fait évidemment partie ni de la zone euro ni de l’UE…
Mais la personnalité même de Junker n’est pas
anodine. On a vanté sa longue carrière de Premier Ministre du Luxembourg qui
lui a donné une solide expérience des négociations européennes. Par contre on a
peu parlé de sa démission forcée de ce poste après une enquête qui a mis en
lumière ses liaisons avec les services secrets américains. C’est donc peu ou
prou un agent de la CIA que l’on met aux commandes de l’Europe. On comprend alors
pourquoi Angela Merkel s’est finalement ralliée au soutien de cette
candidature.
Le vote de la France, pour raison de décision du
peuple français, fait évidemment doucement rigoler puisque le citoyen n’a pas
élu nominativement le candidat mais voté pour des partis (ou plutôt contre),
enfin pour les hommes qui les représentent, sans se préoccuper du choix de
ceux-ci pour le candidat à la Commission Européenne. D’ailleurs personne ne
sait vraiment qui a fait éclore cette idée de fausse démocratie qui n’apparaît
ni dans les statuts ni dans les traités de l’UE. C’est un ces gadgets qui permet
d’éviter la vraie pratique de la démocratie et du référendum désormais
pratiquement banni au niveau européen et en France en particulier.
Le référendum d’initiative populaire étant
pratiquement injouable vu les conditions à remplir, les manifestations de masse
dans la rue n’étant pas suffisantes et l’Etat n’y ayant pas recours de lui-même,
le référendum est passé aux oubliettes même pour des sujets touchant aux
fondements de notre vie, en société et en famille. Au niveau de l’Europe les
procédures de pré-adhésion des pays intéressés ne sont aucunement soumises à
une procédure démocratique, le Conseil européen et la Commission en font leur
affaire. On signe des traités commerciaux avec l’Ukraine, la Géorgie et la
Moldavie en jurant qu’il n’est pas question d’adhésion et on se répand en
commentaires disant que ce n’est qu’un premier pas…
Quel pas a fait la démocratie par rapport à la
royauté, époque où les rois épousaient des étrangères pour agrandir leur
territoire ou sceller des alliances sans que les sujets y aient leur mot à dire ?
L’Europe veut s’agrandir à l’Est en incluant des pays dont on sait qu’ils vont
poser des problèmes qui arriveront avant l’hiver en Ukraine. La Moldavie est l’un
des pays les plus pauvres d’Europe. Bientôt les regards de l’Europe se
tourneront vers la Biélorussie pour côtoyer les frontières de la Russie sachant
que l’adhésion à l’Europe signifie l’adhésion obligatoire à l’OTAN.
Cameron a tapé du poing, menacé de sortir de l’Europe
et refusé de voter pour Junker. On l’a traité de mauvais coucheur. Il a compris
que le carcan de l’Europe allait s’accentuer avec cette nomination et conduire
tout droit vers l’Europe fédérale qui fait disparaître les nations. Il ne veut
pas perdre son indépendance et garder également la maîtrise de la finance. « La
position de Cameron pourrait avoir été renforcée après cet épisode, étant donné
le risque de voir le Royaume-Uni quitter l'UE et celui de voir Berlin se
retrouver seule avec un « bloc Club Med » », souligne le
Think Tank eurocritique Open Europe. D'ores et déjà, Angela Merkel a répété sa
volonté de ne pas abandonner le Royaume-Uni et de le conserver dans l'UE. Elle
a ainsi reconnu le droit d'une « Europe à deux-vitesses » pour les
Britanniques. Preuve que Londres n'a pas tout perdu.
Hollande a voté comme ses compères socialistes mais brandit
un communiqué de victoire pour le maintien d’un objectif de croissance et de
facilités données pour remplir les conditions de déficit et de dette. En fait
il demande du temps. Le surplus de recettes des fraudes fiscales et de l’ISF est
déjà reversé aux demandes corporatistes. La croissance prévue de 1% ne sera pas
tenue. Il manque de l’argent pour boucler raisonnablement le budget. La France est
aux abois. Le vote pour Junker était une allégeance facile pour amadouer l’Allemagne
et le futur Président de la Commission.
Le problème est qu’Angela Merkel n’a pas en fait
reculé d’un pouce. C’est la Commission qui sera juge des délais accordés mais
celle aussi qui imposera les conditions de réalisation des objectifs de la
politique économique de la France. Le temps ne sera accordé que si vous prenez effectivement
toutes les mesures que nous avons édictées. « La flexibilité, cela signifie que le pacte de stabilité sera appliqué
de la meilleure manière possible. » dit-elle en ajoutant « ce ne sera pas aux Etats de décider
eux-mêmes de l'application de cette flexibilité, mais à la Commission. »
Or ce ne fut pas tout-à-fait le cas
jusqu’à présent. Le licou se resserre sur la France qui va devoir passer par
les fourches caudines d’une Commission qui ne pourra pas aller dans un sens
récusé par une Allemagne que l’Europe du sud agace. Le succès de Hollande n’est
qu’un succès de façade, il n’a pas gagné de nouvelles marges de manœuvre, on
décidera pour lui.
Autrement dit, comme aujourd'hui, c'est bien
Bruxelles qui continuera à accorder des délais pour l'application du pacte,
moyennant évidemment l'application d'une politique qui, rappelons-le, reste une
politique de consolidation budgétaire qui porte en soi des éléments
déflationnistes. Lorsque l'on observe « le plan d'attaque » de
l'Elysée publié dans Le Monde du 25 juin, on comprend que, encore une fois,
Paris n'a guère pesé et n'a obtenu grand-chose qu’une victoire « terminologique »
selon Matteo Renzi, Président du Conseil italien. Rien de nouveau sur les
outils de la croissance, la Banque Européenne d’Investissement (BEI) reste
frileuse et les « project bonds » sont toujours dans les limbes.
Notre défaite est complète. Hollande a perdu.
La France
cigale a chanté tout l’été pour un peuple désenchanté
Elle
jure ses grands dieux qu’aujourd’hui elle a le bon braquet
Apprenez
belle dame, lui dira sans ambages la Commission
« Rien
ne sert de courir, il faut partir à temps ! »
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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