Qui
ne s’intéresse pas à la géopolitique ne voit que les ombres sur le fond de la
caverne, ombres qui masquent les grimaces et expressions des acteurs dans la
lumière. Nous sommes saoulés de commentaires sur le Mondial, les basses
affaires politiques, les meurtres suspects. Mais l‘information géopolitique se
fait rare si ce n’est pour expliquer le bien-fondé de telle ou telle
intervention extérieure, de telle ou telle signature de traité, de tel ou tel déplacement
réussi du Président à l’extérieur, etc. Mais une analyse critique des axes
fondamentaux de la politique étrangère et économique française dans la
mondialisation en cours ne fait guère l’objet de commentaires. C’est comme si
le peuple ne pouvait comprendre ce qui ne peut l’être que par des élites
politiques.
La politique du
mensonge par omission, les promesses non tenues sur le chômage et les impôts, et
les chargés d’études qui s’entassent dans les tiroirs mais permettent d’alimenter
financièrement les copains et copines, les réformes sur des sujets de société
avec déni de démocratie, les incursions en pays étranger sans soutien de l’Europe
mais avec la satisfaction d’être remercié par les américains, etc., n’aboutissent
qu’à une popularité du Chef de l’État en baisse quasi continue. Le peuple est
mis à l’écart et il le lui rend bien.
La France va mal, les
perspectives ne sont pas bonnes. L’INSEE vient de donner sa prévision de croissance
pour 2014 avec un 0,7% au lieu du 1% prévu, après une croissance nulle au premier
trimestre, qui laisse peu d’espoir sur la baisse du chômage. Les
investissements et la consommation des ménages ont baissé de 0,5%, les Français
ont retiré plus qu’ils n’ont mis sur l’Épargne en mai, le commerce extérieur
est toujours très déficitaire. La croissance de l’UE, hors Allemagne, n’est pas
plus brillante et celle mondiale est revue à la baisse, pendant que la
croissance américaine incite la Fed à maintenir des taux d’emprunt bas et
déverse toujours des dizaines de milliards de liquidités sans souci de la dette
américaine qui pulvérise les records.
Dans
ce contexte extérieur, la France affublée d’un contexte intérieur de pays au
bord d’évènements graves pour son économie et également pour ses prestations
sociales, retraites comprises, remet les clés de son économie entre les mains
de Bruxelles, où l’Allemagne impulse sa vision économique. Bruxelles se fait de
plus en plus exigeant et le Conseil Européen des 26 et 27 juin va se voir soumettre,
en vertu du traité dit TSCG (Traité sur la Stabilité, la Coordination et la
Gouvernance) et dans le cadre procédural du « semestre européen »,
une série de recommandations par pays, visant à guider les États membres dans
leurs politiques budgétaires et de réformes dites
« structurelles ». Je laisse
la parole à Jean-Pierre Chevènement qui fait une analyse inquiétante du texte
proposé par la Commission Européenne :
« Pour la France, c’est une mise à la diète
généralisée : effort d’économies budgétaires accru, plafonnement des
retraites, rationalisation des allocations familiales et des aides au logement
et, curieusement, réforme territoriale, comme si celle-ci pouvait générer des
économies propres à réduire le déficit du budget à 3 % du PIB en 2015. Objectif
évidemment hors d’atteinte quand on sait que le déficit sera encore de 4,1 % en
2014 du fait d’un tassement de 14 milliards des rentrées fiscales par rapport
aux prévisions.
Viennent ensuite parmi les
recommandations la réduction du coût du travail, la mise en cause du crédit
impôt-recherche, la déréglementation des professions, l’ouverture des services
à la concurrence, la hausse des tarifs du gaz et de l’électricité, la réduction
des niches fiscales et l’élimination des seuils, la suppression des subventions
au diésel, la réforme du système d’allocation-chômage. »
C’est
la mise en tutelle généralisée de la démocratie républicaine, c’est le
resserrement du « cadenassage » de nos choix politiques. La France est
à la remorque de Bruxelles et le TSCG montre bien désormais les craintes qu’il
avait suscitées. Mais la tutelle de Bruxelles, largement influencée par l’Allemagne,
ne touchait guère à notre politique extérieure jusqu’à présent. Avec l’Ukraine,
l’UE s’est engagée dans une politique d’extension à l’est largement impulsée
par les USA et nous coupe progressivement de la Russie. Le nombre de morts chez
les pro-russes et les populations en fuite a largement dépassé ceux du côté
ouest de ce pays. Le nouveau président continue à combattre plutôt qu’à œuvrer pour
le plan de paix qu’il a signé. Notre action là-bas n’a pas fait avancer la
démocratie mais elle permet à l’OTAN de s’approcher des frontières russes en
fournissant déjà une aide militaire au nouveau régime.
Avec
l’Irak nous ne faisons que suivre la stratégie américaine qui laisse se
développer l’attaque sunnite tout en prétendant soutenir le régime de Bagdad.
La France est absente cachée derrière les USA, après avoir voulu intervenir en Syrie
pour être finalement abandonnée par Obama. Elle est à la remorque dans une
attitude de perroquet des USA. Nous avons voulu être aussi en première ligne et
menaçant envers l’Iran alors que désormais les États-Unis sont en phase de
pourparlers avec ce pays dans un double jeu sunnite-chiite. La France a le
tournis mais pas de politique propre et audible comme si désormais nous n’avions
plus d'intérêts propres à défendre.
Quand le paquebot France prend l’eau
Quand les matelots n’écoutent plus
Il doit être remorqué en cale sèche.
Et leur capitaine mis aux arrêts.
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF Languedoc-Roussillon
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