En effet c’est la question de fond pour l’esprit français
nourri d’une propagande bien orchestrée sur les Droits de l’Homme. Y répondre
par la négative remet en question l’intérêt de notre engagement au côté des
Etats-Unis. Il ouvre la porte à des motivations toutes autres.
Par qui serait-il remplacé sinon par le Conseil National
Syrien (le CNS), dominé par les Frères musulmans mais dans lequel les différents courants de
l'opposition n'arrivent pas à s'unir. A ce propos dans une conférence récente, Alain Chouet, ancien chef du
service de renseignement de sécurité de la DGSE et reconnu bien au-delà de
l'Hexagone pour son expertise du monde arabo-musulman déclare :
"Tout
comme son père, Bashar el-Assad n’est que la partie visible d’un iceberg
communautaire complexe et son éventuel départ ne changerait strictement rien
à la réalité des rapports de pouvoir et de force dans le pays. Il y a
derrière lui 2 millions d’Alaouites encore plus résolus que lui à se battre
pour leur survie et plusieurs millions de minoritaires qui ont tout à perdre
d’une mainmise islamiste sur le pouvoir.
Les Alaouites sont une communauté sociale et religieuse persécutée depuis plus de mille ans. Issus au 10ème siècle aux frontières de l’empire arabe et de l’empire byzantin d’une lointaine scission du chiisme, ils pratiquent une sorte de syncrétisme mystique compliqué entre des éléments du chiisme, des éléments de panthéisme hellénistique, de mazdéisme persan et de christianisme byzantin.
[…]Les
Alaouites sont considérés par l’Islam sunnite comme les pires des apostats.
Cela leur a valu au 14 ème siècle une fatwa du jurisconsulte salafiste Ibn Taymiyya, l’ancêtre du
wahhabisme actuel, prescrivant leur persécution systématique et leur génocide. Pourchassés
et persécutés, les Alaouites ont dû se réfugier dans les montagnes côtières
arides entre le Liban et l’actuelle Turquie. […] Après s’être libérés des
occupations étrangères, les bourgeois musulmans sunnites de Syrie sont parvenus
à l’indépendance de leur pays en 1943. Ils ont laissé l’encadrement de l’armée
de leur tout jeune pays aux pauvres, c’est à dire les minorités : Chrétiens,
Ismaéliens, Druzes, Chiites et surtout Alaouites.
[…] Dans les années 70, Hafez el-Assad, issu
d’une des plus modestes familles de la communauté alaouite, devenu chef de
l’armée de l’air puis ministre de la défense, s’est emparé du pouvoir par la
force pour assurer la revanche et la protection de la minorité à laquelle sa
famille appartient et des minorités alliées – Chrétiens et Druzes - qui l’ont
assisté dans sa marche au pouvoir. »
La Syrie est en proie à une guerre civile de type religieux
dans laquelle l’armée dans son ensemble montre son loyalisme hormis certaines défections
montées en épingle comme celle du général Manaf Tlass, un sunnite. L’insurrection
est loin d’être générale, les minorités en particulier, nombreuses en Syrie,
craignent l’arrivée au pouvoir des islamistes alors que les différentes
communautés en particulier musulmane et chrétienne vivaient jusqu’alors en
bonne intelligence.
Alain Chouet ajoute : « L’information diffusée en Occident n’est absolument pas
crédible. La source de référence est l’Observatoire syrien des droits de
l’homme (OSDH), en fait un rédacteur syrien exilé à Londres et une traductrice.
" Financé par les médias arabes c’est lui qui donne le nombre de morts
et la liste des massacres…
Dans l’Armée Syrienne Libre qui compterait 40.000
combattants on trouve de nombreux étrangers, des Libyens, des Libanais, des
Qatari, des Saoudiens et même des Afghans, des Turcs et des Français. Nombreux
sont les salafistes, les djihadistes et les membres d’Al Quaïda. Ils ont vu
leurs moyens renforcés par des fournitures d’armes venues du Qatar, d’Arabie
Saoudite via le Liban et la Turquie.
Qu’en est-il sur le terrain ? Le « volcan de
Damas » promis par les américains s’est effondré sur lui-même sous la
répression des troupes loyalistes guidées par la majorité de la population. Le
bilan, selon Thierry Meyssan journaliste indépendant, serait de 4.000 morts
dans l’ALS et 3.700 d’entre eux faits prisonniers. L’attentat, fomenté par les
américains avec l’Arabie Saoudite, a décapité l’armée syrienne sans la
désintégrer. Damas est un échec. Alep ne devrait pas résister longtemps.
Nous assistons à une guerre civile religieuse où le
pouvoir lutte contre des insurgés comme nous l’avons fait en Algérie. De toute
évidence le pays serait depuis longtemps rentré dans l’ordre si des puissances
étrangères, certains pour des motifs religieux et d’autres de suprématie
économique, n’entretenaient pas ce conflit jusqu’à la mort du pouvoir reconnu
jusqu’alors.
Le communiqué d’un groupe intitulé Ansar al-Cham est sans ambiguïté sur
l’intervention arabe étrangère : "Le monde doit savoir que la
Syrie a commencé à attirer des jeunes arabes prêts à rejoindre les
révolutionnaires et les combattants. Ils ont le droit de frapper à travers le
monde ceux qui soutiennent directement ou indirectement le gang au pouvoir en
Syrie".
Est-ce vraiment notre combat ? Le faisons-nous
pour donner le pouvoir aux Frères Musulmans comme en Libye ? Pour que le
chaos s’installe comme en Irak ? Que vient faire la démocratie dans cette
guerre qui n’en a cure ? Les Etats-Unis, mis en échec, montent encore un
chantage aux armes chimiques alors que la Syrie a exclu de l’utiliser tant qu’il
ne s’agit pas d’une agression extérieure caractérisée. Enfourcherons-nous
encore ce bobard pour donner notre voix aux américains dans une réunion du
Conseil de Sécurité de l’ONU ?
Dans
une période où les pauvres et la classe moyenne
Vont
devoir payer les erreurs de leurs gouvernants
La France
se grandirait plutôt en payant ses dettes.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon