A l’heure où la croissance est devenue la potion magique de
notre nouveau président, il n’est pas inutile de revenir à la liste des
ingrédients qui sont à l’origine de la croissance du PIB national. Chaque pays
a un potentiel de croissance qui dépend :
·
De
l’accumulation du capital nécessaire à toute activité
·
De
l’augmentation du nombre de travailleurs disponibles
·
De
la durée de travail de ceux-ci au cours d’une vie
·
De
leurs compétences et de leurs motivations
·
Des
progrès technologiques
·
Des
progrès managériaux.
Les deux derniers ingrédients conditionnent l’efficacité du capital
investi et du travail. Encore faut-il que cette croissance puisse s’exprimer, c’est-à-dire
qu’elle trouve des acheteurs sur le marché intérieur ou extérieur. On constate
que l’influence de l’État ne peut s’exercer que sur les facilités d’acquisition
du capital si l’État est actionnaire et sur la durée du travail par le biais de
la législation.
On voit ainsi que la croissance ne se décrète pas et que l’État
y a peu d’influence sauf dans les entreprises sous son contrôle. Les règles qu’imposent
Bruxelles réduisent de plus en plus le nombre de ces entreprises où l’État
reste majoritaire. C’est pourquoi on parle de débloquer 120 milliards pour des
investissements dans les infrastructures sur des programmes gérés par l’UE. On
s’affranchit ainsi de la règle qui empêche l’État de se substituer aux
entreprises privées ou d’être accusé de subventionner celles-ci.
Dans le même ordre d’idée on veut alimenter la Banque
Européenne d’Investissement. L’efficacité de celle-ci et son intérêt ne sont
pas en cause mais l’augmentation de son capital ferait alors appel à un apport
de capital de la part des États membres.
Dans ces deux cas il s’agit de fournir du capital avec de l’argent
qui n’existe pas puisque l’ensemble des pays européens est endetté. Il va
falloir « monétiser la dette », délicieuse expression dont la
traduction vulgaire n’est que la planche à billets du faux monnayeur.
C’est le grand YAKA de la croissance. Il faut emprunter, s’endetter,
prêter, imprimer, et relancer. C’est aussi la certitude que l’endettement des États ne disparaîtra pas. Mieux, si l’on arrive à prêter aux États pratiquement
sans intérêt à partir de la BCE, on est sûr que chacun rivalisera en projets
plus ou moins pharaoniques ou « magouilleux ». Qui de véritablement
sérieux et non influençable jugera de l’opportunité de dépenser de l’argent mis
à disposition sans intérêt ?
On devine facilement chez les pays de l’Europe du sud l’intérêt
suscité par ces perspectives. La mutualisation de la dette en fait partie puisque
les gagnants sont ces mêmes pays. Nous sommes devant un système où la création
de monnaie est l’opium des politiques. La parité de la monnaie qui a cours en France
avec l’or n’a cessé de se dégrader depuis le début du XXème siècle. La création
de monnaie diminue la valeur de celle-ci, c’est-à-dire son pouvoir d’achat.
Jusqu'en 1914, la France finançait
sa dette en faisant appel aux marchés. Ce marché apporte l'épargne disponible
(arrêtons de parler des vilaines banques, elles ne font que stocker cette
épargne) vers les acteurs économiques (entreprises, particuliers, État) en
recherche de crédit. C’est à partir de 1949, où
l’État a nationalisé les banques, les assurances, les entreprises, que s’est
mise en place une économie d'endettement.
Quand l’épargne finance, les marchés jouent leur rôle de
régulateur. Quand l’État monétise, il s’endette sans véritable contrôle. L’État
Europe prend le chemin qui mène à l’éclatement des bulles et à l’hyperinflation
sous l’impulsion du YAKA de la croissance… de la dette.
En attendant revenons chez nous. Pour le moment, le pouvoir
d'achat recule de 1,2%, officiellement sous l'effet des hausses d'impôt, du
chômage et d'une croissance inexistante. Les choses ne vont pas s'améliorer. Nous
allons continuer à pousser la dette devant nous dans le carcan de l’euro.
Au passage, les solutions
proposées cherchent à traiter l'endettement "visible", estimé à la
louche à 100% du PIB pour la France. Mais je n'ai vu personne nous proposer une
solution pour traiter ce que l'on appelle "la dette implicite"
(engagements futurs ou implicites). Avec un endettement implicite évalué à plus
de 500% du PIB, cette question vaudrait d'être examinée sérieusement… à moins
que finalement la croissance puisse se décréter. Les États-Unis ont « monétisé »
pour 3.000 milliards… on voit le résultat sur leur croissance !
La seule chose qui soit en croissance
C’est l’habileté de nos politiques
Pour sauver l’euro et dépenser plus sans que cela se voie !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF34 du
Languedoc-Roussillon.