L’Espagne est le plus grand pays
proche de l’explosion socio-économique et proche de nous. Il subit la crise de
l’immobilier, immobilier invendable et industrie de la construction en berne.
Le gouvernement qui a pris récemment les commandes doit se plier aux injonctions
de Bruxelles. Il le fait bon gré mal gré en négociant une diminution des
exigences d’austérité. Malgré tout le peuple ne suit pas et le plan est difficile
à tenir. La crédibilité des marchés dans son respect diminue en même temps que
les taux d’emprunt augmentent et viennent de dépasser les 7%. Or le monde
économique dit que l’on ne peut soutenir longtemps un taux supérieur à 6%.
L’Espagne glisse donc de plus en
plus vite vers la faillite et l’Europe va devoir venir à son secours dans les mois
ou semaines qui viennent, ce qui ne fera certainement que retarder l’échéance. En
France le différentiel de taux avec l’Allemagne, le fameux « spread », croit aussi. Après les élections, des
verdicts vont tomber sur la santé de l’économie française et ils ne peuvent pas
être bons.
La croissance n’est pas là, notre
commerce extérieur est toujours en déficit chronique et les mesures d’austérité
annoncées par les deux candidats à la présidence sont basées sur des hypothèses
de croissance trop optimistes. Nous allons donc emprunter le cheminement de l’Espagne.
Le chômage va augmenter, des entreprises vont encore se délocaliser ou fermer,
le tour de vis de l’austérité nous sera plus durement imposé, le pouvoir d’achat
baissera, le paiement des fonctionnaires et des retraites sera mis en cause. On
peut même craindre que, dans un devoir de salut public, l’épargne des français soit
confisquée pour un temps.
Mais il faut regarder l’Espagne face
à la deuxième menace qui nous guette à moyen terme, soit dans les dix prochaines
années, la menace de l’immigration et particulièrement celle venant de l’autre
côté de la Méditerranée.
En 2007 et 2008 l’Espagne a été
le pays accueillant le plus d’immigrés juste derrière les Etats-Unis. Cette
immigration avait une forte proportion de latino-américains (Colombiens,
Equatoriens…). « L'immigration est
en Espagne un phénomène très récent et son rythme a été frénétique. Les
gouvernements successifs du conservateur José Maria Aznar (1996-2004) et du
socialiste José Luis Rodriguez Zapatero (depuis 2004) ont entériné cette
explosion démographique par des régularisations massives, s'attirant au passage
les foudres de leurs partenaires européens. » (Le Figaro)
L’Espagne est encore le pays
ayant reçu le plus grand nombre d’immigrés par rapport à sa population. Une
étude diffusée cette semaine par le gouvernement révèle que 77 % des
personnes interrogées jugent le nombre d'immigrés en Espagne «excessif»
(46 %) ou «élevé» (31 %). Seuls 19 % pensent que la proportion
est «acceptable» alors que seulement 21% jugeaient le nombre excessif en 1996.
Deux phénomènes se sont
développés récemment. La proportion des immigrés provenant de l’autre côté de
la Méditerranée a augmenté tandis que nombre de latino-américains retournent
dans leur pays. Ces derniers, souvent embauchés dans la construction, se
retrouvent sans travail et constatent le décollement de l’économie de leur
pays. La crise non seulement tarit le flux d’entrée mais augmente le flux de
sortie. Or ces Latino-Américains sont sans conteste ceux qui s'intègrent le
plus facilement. Ils maîtrisent la langue et connaissent la culture espagnole. Au
contraire les marocains, qui sont les plus nombreux et pourtant arrivés les
premiers en Espagne, souffrent de l’exclusion. Les moros, comme on les surnomme
de façon péjorative, ont plus de mal à accéder à un emploi ou à un logement.
La conjonction de ces deux
phénomènes entraîne avec la crise une augmentation d’un sentiment de rejet de
la population que certains ne tardent pas de traiter de « racisme ».
En fait, jusqu'à la récession de 2008, seuls les immigrés acceptaient les
travaux les plus pénibles, nécessitant une faible qualification et mal
rémunérés. Mais avec l'arrivée de la crise et sa cohorte de 20 % de
chômeurs, l'essentiel est désormais d'avoir un emploi. Quel qu'il soit.
La crise met le problème de l’immigration
au cœur des préoccupations d’emploi des espagnols et les difficultés d’intégration
des populations musulmanes ne sont pas encore le principal moteur du rejet de l’immigration.
L’Espagne avait surtout vu l’immigration latino-américaine, sans réel problème
d’intégration et bienvenue pour soutenir les besoins de main-d’œuvre bon
marché. Ce n’est plus le cas et tout ce que nous connaissons en France, où l’immigration
musulmane est la plus importante, s’abat sur l’Espagne en crise avec un chômage
insupportable.
Il n’y a pas de bonne immigration
Quand elle ne correspond pas à un besoin temporaire de main-d’œuvre
Quand la naturalisation ne peut pas s’accompagner
d’une véritable assimilation et d’un emploi.
Claude Trouvé