Cameron vient de l’avouer le
Royaume-Uni est rentré en récession après deux trimestres de déficit de
croissance et malgré ou à cause d’un plan « ambitieux »… d’austérité.
Pourtant le Royaume-Uni emprunte sur les marchés à un taux plus bas que la
France. Nous sommes dans cette situation ubuesque où la France, au contraire du
Royaume-Uni, conserve une croissance anémique et se voit mise en observation
avec une perte de confiance des investisseurs puisque son taux d’emprunt vient
de dépasser 3,1%. Toutefois les deux sont implicitement menacés de perdre le
triple A.
Merkel, BCE, FMI jugent la santé
des pays européens à leur plan d’austérité. Cette vue s’avère donc bien
réductrice et particulièrement pour des pays dont d’une part la charge de la
dette est importante et d’autre part le commerce extérieur très déficitaire. Serait-ce
ce que dit Mario Draghi, président de la BCE devant le parlement européen à
Bruxelles ?
« Nous avons un pacte budgétaire (...). Nous
devons revenir en arrière et en faire un pacte de croissance. »
Seulement voilà tout est
dans la recette à trouver. Angela Merkel lui emboîte le pas à sa manière qui
devra être la nôtre comme d’habitude :
« Nous
avons besoin de croissance, de croissance sous forme d'initiatives pérennes,
pas juste de programmes de conjoncture – qui creuseraient encore la dette
publique – mais de croissance, comme Mario Draghi l'a dit aujourd'hui, sous
forme de réformes structurelles. »
De toute évidence aucun de
nos deux candidats n’a un programme structuré pour réaliser ces deux objectifs
dans le cadre de l’euro et des traités actuels même avec un zeste de croissance
souhaitée. Aucun d’eux ne peut y trouver un encouragement pour son programme.
« Un pacte de croissance », voilà qui fleure bon le keynésianisme,
encore un peu d’argent pris sur le futur pour être habilement redistribué.
Le rachat des obligations souveraines
par la BCE n’est plus ni moins qu’une planche à billets, c’est-à-dire un
travail de faussaire qui est l’un des crimes le plus sévèrement puni par la
loi. Les liquidités que la BCE a déjà pratiqué n’ont d’ailleurs pas
quitté les banques qui ont reconstitué leurs fonds propres et hésitent à prêter
à des Etats ou des entreprises dont la solvabilité ne serait pas solide. La demande
n’est d’ailleurs pas très importante de la part d’industries qui hésitent à
investir, vu le contexte économique actuel de ralentissement de la croissance
mondiale.
Pour se faire une idée de ce qui
attend la France dans ses comptes publics, nous ne disposons pas du petit
document synthétique joint à notre déclaration de revenus cette année. Il faut
aller piocher dans des documents beaucoup plus absconds. Voilà ce que donne la
comparaison entre 2011 et le budget 2012.
Dépenses
en milliards d’euros
|
2011
|
2012
|
Total
|
363,4
|
376,2
|
Enseignement et recherche
|
87
|
87,6
|
Collectivités territoriales
|
58
|
?
|
Charge de la dette
|
45,4
|
48,8
|
Défense
|
37,4
|
38,0
|
Sécurité
|
16,8
|
17,5
|
Solidarité, insertion et
égalités de chances
|
12,4
|
12,7
|
Gestion des finances publiques
et des ressources humaines
|
11,7
|
11,6
|
Travail et emploi
|
11,6
|
10,1
|
Ecologie et développement
durable
|
9,5
|
9,6
|
Ville et Logement
|
7,6
|
7,6
|
Justice
|
7,1
|
7,4
|
Union Européenne
|
18,2
|
?
|
Autres missions
|
40,7
|
?
|
Recettes
en milliards d’euros
|
2011
|
2012
|
Total
|
271,8
|
290,8
|
Impôt sur le revenu
|
130,9
|
137,8
|
Impôt sur les sociétés
|
44,8
|
44,9
|
Taxe d’importation des produits pétroliers (TIPP)
|
14,1
|
14,0
|
Autres recettes fiscales
|
12,9
|
18,6
|
Autres recettes
|
16,9
|
15,8
|
TVA
|
130,9
|
137,8
|
Vous noterez que la charge de la dette (c’est à
dire non pas son remboursement, mais le seul fait de payer les intérêts) est
devenue le troisième poste de dépense
publique.
- Cette charge absorbe 16,8% des recettes et 82% de nos impôts sur le revenu.
- Le déficit fiscal se monte à (dépenses – recettes)/ recettes soit (376,2 -290,8) / 290,8 soit 85,4 / 290,8 et donc 29,4 % des recettes.
En France, 100 de
dépenses sont financées par 70 de recettes et 30 de déficit. Ce n’est pas
tenable et l’austérité à la française qui consiste à taper sur le contribuable
pour augmenter les recettes sans diminuer les dépenses n’est pas la solution. L’OCDE s’est
penchée sur notre cas et nous conseille de réduire les frais de gestion
administrative de notre système de santé, les prestations familiales,
d’augmenter la TVA.
Quand on veut
atteindre un ratio nul d’augmentation de la dette par rapport au PIB, c’est-à-dire
ce qui est prévu pour 2016 ou 2017 selon les candidats, il y a deux façons d’y
parvenir comme nous l’avons appris au lycée. On peut avoir une augmentation
nulle de la dette mais on peut aussi avoir un PIB devenu infiniment grand, le
ratio sera nul aussi. J’ai peur que ce soit, vu les prévisions trop optimistes
sur la croissance, la deuxième manière sur laquelle compte le gouvernement
futur, c’est-à-dire l’irréalisable car la recette de la croissance n’est pas
trouvée.
Royaume-Uni et France ne sont pas seuls…
La Grèce s’enfonce dans une récession plus grave que prévu
Madrid et Rome empruntent à des taux en forte hausse
L’Europe se débat contre les remèdes aux déficits avant de sombrer.
Claude Trouvé