Nos candidats à la présidentielle
avancent masqués et leurs programmes ne sont pas à la mesure des évènements
économiques qui nous attendent. Seule des grands pays de l’Europe la France ne
prévoit pas un changement radical de sa politique économique. Les propositions
de Hollande et Sarkozy sont de la poudre aux yeux. La croissance, ce remède
miracle évoqué comme la potion magique qui imbibe une austérité douce, ne se
décrète pas, elle se construit lentement dans une politique claire sur l’avenir
de la France dans l’Europe.
La France est entrée depuis une semaine en zone de turbulences électorales.
Il faut dire que nous l'avons bien cherché. Avec une campagne déprimante, des
candidats pitoyables et des programmes déconnectés de la réalité de la crise,
nous voilà exposés à tous les vents des marchés. Des marchés dénoncés par tous
les candidats, mais des marchés qui financent notre… dette. Cette dette c’est celle
que les gouvernements successifs de gauche et droite ont creusé, année après
année depuis 1974, en donnant à tous les corporatismes pour les échéances
électorales, en omettant les réformes structurelles nécessaires à la diminution
des dépenses de l’Etat.
« Quel que soit le candidat
qui sera élu, le verdict des investisseurs est tombé : La France doit lancer un
programme de réformes structurelles à l'italienne et s'attaquer enfin à la
réduction de ses dépenses publiques. Or chacun des deux principaux candidats a
donné hier un meeting à Paris, aucun n'a réellement parlé de sacrifices, et les
deux ont donné des raisons aux marchés de s'inquiéter. Sarkozy a remis en cause
l'indépendance de la Banque centrale Européenne et c'est le sujet qui énerve le
plus les allemands, et Hollande veut renégocier le traité européen fraîchement
signé et c'est l'autre sujet qui énerve les allemands. »(Capital)
Nous sommes dans une Europe à domination allemande et nos petites crises de
mauvaise humeur se termineront toujours de la même façon. L’Allemagne a une
Europe taillée à sa mesure pour l’instant et ne pliera pas sur la BCE, ni sur
les conditions de fonctionnement du nouveau MSE, ni sur le dogme de l’austérité
d’abord, la croissance ensuite. Cette dernière n’est évidemment pas sa
préoccupation première car c’est nous qui alimentons la sienne.
Moody’s va lâcher son verdit le 12 mai sur les banques européennes et sur
la France. Vu les programmes de deux candidats, on peut pronostiquer une baisse
de la note de la France et peut-être des trois banques principales françaises.
Si c’était le cas la France traverserait un énorme trou d’air avec la perte de
la confiance des investisseurs, des pertes de liquidité des banques et des
difficultés à emprunter au taux de 3% actuel à 10 ans. Notre commerce extérieur
ne se porte pas bien et la croissance n’est pas au rendez-vous de ce semestre
en tous cas. On peut toujours rassurer l’électeur en prédisant la reprise,
celle que l’on a déjà souvent prédite ces temps-ci, mais cela ne trompe pas les
marchés et les investisseurs.
Les Etats-Unis alimentent une croissance molle par l’injection de liquidités
sur le marché. La Chine a une croissance forte mais en diminution constante et
doit se réorienter sur son marché intérieur avec une légère réévaluation du
yuan. Mais l’avenir de l’Europe et de l’euro va se jouer avec les quatre pays Irlande,
Portugal mais surtout Espagne et Italie. Nous sommes aujourd’hui dans le calme
relatif de l’œil du cyclone mais l’euro est déjà exposé aux vents périphériques
des nations du sud. N’en doutons pas, ce qui est certain c'est que la France
est au centre des radars des investisseurs. Après une campagne déconnectée de
la réalité de la crise et un affrontement de programmes surréalistes, les
candidats nous ont exposés à d'éventuelles attaques des marchés.
Pour peser dans l’affrontement avec l’Allemagne, la France doit envisager suffisamment
sérieusement une porte de sortie des traités. L’avenir de l’euro et par là même
l’avenir de l’Europe doit être au centre des discussions. Si la détermination
de la France n’est pas clairement affichée et crédible, l’Allemagne n’aura
aucun intérêt à changer les règles du jeu qu’elle a fixées et qui lui sont
favorables. La construction possible d’une Europe à plusieurs vitesses, comme évoquée
par Fabius au moment de Maastricht, la création d’une monnaie commune sont des
voies alternatives mais en toile de fond la France doit se dire prête à sortir
des traités et de l’euro si des évolutions notables ne sont pas négociées.
Aucun des deux principaux candidats n’a affiché cette détermination et nous
risquons de rentrer dans une discussion longue à rebondissements mais à issue à
l’allemande avec quelques concessions ne remettant pas en cause le fondement
des traités. Cette course de lenteur ne résistera pas à l’impatience des
marchés et ruinera la confiance des investisseurs. Ce sont les pays faibles qui
paieront la note et nous allons en faire partie au train où nous y allons. L’Espagne
vient d’entrer pour la deuxième fois en récession et emprunte désormais à 6%.
Son climat social est désastreux et le chômage touche la moitié des jeunes. C’est
le trou d’air vers lequel nous nous dirigeons.
Si le gouvernement de Mariano Rajoy a présenté un budget de rigueur sans précédent, avec des coupes budgétaires de l'ordre de 27 milliards d'euros, Madrid entend accroître son effort dans la réduction du déficit afin de rassurer les investisseurs. De cette manière, les régions sont appelées à réduire leurs dépenses de santé et d'éducation dans le but de dégager une économie de 10 milliards d'euros supplémentaires.
Si le gouvernement de Mariano Rajoy a présenté un budget de rigueur sans précédent, avec des coupes budgétaires de l'ordre de 27 milliards d'euros, Madrid entend accroître son effort dans la réduction du déficit afin de rassurer les investisseurs. De cette manière, les régions sont appelées à réduire leurs dépenses de santé et d'éducation dans le but de dégager une économie de 10 milliards d'euros supplémentaires.
Il n’y a que deux voies réalistes possibles soit la course vers le
fédéralisme en abdiquant notre indépendances nationale remise entre les mains d’un
organisme supranational, encore un peu plus éloigné du peuple que notre gouvernement,
soit une Europe des peuples ou des nations à géométrie variable mais où chaque
nation adhère, au fur et à mesure de ses intérêts, à des regroupements, à des
convergences sociales et législatives, à une monnaie, à des plans structurels
européens, à des investissements de la taille d’un continent, à des frontières
clairement adoptées par ses peuples.
Chacun doit se rendre à l'évidence que la première solution ne peut se mettre en place que sous le joug de l'Allemagne actuellement. Le consensus à la majorité, même qualifiée, n'est pas pour demain en dehors de toute autre considération. Les solutions des demi-mesures ne sont faites que pour gagner du temps mais la gangrène n’attend pas.
Chacun doit se rendre à l'évidence que la première solution ne peut se mettre en place que sous le joug de l'Allemagne actuellement. Le consensus à la majorité, même qualifiée, n'est pas pour demain en dehors de toute autre considération. Les solutions des demi-mesures ne sont faites que pour gagner du temps mais la gangrène n’attend pas.
Le navire France, qui n’a pas
choisi la passe
Pour s’abriter au port en pleine
tempête,
Peut se fracasser sur les écueils
qui l’attendent.
Claude Trouvé